« Bartholomew Abashalom Templeton, je vous condamne à mort pour le meurtre de Mr. Doudou, dont la tête a été découpée sans pitié et sauvagement avec les ciseaux à bout rond »« Mais, c’est vraiment pas juste ! »Bartholomew afficha une moue boudeuse, pendant que son grand frère, de cinq ans son aîné, abattait sur le bureau un marteau en plastique. Il avait voulu utiliser celui de son père, mais ce dernier avait catégoriquement refusé, répondant que c’était « un outil de travail, pas un jeu. »
Elijah avait donc fouillé dans sa chambre pour un ressortir victorieusement ce qui s’apparentait plus à une réplique de marteau de bricolage qu’à celui d’un juge, mais il s’était dit que ça ferait l’affaire. De toute façon, son cadet ne ferait pas la différence. Elijah était bien trop énervé pour laisser passer l’assassinat de sa peluche favorite, et puis il voulait faire « comme papa ». Dans sa tête, ça signifiait envoyer les méchants en prison. C’était aussi le cas pour Bartholomew qui, actuellement, n’avait aucune idée de comment se défendre.
« Vous devrez rester dans le grenier jusqu’à la fin de votre vie ! »« Non !!! Non pas le grenier, il y a des fantômes ! »« Ne discutez pas, accusé ! »Et c’est ainsi que Bartholomew, 5 ans à l’époque, se retrouva enfermé dans le grenier de la maison familiale, abandonné à son propre sort avec rien de plus qu’une gourde remplie d’eau que son frère avait daigné lui donner (Elijah avait dit « Je ne suis pas un monstre, le prisonnier pourra boire. »).
Le garçonnet avait toujours suivi les jeux et idées de son aîné sans jamais poser de questions. Autant dire que la plupart du temps, il se retrouvait bouc-émissaire ou victime d’une farce. Cela dit, Elijah ne pensait pas à mal, il aimait énormément la petite tête brune, il ne réalisait sûrement pas suffisamment qu’il était capable de bien des méchancetés parfois. Enfermer le cadet dans un endroit dont il avait peur en faisait partie, par exemple. Oh, il le délivrerait avant que leurs parents s’en aperçoive, il ne prendrait pas le risque de se faire gronder. Bartholomew ne dirait rien de toute façon.
Ça avait toujours été comme ça. Bartholomew naquît le même jour que son frère, seulement, à cinq ans d’écart. Un hasard qui avait fait office de signe divin pour les parents, très croyants, qui avaient bien pris soin d’élever au mieux leur deux petites têtes blondes (enfin brunes en l’occurrence). Le père était juge, et la mère officière dans la police de Glasgow, ville où habitait toute la famille.
Les parents s’étaient rencontrés dans un tribunal, sur une affaire de contrebande de Pokemon, et étaient ensemble depuis huit ans, marié depuis sept, quand ils eurent leur premier enfant.
Bartholomew était arrivé second, beau petit bébé très en forme et arrivé en avance sur le planning prévu, d’où la théorie du signe divin.
Elijah avait appris très tôt à s’occuper de son petit frère, pas que ses parents ne lui portait pas d’attention, mais tout simplement par choix. Loin d’être jaloux, il avait vu en ce nouvel arrivant un compagnon de jeu, qui pourrait faire tout ce qu’il souhaitait. Au départ, il l’avait plus vu comme un poupon animé que comme un être humain. Mais les deux garçons s’entendirent très vite, et Bartholomew suivait son frère partout, même si c’était dangereux, même si c’était des bêtises, même si Daddy et Mummy n’étaient pas d’accord.
Ce jour-là, dans le grenier, le petit garçon avait respiré à fond. Sa mère faisait ça quand elle se concentrait, et elle lui avait appris que ça pouvait chasser ses peurs. Il ferma les yeux, et commença l’exercice de respiration qu’on lui avait enseigné. Il ne pouvait pas avoir peur, pas maintenant, il était un prisonnier, c’était sa faute car il avait tué Mr. Doudou. Mais il devait être fort pour ressortir ensuite, et surtout, se battre contre le fantôme si ce dernier venait.
