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Café soluble [OS]
Livie A. Vulpino

>>> Café soluble
>>> Obtention & Éclosion de Crona
Livie a une règle : ne jamais s'attacher à un client. Jamais, pour aucune raison que ce soit, car c'est dangereux, et lui coûte bien plus qu'elle ne peut se permettre de perdre. C'est pourtant la règle qu'elle enfreint le plus souvent.
Ils n'ont pas tous de noms. Ou du moins, ils n'en ont plus dans sa mémoire. Elle a beau s'enorgueillir du bon souvenir qu'elle a des visages, il en passe tellement devant son bureau chaque matin, chaque soir, chaque heure, qu'elle finit par les confondre. Madame Delamare, condamnée pour faux et usage de faux, devient le jeune Rimbaulet, qui continue de l'appeler en lui demandant nerveusement quand est-ce que la cour rendra son verdict, comme si elle ne lui avait déjà pas précisé une tonne de fois. Elle se souvient toujours des dossiers, pourtant. Aussi obscurs peuvent-ils être des fois, elle a la sensation de ne jamais totalement pouvoir les dégager de sa mémoire : ça a ses avantages comme ses inconvénients, même si trop nombreuses nuits blanches passées à se demander si elle aurait pu faire mieux font sans doute penser davantage la balance d'un côté plutôt que de l'autre.

« Mêlez-vous de vos affaires, Vulpino. L'affaire est perdue, un point c'est tout. »

Elle avait souri gentiment, comme à chaque fois, parce que peut-être que son supérieur était de mauvaise humeur, et passait une passe difficile. Mais monsieur Simmons passait toujours une mauvaise journée, et Livie ne tiqua pas lorsqu'elle l'entendit claquer la porte. Les lumières des autres bureaux s'éteignaient toujours les unes après les autres ; les plus anciens partaient en premier, suivis des plus jeunes qui, lessivés, rampaient jusqu'à l’ascenseur une fois que l'aiguille s'arrêtait sur vingt-et-une heure. De temps à autre, elle s'amusait à prendre des notes, pariant dans sa tête sur qui finirait en premier, ou du moment que choisirait Simmons pour lui faire la morale sur elle ne savait quelle affaire. Il faisait ça à tout le monde, après tout. On disait, dans le milieu, que c'était normal, que c'était comme ça, qu'ils en avaient sué, alors qu'ils devaient aussi en suer à leur tour. Livie trouve qu'il a l'air triste, monsieur Simmons, à chaque fois qu'il crie ; comme si il cherchait à se convaincre lui-même.

C'est souvent lorsqu'elle enfreint sa règle qu'elle se retrouve ainsi, seule dans le bâtiment, à part peut-être pour Sally, l'agente d'entretien, qui termine toujours en dehors de ses heures car elle sait ce qui l'attend si jamais elle se présente et que tout n'est pas impeccable. La seule chose qui les réunit, c'est peut-être qu'elles risquent toutes deux la porte si tout n'est pas soigné au millimètre près, même si Livie ne mettra jamais ses heures supplémentaires sous la même coupe que la sienne. Pourtant, elle la salue toujours quand elle s'en va chercher un nouveau café, bourré de sucre et de lait condensé, car elle s'imagine que ses traits finiront peut-être par s'éclairer un peu, à force de lui sourire. Ça ne marche pas comme ça, évidemment.

Son propre bureau n'est pas particulièrement grand. Elle ne s'en préoccupe pas, car c'est loin d'être sa première priorité une fois qu'elle a mis le nez dans les étagères et les classeurs, dans ces épais. Il n'est pas très bien éclairé non plus, à vrai dire, et ce n'est pas faute d'avoir tenté de changer les ampoules par ses propres moyens : selon son voisin, cela fait une bonne dizaine d'années que ce lampadaire n'a pas fonctionné, et elle veut bien le croire, vu la couche de poussière qu'elle y trouve. Tout respire la poussière, par ici. Tout semble être poussière, même, quand elle s'aventure dans les archives et a plus l'impression d’apercevoir  un océan de dunes grises que des dossiers bien rangés. Elle passe un petit coup de balai, même si ça ne sert à rien : tout reviendra demain. Le fouillis s'amenuise juste un peu, parfois, le temps d'une pause, de ranger un objet pour en prendre un autre. De temps à autre, elle s'amuse à poser des objets quelconques par dessus, pour voir si ils tombent. Ils tombent, souvent.

