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Billard et lavage de linge en famille (OS)
Lionel Roque-Lartigue

Billard et

lavage de linge

en famille.


/!/ TW : on évoque un peu des abus familiaux (physiques et verbaux) ici, rien de très détaillé mais vala :V /!/
Bonus : Lionel_billard_mauvaise_foi.jpeg



C’est avec un plaisir non dissimulé que Lionel découvre qu’il n’a pas régressé dans son niveau de billard. Il y attache sans doute trop d’importance, surtout quand il joue contre son grand frère. D’ordinaire le coordinateur n’est pas compétitif… sauf que c’est Hanson en face. Il faut vraiment qu’il consulte un car cette manière de compenser en permanence pour avoir l’approbation d’autres personnes pour le moindre petit effort devient maladive. Lionel le sait, en plus, que plus il attend des compliments et de se faire dorlotter par des personnes qui ne peuvent pas lui donner ça pour diverses raisons, plus il se rend malheureux.

N’empêche qu’il est fier comme un paon, de gagner la partie, c’en est exaspérant. L’ainé n’en dit pas grand-chose. Sans doute ne veut-il pas trop l’encourager. A la place, les deux profitent du jeu pour parler de tout et de rien. Comme c’est assez rare qu’ils parlent d’autre chose lorsqu’ils sont à court de sujet de conversation, finalement, c’est le thème de leur famille qui revient une fois de plus. Et dès ce moment, Lionel commence à être de moins en moins jovial. C’est simple, évoquer ses histoire de famille, ça fait ressortir toutes ses peurs actuelles et aussi des remords (même s’il ne veut pas l’admettre).

« Maman me demande beaucoup de tes nouvelles tu sais ? »

Le cadet se crispe. Il s’était penché sur la table afin de vérifier l’alignement de la boule blanche avec deux de ses boules rayées. S’il se débrouillait bien, avec l’angle de la table et la force de frappe, il pourrait en faire rentrer deux d’un coup. Mais s’il devenait nerveux à la seule évocation de sa mère, alors, il risquait aussi fortement de faire rentrer la 8 sur une maladresse. Ce serait la défaite direct et un peu la honte. Du coup, il préfére la jouer sécuritaire et se contente de faire tomber une seule des boules rayées. Après ça, il se redresse et continue son tour de la table afin de rejouer. Il n’a pas pensé à se placer idéalement pour son prochain coup, c’est ennuyeux. C’est qu’il pensait à autre chose, maintenant, il est déconcentré.

« Ah bon ? Vous vous parlez beaucoup ? »

Demande-t-il platement en essayant d’avoir l’air neutre alors qu’en réalité, il ne peut s’empêcher de se demander si Sixtine s’inquiète vraiment pour lui. Ou si elle casse du sucre dans son dos avec son habituel ton mielleux. C’est que contrairement au ressentiment qu’il a envers son paternel, Lionel n’arrive pas à détester sa maman. Effectivement, elle ne peut s’empêcher de donner son avis surtout ce qu’il fait et le prend souvent de haut, l’a souvent oublié quand il était petit mais… il ne sait pas, il y a toujours eu quelque chose de tendre, de touchant, parfois, chez Sixtine. Quand elle venait lui raconter des histoires le soir, l’emmenait toujours au musée puis boire des cafés certains week-ends (elle était ravie que ça l’intéresse car apparemment, Agamemnon et Hanson s’en fichaient totalement)… il y a des bons souvenirs. Le bleu lui en veut pour de nombreuses raisons, mais il a souvent eu la sensation que Sixtine s’ennuie et se sent seule dans sa grande maison, comme elle avait décidé de rester au foyer suite à son mariage. Quelque chose chez elle déclenche toujours une certaine compassion chez son cadet mais il ne saurait pas mettre le doigt dessus.

« Eh bien, elle m’invite souvent à prendre le thé étant donné que tu as tendance à la snobber ces derniers temps. »

Le quarantenaire appréhende les réponses de son grand frère. Et en entendant le léger reproche dans la voix d’Hanson, il se tend et rate son coup suivant, loupant l’occasion de continuer son tour. Tandis que son frère aîné s’installe à un point de vue qui lui permet de décider de sa stratégie, Lionel pince les lèvres et détourne piteusement le regard, tout ça pour sortir, non sans prendre de travers les propos de l’autre :

« Pff, si elle peut t’inviter toi à la place, c’est que je ne suis pas si indispensable... »

Parce que, bon, c’est un peu vrai qu’il snobbe Sixtine depuis un petit moment maintenant. Ça ne lui fait évidemment pas plaisir. N’empêche que sa réaction aux remarques d’Hanson n’est pas franchement mature. D’ailleurs, le plus âgé lui adresse un regard en biais, puis regarde ailleurs en soupirant.

