Décidément, ce n’est pas une journée comme les autres. Pas pour Mell, en tout cas. On tombe facilement dans la routine et dans sa solitude, quand on est chercheur, donc ce genre de moments comme celui qu’il partage actuellement avec Tristan. C’est plutôt bienvenu, en fait. Faire un peu le point sur ce qu’on ressent vis-à-vis de ce qu’on a fait pour en arriver à sa situation actuelle ça ne peut jamais nuire et ça permet de réfléchir, au mieux, ça donne envie d’être indulgent envers soi-même. Cette dernière chose n’est pas évidente pour Tristan à l’heure actuelle, mais il essaie visiblement de faire en sorte que cela change. Le binoclard ne sut pas trop quoi dire quand le grand brun le remercia puis s’excusa. Il lui semble avoir déjà entendu ça quelque part… c’est vrai que ce ne serait pas la première fois que le ranger-éleveur lui confie ses doutes de la sorte. Mell ne peut pas lui donner les réponses qu’il attend forcement ni lui montrer le chemin à suivre (il ne se permettrait pas, surtout) mais c’est tout de même agréable de voir un ami se détendre après une conversation débordant sur des sujets plus persos.

« Euuuh… b-baaaah… c’rien. »

J’suis pas hyper facile à vivre non plus !

Tristan se remit à réfléchir à son récit. Ce qui se dégagea de ses paroles, c’est effectivement qu’il ne se voyait pas tellement rester ranger, finalement. Mell se contenta d’hausser les épaules. Le Weber n’est pas trop dans la galère financière, à son niveau, donc, il peut réellement avoir le choix, même prendre des pauses de temps en temps s’il le faut. Le Straum trouve que c’est une bonne chose d’avoir les moyens de prendre des moments pour réfléchir réellement et avoir du recul sur nos activités quotidiennes. C’est quelque chose qu’il ne fait pas assez… en même temps, il a peut de ce qu’il pourrait trouver, comme par exemple, le fait que parfois, depuis qu’il est devenu docteur, il arrive à un point où il se dit « bon et maintenant je fais quoi pour m’occuper ». Évidemment, il y a toujours à faire dans le milieu de la recherche, mais c’est un peu toujours les mêmes cercles de connaissances, de chercheur.se.s. Il refait souvent des communications qui se ressemblent car la progression de ses recherches interessent moins que les choses qu’il a fait il y a déjà plusieurs années, qui elles, trouvent plus facilement leur place dans des rassemblements ou journées d’étude. Il ne s’ennuie pas vraiment, mais… des fois, ça peut être monotone et solitaire. Et pour cette dernière chose, il a du mal à combler le vide de manière vraiment saine. Mais bon, c’est un autre sujet.

« P-pis si tu tiens à ça, t’es pas obligé de forcément t’sép-parer d’Elixir ! Tu pourras rester af-ff-filié à eux ! »

Tristan dû suspendre ses réflexions pour le moment car son téléphone sonna. Mell le laissa à son coup de fil mais entendit assez vite la voix paniquée de l’interlocuteur du ranger… un problème sur le campus ? Le chercheur ne tarda pas à en savoir plus, comme le Weber lui annonça qu’il devait aller aider au refuge, justement. Mell n’eut pas le temps d’être un peu déçu de devoir se séparer de son ami, car on lui proposa d’embarquer pour une nouvelle aventure. Apparement, un Ronflex faisait n’importe quoi à la réserve et le binoclard voyait en quoi cela pouvait être problématique.

« Ouhla… euh. Ok m-mais, p-pourquoi ? J’sais pas si j’servirais à g-grand chose ? »

Apparemment Adam avait demandé à ce qu’il vienne, c’est sûrement qu’il avait une bonne raison. Le chercheur suivit donc son ami dans la direction du refuge qui était heureusement pas très loin.