Ses yeux se plissent alors qu'elle tente de donner sens à la dernière décision de la cour de cassation, cherchant la moindre élément qui pourrait lui permettre de tirer profit de cet arrêt. Ce n'est pas grand chose, après tout. Mais à ce stade, elle serait prêt à un rien : pour faire appel, elle pourra toujours trouver quelque chose, dans son temps libre, comme maintenant. Car évidemment, Sarah Ackles n'est pas une affaire que l'on veut voir dans ses comptes rendus : pas de grande chance de gagner, tant dans la cour que sur un compte en banque. La preuve, même : le premier verdict a été rendu avec une telle rapidité et une telle aisance que Livie avait eu l'impression d'une gifle lorsqu'elle avait ouvert l'enveloppe.

Elle s'y attendait. Bien sûr, qu'elle espère, souvent. Elle ne peut pas se permettre de ne pas le faire, car si elle n'y croit pas, elle ne voit pas vraiment comment elle pourrait déclamer ses plaidoiries avec honnêteté. Personne n'y croira, si elle ne le fait pas, du moins elle a l'arrogance de le croire. Elle doit espérer, et elle ne rechigne pas : elle prend chaque élément, chaque petite preuve, pointe chaque minuscule contradiction, chaque vice de forme qui peut lui permettre de gagner du temps, car c'est son travail. On lui a dit plusieurs fois qu'elle ne faisait que perdre du temps, et que ironiquement, elle risquait surtout de ne pouvoir aider personne, au final. Que ce n'est pas son métier, de jouer les assistantes sociales. Sûrement ont-ils raison, ou du moins n'ont-ils pas entièrement tort. Mais même si elle écoute, Livie ne peut pas dire oui. C'est ce qui lui permet de ne pas avoir l'air alertée lorsque son regard bleuté passe vaguement sur l'horloge.
Mais elle savait. Les preuves étaient tellement nombreuses que même si l'avocate avait réussi à en réfuter certaines, à forces de procédures longues et pénibles, ça n'avait été qu'une goutte d'eau en moins. Elle en avait perdu, des pauses déjeuner, à engloutir rapidement un plat préparé au goût d'huile et d'eau chaude, ne serait-ce que pour cette goutte. Elle avait tenté, pourtant. Elle avait même cru lire dans les yeux du juge une étincelle d'hésitation, ou une lueur incertaine dans le regard du milicien en charge de l'affaire. Il n'en fut rien, au final. Dans le fond, elle le savait très bien. Elle n'en est plus à son premier procès, et tout le monde le lui avait déjà dit, que ça se finirait ainsi.

C'est autre chose de l'annoncer, toutefois. De passer par la prison, sous les regards désabusés, parfois méprisants, souvent désintéressés des gardes, de faire tout ce chemin pour se contenter de ça, de quelques mots sur une feuille. Des mots qui ne sont pas grand chose, qui ne disant rien, du moins rien que Livie ne juge intéressant. Qu'est-ce que cela peut lui faire, hein, que la décision a été prise en adéquation avec la peine infligée lors d'un procès vieux de trois ans ? Que quelques clauses ont été aménagées, que tout ça était très propre, très bien fait, et que tout le monde serait content ?
Les larmes, elle a fini par s'y habituer, ironiquement. On ne s'y habitue jamais, lui avaient dit certains, le regard comme hanté par tant d'histoires qu'ils n'auront jamais le loisir, ni le temps, de partager. Il y en a tellement. Livie s'y habitue car elle pense qu'elles sont passagères. Qu'il y a toujours quelque chose à faire, même si la situation paraît désespérée ; elle ne préfère pas se demander si elle pense pour elle-même, ou pour ses clients. Dans l'un ou l'autre, elle commet une faute de toute manière, alors à quoi bon ?