Il était sûr qu’il y en avait un. Il avait entendu des craquements, des souffles, plein de petits bruits venant de là-haut. Il n’y avait aucune autre explication. Le fantôme n’avait jamais attaqué personne, mais Bartholomew n’était jamais entré dans le grenier non plus. Est-ce qu’il allait déranger l’habitant des lieux ?
« Monsieur le fantôme ? Je ne veux pas vous déranger, je vais partir après…. ne soyez pas un méchant fantôme, s’il-vous-plait » avait-il dit
Il avait passé plusieurs heures à attendre, d’abord assis dans un coin sans bouger, puis il avait trouvé un carton rempli de livres imagés qu’il avait feuilleté, pour passer le temps. Aucun fantôme n’était apparu, et pour être honnête, quand son frère lui rouvrit enfin la porte, il s’en retrouva déçu. Peut-être qu’il aurait bien aimé le voir, finalement ? Surtout que son aîné se moqua de lui après coup, lui assurant qu’il n’y avait rien du tout dans le grenier, et que de toute façon, les vrais fantômes, ça existait pas.
Mais cela résultat en une nouvelle obsession pour Bartholomew : l’enfant voulut à tout prix prouver l’existence et la présence d’un fantôme dans le grenier de la maison. Il en parla à ses parents, qui lui demandèrent gentiment mais fermement de ne jamais se rendre dans le grenier tout seul. Dans la tête du garçonnet, germa l’idée que c’était pour ne pas qu’il le voit, le fantôme.
« Maman, je sais que tu veux me protéger du fantôme, mais je suis un courageux ! »
Il passa donc les quelques années suivantes à essayer de s’introduire, souvent avec la complicité de Elijah, dans le grenier, et récupérer des preuves de l’existence du spectre. Son père avait été vérifier avant qu’aucun Pokemon ou petit rongeur ne causait les bruits entendu par son fils, dont la chambre se situait juste en dessous. Il n’y trouva rien, et mis les craquements sur le compte du vieux bois et les soufflements, simplement sur le vent. Il pensait avoir suffisamment bien élevé ses enfants pour que ceux-ci lui obéissent sans rétorquer. Grand bien lui fasse, cela ne les empêcha pas de contourner les règles une fois que son dos à lui était tourné.
Le petit écossais avait commencé un journal, dans lequel il dessinait tout d’abord avant d’apprendre à écrire, dans lequel il récoltait les « preuves » qu’il avait de l’existence du fantôme. Il y racontait des faits, ce qu’il avait vu, entendu, et plus tard, lorsqu’on lui offrit un petit appareil photo jetable pour ses 7 ans, il y apposa les tirages de ce qu’il avait capturé.
C’est probablement autour de cet âge là que commença réellement sa passion pour le paranormal. Au départ, il n’était qu’un enfant comme tous les autres, à croire en tout ce qu’on lui racontait, et ses géniteurs ne firent pas bien attention à ce qu’il disait. Les histoires de fantômes, tous les gamins en racontaient, ça n’avait rien d’étonnant.
Sauf que, alors que la plupart passaient à autre chose en grandissant, Bartholomew lui, ne cessa jamais d’y croire.
***
« C’est bon Bartho, arrête de raconter de la merde, tu veux ?»Elijah prononça quelques mots en français, langue qu’il étudiait depuis quatre ans déjà. Après tout, c’était la langue de leur grand-mère maternelle, et il n’avait pas trop eu le choix que de se la faire enseigner. Ce serait bientôt le cas de Bartholomew d’ailleurs, qui pour le moment ne connaissait que les insultes et autres joyeusetés dites par son frère.