Une fois sur place, Mell constata, pour le dire vulgairement que le refuge était « dans un bordel monstrueux » à cause du Ronflex turbulent. Il compris rapidement que tout ce pataqès était dû au fait que le Pokémon s’était pris d’une passion « Métronome » et lançait donc régulièrement des attaques aléatoires. La chose n’était pas plus simple étant donné qu’un Ronflex c’est très costaud, résistant et en plus ça prend de la place. Mell n’est pas spécialiste des combats contre les Pokémon sauvages, mais il sait effectivement quelques trucs sur comment arrêter un Métronome.

« Tristan ? Faut l’f-forcer à utiliser une aut-tre attaque ! C-comme entrave ou-- »

Le scientifique n’eut pas le temps de finir sa phrase car le Ronflex venait de se redresse légèrement pour agiter de nouveau sa pate. En prime, il entreprit de se retourner sur le ventre afin de mettre encore plus à l’aise, ce qui fit un grand bruits qui effraya encore plus les autres Pokémon du refuge (Saucisse avait déjà pris Lazuli dans ses bras pour aller se cacher avec d’autres bestioles derrière une pile de rochers qu’il accumula grâce à Tomberoche). Puis, pas de chance, le métronome fit apparaître une petite tornade qui força Mell à se jeter par terre avec d’autres personnes, espérant s’échapper de cette manière. Après cette violente bourrasque, le chercheur ne s’en sorti qu’avec ses cheveux encore plus ébourrifés que d’habitude. Ses affaires, en revanche, avaient été éparpillées partout.

Roh, non, mes fiches !

Ca allait être une désastre à ramasser et à re-classer… heureusement qu’il avait tout sur son ordi sous un forma virtuel. Cependant, quand il vit les Pokéball de ses alliés rouler avec d’autres, il se jetta dessus, espérant trouver celle d’Azolith, son Hypnomade ou de Vortex, son Spinda. Azolith aurait pu entraver le Ronflex, mais il ne le retrouvait pas. Il ne put faire sortir que Vortex, qu’il dû tout de suite calmer pour qu’il ne panique pas et lui expliqua rapidement son plan. Le Spinda, malgré sa petite taille, avait toujours été du genre à jouer au héros. Aussi, il n’hésita pas lontemps lorsque son dresseur lui suggéra d’aller hypnotiser le Pokémon au sommeil agité.

« Vas-y, Vortex ! »

Sauf que la chose ne se présenta pas comme prévu. Vortex voulait faire du zèle et se mit à courir et sautiller vers Ronflex afin de bondir sur le dos de ce dernier, puis glisser devant son visage. Le Spinda se mit à tourner sur lui-même en enchainant des pirouettes improbables, sous le regard horrifié du chercheur qui commençait à comprendre ce qu’il faisait.

« Aaaah ! Mais non, p-p-pas comme ça ! Pas D-Danse Folle, on avait dit Hyp-pnose !! »

Si la Danse Folle déboussolait complètement le Ronflex en le rendant confus, ce n’était pas le plan le plus safe. En effet, le Ronflex avait l’air encore plus agité, maintenant, même s’il avait céssé d’utiliser son Métronome… pourvu que d’autres Pokémon n’aient pas prêté attention à la Danse Folle de Vortex, sinon, ils avaient des chance de cèder eux aussi à la confusion et ils se retrouver dans de sales draps.

Aaaaaah, c’est pas vrai, ça! Pourquoi à chaque fois que je tente un truc tout part en couille ?!

L’histoire de sa vie.  

Rohlala, j’avais zappé que Vortex était du genre à faire du zèle !

Comme si ce n’était pas encore assez le bazar, la Danse Folle du Spinda fut s’agiter encore plus la Ronflex qui se mit à gesticuler dans tous les sens et à taper par terre. Le Spinda fut propulsé en l’air par les coups assénés par terre et le scientifique resta bien le ventre par terre, avec l’envie de se cacher dans un trou de souris. Vortex était toujours aussi peu impresionné et continuait de sautiller. Toute cette situation était digne d’un tableau de la renaissance un peu moche : la Ronflex agitée au centre, Adam dans les arbres (Mell n’avait pas vu comment ils étaient arrivés là-haut et franchement, c’est le cadet de ses soucis, actuellement), son Spinda en train de se déhancher au milieu du chemin et le medecin chercheur applati par terre et trop occupé à ruminer dans sa honte… D’ailleurs, où était Tristan, dans le tableau ?