« Tu es obligé d’être de si mauvaise foi ? »

De nouveau, le bleu fait la moue et croise ses bras sur son torse. C’est vrai qu’il est d'une humeur de Mastouffe ces temps-ci. Avec toutes ces histoires de famille, d’adoption et de Zlatan, il se découvre sous un nouveau jour. Il se sent plus lui-même. Mais il est aussi parano. Il est mort de trouille à l’idée que personne n’accepte la personne qu’il essaie de devenir, ou juste de se tromper de chemin…

Si ça se trouve, je suis juste en train de devenir encore pire qu’avant ! La preuve, apparemment je suis de mauvaise foi.

C’est simplement que quelque soit son niveau de bonne volonté, il n’est pas encore prêt à admettre certaines choses à son sujet. Certains de ses pires défauts, de ses pires acquis de gosse de riche. Naïvement, il se dit que faire des efforts va le bonifier et lui éviter de se confronter à ses côtés les plus laids. S’il veut trouver comment affronter ces aspects-là de son histoire et de lui-même, alors c’est bien là qu’il va commencer à avoir besoin d’aide. Faire le premier pas vers le changement est une chose, affronter les changements en est une autre. Très rares sont les personnes qui y parviennent sans une aide ou un certain suivi. Pour le moment, la partie « va chercher de l’aide car tu n’y arriveras pas par la seule force de ton esprit que tu épuises déjà assez avec tes conneries » échappe à Lionel. Il ne veut pas en entendre parler. Il veut se croire plus fort que ça, au-dessus de tout ça. Pourtant, le voila qui s’énerve encore d’avantage sur les reproches d’Hanson.

« Quoi ? C’est vrai ! Si elle voulait vraiment me voir alors elle... »

Le brun en était déjà à son deuxième coup. Il fait rentrer une deuxième boule, prenant l’avantage sur la partie. Le bleu se mordit la lèvre et ses mains se crispèrent sur sa queue de billard.

« Tu t’obstines. »

Je m’obstine ? Moi ? C’est vrai qu’elle… raaaah, je ne sais plus !

Oui, il s’obstine à trouver des raisons de ne surtout pas se confronter à sa mère. Il refuse également de lui prêter de bonnes intentions ou une envie sincère de peut-être s’excuser pour ce qu’elle lui avait dit lorsqu’il avait parlé de l’adoption.

Mais je suis naïf ou quoi ? Je ne sais pas quoi penser… je pense que c’est important de donner aux gens des nouvelles chances, après, tout, il y a des personnes qui ont accepté de m’en donner. Mais… elle sera déçue. Encore. Ça se passe toujours ainsi. Je ne serais jamais parfait comme…

Il fait volte face vers son frère qui vient de finir son tour de jeu et soutient finalement son regard.

« C’est toi le préféré de toute façon, tu-- »

Oui, oui, Hanson par-ci, Hanson par-là… Pourquoi il me regarde comme ça ?

« ...Mais tu as quel âge ? »


L’aîné se masse le tempes en grognant. Les épaules de Lionel se tendent encore plus. Il va perdre la partie, comme ça, c’est sûr.

Calmes-toi, Lionel. Pense yoga. La mer. Les vagues qui vont et qui viennent. Tu entends les bruits de la nature qui viennent à toi. Le calme. Le CaaAAAAaAAaLme.


Mais le coordinateur doit admettre que le banquier n’a pas tord : Lionel a trop souvent les mêmes arguments qu’un pauvre gosse de 8 ans. En plus, il est indécent. Effectivement, leurs parents prennent souvent la carrière d’Hanson en exemple, mais il n’empêche que durant leur enfance, eh bien, l’ainé n’a pas été plus gâté que le plus jeune ou moins délaissé. Sans doute avait-il, à l'époque, simplement un caractère plus facile à vivre que celui de Lionel, ce qui lui évitait de se prendre autant de claques que le cadet. Sans ça, dire qu’Hanson est « le préféré », c’est complètement con et vraiment infantile. Finalement honteux d’avoir encore révélé le fond peu reluisant de sa pensée, Lionel rougit et fait nerveusement le tour de la table afin d’organiser son prochain coup. Hors de question de se rater.

En voyant le cadet se calmer, Hanson revient lui aussi au calme, mais a quand même encore envie de railler un peu son interlocuteur.  

« Tu es frustré en ce moment ou quoi ? »

Mais-- mais euh ! C’est… c’est pas faux.