« Je t’ai déjà dit, Nessie est une légende. C’est une histoire qu’on raconte, mais c’est faux. »Bartholomew souffla d’agacement. Du haut de ses 11 ans, l’enfant avait déjà eu plusieurs fois, trop de fois, ce genre de discussion avec son frère. Elijah ne croyait en rien. Il avait arrêté de chasser le fantôme du grenier deux ans après le meurtre de Mr. Doudou, et s’était depuis acharné à faire comprendre à son frangin que tout ça, c’était des histoires.
Sauf que le cadet n’avait jamais démordu. Il n’avait pas pu trouver le fantôme du grenier, mais ça ne voulait pas dire que ces êtres spectraux n’existaient pas. Après tout, il y avait bien des Pokemon de type spectre, alors, tout était possible, non ?
« Des gens ont vu des choses, tu peux pas dire ça ! Y’a même des photos ! »« Écoute. On a jamais réussi à rien prouver, d’un côté comme de l’autre. Ça peut être un bout de bois, ou juste un Pokemon, mais pas une légende millénaire. »
Bartholomew tira la langue. Son frère était vraiment trop bête ! A un point que ça l’énervait. Il devenait un grand, un adolescent, et avec ça, il le contredisait de plus en plus. Il ne croyait plus en rien, et se moquait du plus jeune de la famille à chaque fois que ce dernier arrivait avec une nouvelle histoire.
Non, vraiment, c’était nul.
L’enfant rangea son carnet. Il avait continué à en remplir, pleins d’annotations, sur ce qu’il observait, entendait. C’était un peu fouillis, et ses recherches souvent très peu concluantes, mais ça lui plaisait, et il était persuadé qu’il allait faire la découverte du siècle. Ne serait-ce que pour faire fermer son clapet à son frère. Ouais, ça, ce serait sacrément marrant.
Il trouvait la plupart de ses théories et légendes en lisant des livres ou en regardant la télévision. Il n’avait pas le droit de regarder certaines chaînes, mais profitait de l’inattention de ses parents ou de la gentillesse de sa grand-mère (quand elle les gardaient) pour glaner le plus d’informations possibles, et les noter dans son précieux carnet. Il n’avait pas trop l’occasion de se rendre sur place, mais il s’était promis que, quand il serait plus grand, il irait voir de lui-même. Il pourrait devenir grand reporter pour ça ! Enfin, il imaginait. Il ne savait pas trop ce que c’était comme métier, de prouver les choses que personne ne croit.
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C’est deux ans plus tard qu’il tomba la première fois, totalement par hasard, sur une émission de chasseurs de fantôme. Des hommes adultes, équipés de tout un tas de matériel que Bartholomew se mettrait à apprendre par cœur, partaient à la recherches de spectres et autre entités surnaturelles. Il leur arrivait parfois de tomber sur des Pokemon farceurs, mais d’autres fois, ils trouvaient des choses… des vraies choses, selon Bartholomew, loin de se douter que la plupart des émissions de ce genre étaient truquées.
Résultat des courses, il demanda à son anniversaire suivant un caméscope de haute qualité avec un mode vision nocturne, ainsi qu’un détecteur EMF. La curieuse requête de leur fils inquiéta subitement les parents, qui lui demandèrent si « tout ça, c’était pas fini ?».
« Mais maman, les fantômes ! On peut dire s’ils sont là avec ça ! Alleeeeeez, s’il-te-plaît….. »Et tel le bon enfant pourri gâté qu’il était, il reçu deux semaine plus tard exactement ce qu’il voulait. Sa mère ne lui refusait rien tant que ça restait dans son budget. Bartholomew était celui qui faisait les demandes les plus excessives et extravagantes et, malgré qu’il avait déjà essuyé plusieurs refus (notamment sur une chaîne hi-fi), cette fois, ce ne fut pas le cas.
Et voilà comment il se retrouva, une fois de plus mais huit ans plus tard, dans le grenier de la maison qui n’avait toujours pas changée, équipé comme il pouvait, prêt à chasser les fantômes.