Un peu inquiet, Mell releva la tête. Ils avaient été séparés lorsque la Ronflex s’était retournée et il lui semble que le ranger était allé voir ses collègues…

Ah ! Le voila !

Tristan courrait en direction de l’arbre ou Adam s’était coincé… apparement, le soucis était simplement que Ludivine n’aimait pas les baines trop épicées. Dans un autre contexte ce serait une histoire très mignonne mais pour le moment, Mell voulait surtout que ça se finisse.

« Euhhh !! Ok ?! »

Lança-t-il à Tristan qui, il lui semble, lui parlait de la baie qu’il fallait donner au Pokémon normal pour qu’elle se calme. Le Weber commença à gravir son arbre avec une certaine facilité malgré les mouvements incessants et les secousses de l’énorme panda-ours-dormeuse agacée. Finalement, les chocs provoqués par l’agitateuse firent tomber les baies mangou avant que Tristan ne s’en charge. Quelques unes roulèrent non loin de l’abri de Mell. Personne ne réagit autour de lui, car ils étaient trop occupés à essayer de calmer les autres Pokémon de la réserve et surveiller Ludivine pour qu’elle n’endommage pas d’avantage le refuge.

Euh… attends mais pourquoi ce serait à moi d’y aller ! J’ai peur, moi, j’veux pas !

Hurla intérieurement le binoclard qui était aussi bien, dans sa petite cachette… même si rester là a attendre que l’orage passe en chouinant ne va pas servir à grand-chose.

Pourquoi Tristan ne descend pas... Ah, il s’est coincé aussi. Super.

Le Straum fixa les deux rangers perchés dans leur arbre, quelque peu embêté. Puis, son regard se riva vers Vortex qui était toujours en train de faire l’andouille. Au moins, ce dernier était motivé et plus proche de Ludivine que lui, plus rapide aussi.

« Raaaah… b-bon, quand f-faut y aller... »

Le chercheur se saisit de la baie et se redressa sur ses pieds avant d’attirer l’attention de son Spinda.

« Eh, V-Vortex ! Attrapes ! »

L’ourson aux yeux en spirale se retourna et agita les bras, prêt à recevoir la passe. Finalement, ce n’était peut-être pas si inutile de reprendre le tennis récemment pour savoir viser. Ça rappela aussi au chercheur ses parties de base ball (enfin, une version simplifiée) sur le terrain vague avec les voisin.e.s d’Amanil. D’ailleurs son corps s’en souvenait aussi comme il lança instinctivement comme un lanceur de base ball un peu kéké. Le Spinda attrapa la baie au vol et attendit que la Ronflex ouvre la bouche pour… dunker la baie à l’intérieur. Sans commentaires, mais au moins, c’est fait.

En sentant le goût de sa baie favorite dans sa bouche, Ludivine sembla se calmer l’espace d’un instant. Un « gloup » se fit entendre et alors, la Ronflex se mit à sourire et à réclamer d’autres baies. Elle s’assagit tandis que les éleveurs du refuge parvenaient à s’approcher de nouveau. Les autres Pokémon de refuges commencèrent également à se calmer, d’ailleurs, Saucisse et Lazuli revinrent sans tarder à leur dresseur qui avait commencé à se diriger vers l’arbre ou étaient perchés Tristan et Adam. Leurs collègues avaient installé une échelle pour les aider à descendre et Mell attendit en bas, les mains sur les hanches.

« Pfff ! P-plus jamais ça ! »

Maugréa-t-il en faisant craquer son dos qui s’était un peu trop tendu durant la crise de Ludivine. Avec un sourire en coin, le Straum se tourna vers Adam qui s’était fait démêler des lianes de l’arbre à baies.