Après s’être légèrement renfrogné, Lionel se détend et fait la moue. C’est vrai qu’il est frustré. Non seulement car il n’arrive à rien ces derniers temps, qu’il est bloqué avec ces fichus « changements » qu’il ne peut régler totalement par lui-même, qu’il se sent incapable d’être honnête avec son entourage avec ce qu’il est. Puis, évidemment, Zlatan lui manque beaucoup et il est en manque de lui, de son affection et de son contact, surtout en ce moment, comme il est déprimé. Ou alors, c’est l’approche du printemps.

Les propos de son grand frère ont au moins eu l’effet de faire réaliser à Lionel qu’il est complètement transparent lorsqu’il fait son caprice. Il soupire et ses épaules retombent. La détente lui permet de réussir son coup, revenant à égalité avec Hanson.

« Ce n’est pas ça… Enfin, si, mais... »

Il se mord la lèvre. Tant qu’il n’est pas honnête, tant qu’il ne dit pas ce qu’il ressent, alors, il n’arrivera pas à bien avancer. Puis, s’il ne montre pas un peu à ses parents qu’il existe quelqu’un derrière son apparence de fifils docile qui se fait passer pour l’idiot de service afin de faire comme s’il ne se sentait pas humilié, alors, il aura du mal à se retrouver en paix avec ses émotions.

« Pardon de te projeter tout ça dessus. Je… je suis en colère contre eux et je n’ai pas très envie de les voir, c’est tout. »


Admet-il finalement, non sans se sentir tout de suite un peu honteux. Comme s’il devait être ravi de s’être fait presque humilier par ses parents la dernière fois (et bien d’autres fois, d’ailleurs). Une boule se forme dans sa gorge lorsqu'il reprend :

« Et puis, quand je vais prendre le thé avec maman, elle ne fait que critiquer mes décisions et me prend pour un gamin. Et puis, tu te rappelles ce qu’elle à dit quand j’ai parlé de l’adoption ? »

S’emballe-t-il, encore bléssé en repensant à ce fameux repas. Loin de s’en réjouir, Hanson soupire puis pince les lèvres à son tour. Il veut bien compatir, sur ce coup-là. Lui-même avait trouvé assez limite la manière dont Sixtine et Agamemnon avaient directement décidé d’attaquer Lionel personnellement sur ses « capacités » à être un bon parent. Cela dit, ça ne l’empêche pas de penser que son petit frère se conforte dans cette attitude un peu enfantine de « bouder » pour ne pas affronter ses problèmes. A 40 passés, il serait temps qu’il se bouge un peu.

« Au lieu de fuir, tu devrais lui parler. Elle est maladroite, mais, elle s’inquiète vraiment. »

Ah, il n’en démord pas ! Ce n’est pas la peine de me sortir les violons pour me faire culpabiliser !

Hanson n’est pas du genre à en faire des tonnes, bien au contraire. L’idée de faire du tire-larmes n’est pas son objectif. Il ne fait que rapporter ce qu’il a pu constater lorsqu’il a vu leur mère la dernière fois. Lionel n’a rien à répondre cette fois-ci. Il baisse les yeux, faisant sens des dernières paroles de son frère. Tout compte fait, il veut bien lui laisser le bénéfice du doute.

Hm… si ça se trouve, elle veut vraiment s’excuser… ? Mais pour autant, qu’est-ce que je devrais faire ? Je crois que son opinion compte pour moi quand même. J’aimerais bien qu’elle me dise qu’elle est heureuse pour moi, qu’elle m’encourage. Que ce soit pour l’adoption ou pour ma relation avec Zlatan. Mais si elle me fait encore des reproches… bon, j’imagine que c’est que c’est inutile de m’obstiner avec elle.

C’est triste de le dire ainsi, mais, c’est aussi à lui de faire le tri dans son entourage, maintenant, pour s’entourer de personnes plus saines, qui l’accepteront tel qui est et ne projetteront pas leurs exigences absurdes sur lui. Dans tous les cas, le sujet le mine un peu et ils étaient venus pour jouer, pas pour déprimer.

« On peut changer de sujet et revenir au jeu ? »
« C’est probablement mieux. »


Dans une certaine mesure, ces conversations leur permet de réduire un peu la distance qui s’est mise entre eux ces dernières années. Hanson a le mérite d’être franc et de savoir ce que Lionel a vécu avec leur famille. Peut-être bien que Lionel besoin d’entendre ce « oui bah je sais que les parents ont été des gros cons avec nous mais à un moment faut te bouger sinon tu vas passer à côté de ta vie » implicite pour progresser. Cela dit. Il doit aussi voir un psy, et en vitesse, au lieu de traînasser en sautant sur toutes les excuses bidons imaginables.  
Zazambes - Début 2025
Lionel Roque-Lartigue
Lionel Roque-Lartigue
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Ven 17 Avr 2020 - 22:55
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