« Bonjour, je suis Bartholomew Templeton, je viens en paix pour vous poser quelques questions. »
Le jeune garçon avait entendu que ses parents soient couchés pour se glisse à l’étage. D’après ce qu’il avait appris, les fantômes sortaient plus de nuit. Il avait activé son EMF, et il le tenait d’une main (dans l’autre se trouvait le caméscope, en train d’enregistrer).
Il y passa deux à trois bonnes heures, et eu espoir à plusieurs reprises quand son appareil montra quelques changements dans les ondes, mais rien de bien excitant. Il prit quand même le temps de revoir son enregistrement, cru détecter quelques mouvements, mais rien de concluant. Rien qui ne pourrait prouver l’existence d’un esprit dans son grenier, en tout cas.
Ce jour-là, il abandonne l’espoir de trouver un fantôme chez lui. Il s’était peut-être trompé. Il n’abandonna toutefois pas l’idée que le paranormal était quelque chose de réel. Jusqu’à ses 16 ans, cependant, il ne put vraiment aller trop loin dans ses recherches. Ses parents ne le laissait jamais aller bien loin sans surveillance, et son frère veillait au grain. Il dut attendre que ce dernier quitte la maison familiale avant de pouvoir réellement « passer à l’action ».
C’est dans l’année de ses 15 ans qu’il commença un blog. Il était plutôt fier de lui, à l’époque, et son blog était joli (du moins aussi joli qu’il pouvait l’être en cette année 2004) et il le complétait autant qu’il le pouvait. Il n’avait pas un nombre énorme de visiteurs mais certains lui étaient fidèles et partageaient eux-même leurs propres expériences du paranormal, que Bartholomew, enfin Bat, partageait avec joie. Il espérait pouvoir alimenter son blog autant qu’il pouvait, et aussi longtemps que possible. Si ça se trouve, on parlerait de lui à la télé, après.
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« Que les weekends ? Mais j’en ai besoin ! »Bartholomew pesta de manière inaudible. Un an après l’ouverture de son blog, il se voyait obligé de se rendre dans un internat. Ses notes n’avaient pas été au point selon ses parents, il s’était bien trop plongé des ses passions ces dernières années (qui surprenamment n’impliquait pas seulement le paranormal), et s’il voulait faire des études plus tard, il allait devoir être à la hauteur. Au départ, il avait accepté, après tout, il voulait étudier pour se consacrer à son intérêt principal. La chasse aux fantômes n’était pas franchement une licence universitaire, mais il pouvait toujours suivre un cursus scientifique qui lui permettrait d’étudier les phénomènes paranormaux.
Sauf qu’il n’avait pas vraiment calculé le fait qu’il n’aurait accès à son ordinateur et à internet que quand il reviendrait les weekends chez ses parents. Il eu beau insister et demander à y réfléchir plus longtemps, son inscription était déjà faite et, quelques semaines plus tard, il prit le train en direction de la capitale Écossaise.
Ces deux années se déroulèrent plutôt bien. Il était un élève avec un niveau correct, il ne ratait pas de cours. Certes il était quelque peu turbulent et connu comme un des plus aptes à trouver les meilleures conneries à faire dans son école, mais il était loin de ramer ou d’être mauvais. Il rencontra des personnes qui devinrent ses amis. L’une d’entre eux en particulier devint sa copine pendant toute leur scolarité, et c’est notamment la jeune femme qui introduit, par le biais de sa mère, le monde de la coordination à Bartholomew. Au début, il s’y intéressa, de loin. C’était de jolis spectacles, mais ce n’était pas l’une des choses qu’il préférait voir. Cela dit, il aimait beaucoup les spectacles de magies et d’hypnose, et les attaques Pokemonesque entraient parfois dans ce domaine là.