« F-franch’ment, t-t’as vraiment c-cru que j’s’rais utile, c’pas moi l’expert ici, h-hein ? »

Il donna un coup de coude à Tristan et lui lança une œillade complice. C’est lui qui avait compris comment résoudre les soucis de Ludivine, au final.

Les choses vont finalement pouvoir se calmer et Mell allait souffler, peut-être aller boire un verre pour se poser un peu après ces quelques heures riches en émotions. S’il a une résistance au bruit plutôt accrue, le chercheur avait hâte de quitter le refuge et son brouhaha ambiant. Surtout qu’une fois qu’il fut descendu, Adam se mit à hausse le ton de manière bizarrement enthousiaste et très embarrassante. Le Gibson allait attirer l’attention de tout le monde sur Mell et le principal intéressé trouvait ça extrêmement gênant, d’autant plus que c’était son Spinda qui avait fait tout le travail et que sans l’expertise de Tristan, alors ils seraient encore dans la galère.

« Wow, euh…. Du calme j-j-je… c’est j-juste-- »

L’autre lunetteux lui coupa la parole pour le complimenter sur son lancer.

Roh, mais ça suffit, là, c’est de la flatterie ! Qu’est-ce qu’y lui prend ? Qu’il aille faire de compliments à Tristan, plutôt !

« Rooooh merc-ci m-mais ça s-suffit… j-j’ai juste f-fait du base b-ball avec des p-potes t-toute mon adolescence... »

Il ne sait pas trop pourquoi il racontait sa vie comme ça et se détourna pour que les deux ranger ne fixent pas ses joues empourprées. Après quelques secondes qui parurent une éternité à Mell, Adam se calma enfin sur ses félicitations et calma son agitation. Le scientifique cru pouvoir souffler, mais l’ami de Tristan en remit une couche avec des violons. Pour le coup, le Straum ne comprit pas vraiment ce qu’insinuait le ranger à la peau matte.

Hein ? Y comprend quoi ?

Le médecin-chercheur ayant pu remarquer comme le Gibson était capable de se faire des films à son sujet et celui de Tristan, finalement, il n’avait pas très envie de savoir plus. En laissant couler, Mell s’éclaircit la gorge et appela l’ex-eleveur à la rescousse de son regard nerveux. Ce n’est pas qu’Adam soit méchant, au contraire mais avec ses propos hyperboliques, le Straum ne savait plus où se mettre (et pourtant, il a tendance à être sensible à la flatterie, quoique c’est surtout si ça concerne ses recherches). Le Weber reprit la parole afin de lui proposer d’aller se prendre une bière pour terminer cette journée sur une note positive. Si en plus on l’invite, ce n’est pas Mell qui dira « non ».

« Ah, euh, b-bah, j’veux bien, mais... »

Il se tourna vers Adam, que son ami n’avait pas mentionné dans l’histoire. Ce dernier avait céssé de sourire et le Straum n’avait pas envie de laisser le Weber le planter là une fois de plus. Enfin, la dernière fois, c’est Adam qui les avait plantés, techniquement. Bref. Fort heureusement, le grand brun aux eux verts n’oublia pas son collègue cette fois-ci et lui proposa de les accompagner.

« B-bah ouais ! Viens ! »

Encouragea le Straum à son tour, parce qu’il n’avait pas envie de laisser le Gibson là et ne le trouvait pas bien méchant d’une part et par ailleurs, il était déterminé à dissiper certains… malentendus (mais avec Tristan qui est bouché et Adam qui est dans son délire, ça risque d’être complexe). Le chercheur roula fortement des yeux lorsque l’autre ranger avoua qu’il craignait de les « déranger ».

« Pfff ! Dérang-ger de qu-quoi, on va pas s'regarder dans l'blanc des yeux ! Allez ramènes t-tes fesses sinon j’b-bois ta pinte ! »

Bien entendu, c’était une vanne et Mell laissait le choix à Adam de les suivre ou non. En plis il ne sait même pas si l’autre aime l’alcool. Mais bref. Au moins, le reste de la soirée s’annonçait relaxante.