Alors à ce moment, Livie commet toujours une erreur : elle demande si elle peut faire quelque chose. Même si elle ne devrait pas, parce qu'elle ne peut pas retirer ce bourdonnement dans sa tête qui s'insurge à chaque fois qu'elle se lève du parloir, partant comme une voleuse après avoir discuté des détails nauséabonds et malaisants que sont ceux liés au règlement. Elle le fait, car à ce stade, elle n'a plus que ça pour croire. En quoi, ça, elle ne le sait pas trop.
Les requêtes n'ont souvent pas de sens, ou déconnectées de la réalité. Aller nourrir le pauvre chat qui va devoir trouver un nouveau maître doit être le plus commun. Parfois, c'est passer un coup de fil aux enfants, aux proches, au conjointe ou conjoint. Un petit rien, comme demander si ils pourront encore lire un peu, ou sortir à Noël. Une fois les larmes taries, une fois les cris arrêtés, il n'y a plus que ça, des petits rien du tout, que Livie pense importants. Quand bien même elle ne fait que rappeler à un cousin qu'une des plantes a besoin d'être abreuvée, elle voit bien à leur air un peu soulagé que ça joue, quelque part. Mais elle ne devrait pas, elle le sait. Elle a entendu assez d'histoires qui se terminaient mal quant à ce qui pouvait arriver quand un avocat s'approche trop ; et autant dire qu'Icare n'était pas très loin du compte.

Elle ne devrait donc pas s'étonner de se retrouver dans une position déplaisante maintenant. Elle n'avait pas cru à grand chose, quand la cliente lui avait demandé si elle pouvait récupérer un carton d'affaires chez elle, car pour une raison qu'elle n'avait pas précisé mais que Livie n'avait pas cru bon d'appuyer, elle semblait craindre que ces dernières soient inutilisées pendant longtemps. L'avocate avait dit oui : après tout, au pire, elle pourrait toujours donner ce qu'elle trouverait à ce qui en avaient le besoin. Tout au plus avait-elle trouvé le carton lourd, quand elle l'avait ramené au bureau. Entre deux dossiers, elle s'était dit qu'elle pourrait jeter un coup d’œil. Peut-être même que l'avoir devant les yeux la motiverait à engager des procédures qui n'avaient aucune chance d'aboutir, tiens.
Sauf que le carton a commencé à bouger.

Elle n'en a pas vu beaucoup dans sa vie, mais elle reconnaît bien vite qu'il s'agit d'un œuf de Pokémon. Ses yeux s'écarquillent et elle recule brusquement, comme choquée par ce qu'elle aperçoit et comprend. Une étincelle de peur brille dans son regard, et elle ravale difficilement sa salive, comme si c'était soudainement bien dur. Elle aimerait ramener ce carton là où elle l'a trouvé, mais elle ne peut pas, car il n'y a plus rien où il pourrait être. Elle ne veut pas saisir pourquoi sa cliente lui a demandé d'aller chercher ces 'affaires quelconques', car elle voit, maintenant, ce dont il s'agissait réellement.  
Elle n'est pas la bonne personne pour ça. Elle ne le sera peut-être jamais, même si elle s'agace de son propre défaitisme. Calico n'est pas pareille : elle se débrouille, elle a sa petite vie, elle est indépendante. Un petit, ce n'est pas pareil. Pas du tout pareil, d'autant plus que la coque se fissure bien trop rapidement, et que très vite, de grands yeux bleus innocents se fixent sur elle.  De grands yeux bleus qui appartiennent à un petit Scrutella, plein d'innocence et de vie, qui la regarde avec une curiosité toute naturelle et qui lui emplit la poitrine d'un sentiment froid.

Livie expire. Elle attrape le carton, le soulève, et le pose sur son bureau, quitte à faire disparaître quelques feuilles très importantes par la même occasion : elle ne s'en préoccupe pas trop, pour le moment. Elle s'assoit de nouveau à sa chaise, en tentant d'éviter le regard curieux du Scrutella qu'elle gratifie faiblement d'une caresse hésitante. Pour l'instant, il est comme tous ces dossiers : une urgence, à traiter plus tard, entre deux cafés, quand elle en aurait le courage.
Elle soupire un peu, les doigts tremblotants, et descend d'une traite la boisson laiteuse et éhontément sucrée qui lui brûle la gorge au passage. Puis, mécaniquement, ses doigts se perdent dans la pile de dossiers, qu'elle examine rapidement avant d'en choisir un. Grignotant le bout de son stylo, même si elle sait depuis longtemps qu'elle devrait arrêter, elle recommence, avec cette sensation étrange dans le creux de son ventre, brûlante et noueuse tout à la fois. Tout le long, le regard du petit ne la quitte pas.

21 Janvier 2023
Livie A. Vulpino
Livie A. Vulpino
Sr de la Confrérie
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Dim 21 Jan 2018 - 0:25
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