Il obtint son diplôme de fin de scolarité avec brio et une mention. Ses notes en science étaient les plus hautes, ce qui lui permit d’intégrer une grande école dans ce cursus. L’école était en partenariat avec un établissement français (il l’avait choisi pour faire plaisir à sa grand-mère), et il avait quelques cours en cette langue, en plus d’un échange une fois par an.
C’est lors du premier échange de ce type qu’il captura son premier Pokemon, un Fantominus qu’il avait trouvé, je vous le donne en mille, dans le grenier des gens qui l’hébergeait. Les bruits qu’il avait entendu étaient cette fois bien réels, et il ramena le petit spectre avec lui en Ecosse.
Quand il avait le temps et qu’il s’ennuyait, notamment après sa séparation avec sa copine, il l’entraînait à faire quelques tours. Rien de bien incroyable, mais ça lui plaisait, le spectre était fascinant, et il pouvait s’amuser à faire peur aux gens. Il l’utilisa même en sujet de thèse.
En parallèle de ses études, Bartholomew prit un petit boulot dans une librairie qui revendait des livres anciens. Il adorait l’odeur de papier de ces vieux livres, et il avait trouvé quelques petites perles à force de les ranger sur leurs étagères. Son patron le laissait parfois en feuilleter dans l’arrière-boutique, et le jeune homme avait pu récolter tout un tas d’informations supplémentaires à inscrire dans ses carnets. Il y ajoutait des photos, des articles, des dessins, des incriptions… bref, tout ce qu’il trouvait utile. Ça l’occupait, mine de rien, c’était pour lui devenu un passe-temps, au final.
Après ses années d’études et un doctorat en poche, qu’il avait achevé dans une université française (principalement parce qu’il avait été sur un coup de château hanté et qu’il n’avait pas voulu lâcher l’affaire), il pu enfin mettre un terme bien mérité à sa scolarité, et se consacrer pleinement à ce qui l’intéressait le plus. Il allait devenir un scientifique du paranormal, et ses travaux seraient reconnus dans le monde entier.
***
« Et c’est ainsi, chers collègues, que s’achève ma présentation. Merci de m’avoir écouté. »Avec un tel niveau, il pensait qu’il serait pris au sérieux, mais force fut de constater que ce n’était pas le cas. Après un silence pesant, quelques applaudissements fusèrent, mais ils furent bien vite recouvert par des rires. Bartholomew avait été invité à participer à une présentation en compagnie d’autres jeunes diplômés. Dans la salle se trouvaient différents présidents d’organisations et directeurs de laboratoire, à la recherche de leurs futurs employés.
Quand le fanatique du paranormal eut terminé, il se souvint soudain d’à quel point le monde, surtout scientifique, était fermé à ses théories. Pour lui, il n’y avait rien de plus fantastique que ce qu’ils connaissaient déjà. C’est juste que la science n’avait jamais réussi à expliquer l’existence des fantômes. Les vrais, pas les Pokemon spectre par exemple. D’ailleurs, Bartholomew avait basé une de ces théories là-dessus : si les Pokemon de ce type, et toutes leurs caractéristiques, existaient bel et bien… pourquoi pas le reste ?
Malgré l’échec absolu de sa présentation, l’écossais fini par être employé dans un laboratoire spécialisé dans les recherches et analyses sur les Pokemon de type Spectre et Ténèbres. Une aubaine pour le brun dont c’était les types préférés. Le laboratoire se situait à York, en Angleterre, mais travaillait en collaboration avec plusieurs autres laboratoires autour du monde, et notamment un sur Enola, dont l’activité avait été réduite depuis les évènements que Bartholomew n’avait pas trop cherché à comprendre à l’époque. Il appris plus tard, au cours d’une discussion avec un collègue qui avait de la famille là-bas, l’existence du Régime et leur politique… discutable (Bartholomew n’avait jamais été doué en politique) et la situation actuelle de cette île aux allures pourtant paradisiaques.
Le cadet Templeton avait continué de s’entraîner avec son Spectrum à ses heures perdues, et au cours d’une sortie dans le comté (dont le but avait été d’observer des Pokemon dans leur milieu naturel, à savoir des vieilles ruines), il avait combattu et capturé un Noctali. Il n’avouera bien sûr jamais avoir obtenu l’aide de son collègue. Même collègue d’ailleurs qui lança ce pari débile qui résultat en un tournant inattendu des évènements : la fantastique carrière dans la coordination de Bartholomew.
« Vas-y, maintenant ! »Un cri dans la salle déchira le silence qui régnait depuis une bonne dizaine de minutes déjà. Le spectateur derrière lequel était apparu le visage terrifiant d’un Spectrum fit un bon en avant, se rattrapant de justesse à sa voisine. Un sourire satisfait s’afficha sur le visage de Bartholomew, tandis que les membres de jury fronçaient les sourcils.
On s’était demandé qui était ce clown qui depuis le début du Concours s’était évertué à mettre en place un spectacle effrayant avec ses Pokemon. On se demandait même si ce n’était pas un gros prank. L’homme lui, était simplement amusé, et déterminé à achever la punition de son pari. Il avait même réfléchi, pendant un instant qui fut – Arceus merci – court, à tout laisser tomber et devenir coordinateur. Il n’avait pas plus de talent que ça, mais ça… l’amusait.
Sa fantastique carrière se stoppa au bout d’un an, après que ses shows effrayants n’aient pas eu l’air d’avoir l’effet qu’il avait escompté. Pfff. Tous des poules mouillées.
« Ils n’ont juste rien compris à mes spectacles. Si la coordination c’est seulement des paillettes, je vois clairement pas l’intérêt. »Il ne semblait pas spécialement se rendre compte qu’il n’était peut-être juste pas fait pour ça. C’est fort heureusement qu’il ne continua pas dans cette carrière, et décida de se reconsacrer pleinement à ses recherches. Il avait beaucoup voyagé pendant cette année, sans jamais cependant participer à des concours de haut niveau, mais il avait pu apprendre plein de choses, et surtout économiser un maximum d’argent. Il en fallait, pour être le meilleur enquêteur du paranormal au monde.
***
Bartholomew réussit à rejoindre une équipe de scientifiques en expédition dans des tombeaux en Egypte. Le but était bien sûr de les étudier et peut-être d’en découvrir plus sur les manières de vivre et de faire de leur ancêtres. L’écossais se garda bien de dire qu’il était surtout intéressé par cette rumeur de momie qu’on entendait marcher la nuit dans un village à proximité. Il avait appris depuis longtemps qu’il ne serait pas pris au sérieux tant qu’il n’apporterait pas de preuves concrètes et de faits réels… mais il n’abandonnerait pas sa passion avant que cela arrive.
Arrivé sur place, dans l’un des tombeaux, Bartholomew avala encore un peu d’eau. Il savait qu’il devait en conserver un maximum – ils seraient là toute la journée et une partie de la soirée – mais il n’avait jamais réussi à gérer ses rations, de toute manière. Il était pressé d’en finir avec cette partie du travail. Ce soir, ils dormiraient au village, et il aurait plein de temps pour mener ses enquêtes. Il avait déjà pu relever des inscriptions qui semblaient faire mention d’un esprit et d’un sacrifice à celui-ci pour calmer son courroux, et ce tombeau semblait important là-dedans.
« Ah… aaaaah ! »Le cri peu viril de son collègue fit accourir Bartholomew. Il découvrit le jeune homme dos contre un mur, en train de reprendre sa respiration. Au sol, un vase brisé, qui venait d’on ne sait où (il n’y avait pas d’étagères dans cette pièce).
« C’est toi qui a fait ça ? »« Qu… quoi ? Non, non, j’ai eu peur. C’est tombé derrière moi, pouf, comme ça ! » répondit le jeune avec un accent français prononcé.
« Hum, étrange... »C’était une de ses répliques favorites. Quand il disait ça, il frottait son menton avec sa main, un air suspicieux dans le regard. On ne voyait pas beaucoup ce dernier, Bartholomew ayant décidé depuis quelques mois d’arborer en permanence des lunettes de soleil. A l’intérieur des tombeaux, cependant, il n’y voyait pas suffisamment clair.
Un second bruit retentit pendant qu’il essayait de déterminer ce qu’il s’était passé, et tout le groupe s’engouffra dans un couloir qu’ils n’avaient pas remarqué avant. Ils parvinrent finalement dans une salle carrée, remplie d’étagère sur lesquelles reposaient des objets en tout genre. De précieux items, qu’il faudrait étudier et…
CLONKUn second vase se brisa, et c’est enfin que les scientifiques purent apercevoir non pas un esprit maléfique mais bel et bien un Tutafeh, qui semblait prendre un malin plaisir à tout casser. Bartholomew se proposa de lui régler son compte, et fini par le capturer, intéressé par le potentiel du petit.
Plus tard, quand il se rendit au village, il eu beau poser des questions autour de lui, il ne put récolter d’informations concluantes concernant la momie, et la nuit, il n’entendit pas le moindre bruit. Il était pourtant resté éveillé, avait disposé avec soin le matériel qu’il avait apporté avec lui, mais à sa plus grande déception, rien de surnaturel ne s’était produit.
***
C’est pendant cette expédition qu’il rencontra Maya, et c’est avec elle qu’il rentra en Belgique, chez elle. Les deux s’étaient trouvés des passions en commun, notamment la collection de vieux livres, et s’imaginèrent rester ensemble à tout jamais. Maya apprit rapidement la passion pour le paranormal de son petit ami, mais au début, elle n’en tint pas rigueur. Au départ, elle le laissait partir et faire ses enquêtes, mais au bout de plusieurs mois de relations, elle se rendit rapidement compte qu’elle ne comptait pas autant à ses yeux qu’elle l’aurait cru.
« Bartholomew, je te le dit, pour la dernière fois. C’est les fantômes, ou moi. »« Et bien… les fantômes ! »L’homme avait ajouté à cette phrase un sourire qu’il n’aurait peut-être pas dû affiché sur son visage. Le lendemain, il se retrouva avec ses valises à devoir retourner dans son Écosse natale. Le temps de retrouver un appartement, il fut logé chez son frère aîné, qui lui avait une vie tout à fait acceptable de comptable, marié, avec deux jumeaux de 11 ans.
Quand arrivèrent l’anniversaire de leur 12 ans, ce fut au dernier moment, alors que la fête battait son plein et qu’on se préparait à apporter les cadeaux, que Bartholomew se rendit compte qu’il avait oublié d’en acheter un. On était dimanche, et, de toute façon, son frère vivait en pleine cambrousse, le prochain magasin ouvert était à des kilomètres. Elijah s’approcha de son cadet, s’attendant à tout de sa part. Il n’avait pas bougé de la semaine, donc impossible qu’il ait eu le temps de faire des emplettes. L’aîné de la famille décida quand même d’appuyer là-dessus.
« Alors Bartho, ces cadeaux ? Oh, j’imagine que leur tonton préféré leur a préparé quelque chose de grandiose ! »L’enquêteur du paranormal réfléchit rapidement. Il devait trouver quelque chose, et vite. Il avait toujours été doué pour ce genre de pirouette, mais son frère le connaissait très bien et saurait lire à travers lu. A ce stade, impossible de prétexter une urgence.
« Oui, oui bien sûr ! Je voulais garder la surprise même de toi ! Voilà voilà ! »Il mit les mains à sa ceinture et en décrocha deux Pokeball. Le regard que lui lança Elijah dura plusieurs secondes, un regard d’incompréhension. Il ne savait pas trop quoi en penser. Mécaniquement, il réceptionna les balls, et les posa à côtés des autres cadeaux destinés à ses fils.
Et c’est ainsi que Théophile et Samuel reçurent respectivement un Noctali et un Spectrum.
***
A tout juste 30 ans, Bartholomew décida qu’il était temps qu’il se reprenne en main. Il ne pouvait pas vivre éternellement chez son frère et, de toute manière, ses économies lui permettait maintenant de reprendre un train de vie acceptable. Comme il l’avait fait il y a plusieurs années auparavant, il rouvrit un blog, toujours sur le même thème mais avec un design beaucoup plus poussé cette fois. Il s’inscrit sur les réseaux sociaux, et mit même en place un système de dons, pour que ses followers et ses fans financent une partie de ses expéditions et enquête, notamment pour le matériel, qui revenait à bien plus cher qu’un voyage en avion ou une nuit dans un hôtel low-cost.
L’homme fini même par ouvrir une chaîne youtube, chose sacrément à la mode, mais aussi un des seuls médias par lesquels il pouvait diffuser sa passion sans se faire censurer de tous les côtés. Il portait avec fierté son titre de scientifique, mais la plupart de ses homologues n’avaient aucun respect pour son domaine de recherche. Dans les conférences, il se faisait passer pour un expert des Pokemon de type Spectre, ce qui n’était pas entièrement faux, vu qu’ils les avaient longuement étudié. Ça lui permettait de pouvoir présenter quelques-une de ses études (souvent, avant de se faire sortir de force de la salle par les membres de la sécurité).
Sur YouTube, il se fit appeler BarthewDx, un nom qu’il avait choisi de manière assez aléatoire, mais qui selon lui sonnait bien. Sur toutes les vidéos, on le voyait toujours arborer ses lunettes noires. La nuit, il portait des lunettes de vision nocturnes, tant et si bien qu’aucun de ses abonnés ne connaît à ce jour la couleur de ses yeux. Il prétend qu’ils sont jaunes, comme ceux d’un serpent, mais tout le monde sait très bien que c’est impossible.
Une de ses enquêtes l’emmena en Irlande, dans une maison prétendument hantée. Il embarqua avec lui tout le matériel dont il avait besoin, et cela incluait ses précieuses caméra, certaines qu’il laissaient en places, d’autres qui étaient constamment sur lui, ses détecteurs EMF, des torches et projecteurs, une « GhostBox », et d’autres outils indispensables à son travail.
La maison était, d’après ce que racontaient les habitants des lieux, hantée par le fantôme d’une petite fille morte 100 ans auparavant, et qui revenait jouer, seule et désespérée à la recherche de compagnie humaine. Bartholomew résida dans ce qui fut la chambre de l’enfant pendant deux jours et deux nuit, et fini par capturer en vidéo le déplacement nocturne d’une petite forme violette. La seconde nuit, notre chasseur de fantôme parvint à capturer, pour de vrai cette fois, la fauteuse de troubles : une Polichombr. L’écossais assura que l’esprit de la petite fille s’était réincarné en ce Pokemon. Puisque les résidents en avaient trop peur, Bartholomew décida de la garder.
Au fur et à mesure de ses voyages et enquêtes, il finit par s’intéresser à Enola, qui avait récemment vécu un désastre et un bouleversement dans sa politique. Il se souvint de l’époque où il en avait entendu parler la première fois. Il éplucha quelques brochures, lu des articles et se renseigna directement par l’intermédiaire de son ancien collègue, celui qui avait de la famille là-bas… et décida de s’y rendre.
Fraîchement débarqué sur l’île, il ne sait pas ce qui l’attend, mais il en est tout excité. Il est sûr de pouvoir découvrir plein de choses. Et puis, une région qui a connu tant de conflits, de changements, et qui en plus, abrite en son sein une légende aussi mystérieuse que fascinante… Bartholomew ne pouvait pas rêver mieux.