City Hunter

Dans la street

« Rooh, allez, reste encore un peu !
- Désolé, les gars, j'dois rentrer. Mais abusez pas trop sans moi, hein !
- Mais nooon, t'inquiète. »

D'un signe de la main, je dis au revoir aux quelques compagnons de la soirée que je viens de me faire et sors du bar après avoir terminé d'une traite ma bière. Je m'étire en m'extirpant du lieu où il n'y a plus grand monde désormais et respire un grand coup avant d'entamer une petite marche. Distraitement, mes yeux regardent le sol. Je me fais des petits jeux en solitaire à quelques endroits. Allez, si j'arrive à me déplacer à cloche-pied jusqu'au lampidaire qui grésille, je prépare des cupcakes demain ! Mais bon, avec ce que j'ai ingéré d'alcool ce soir, je n'arrive pas à aller bien loin sur une seule patte. Pas que j'en ai consommé sans modération, mais assez pour que je ne puisse pas compter sur mon équilibre ce soir. En rentrant à l'hôtel, je vais au lit direct, si je n'ai pas la flemme de prendre une douche rapide. Je suis quand même de bonne humeur, ces temps-ci. Je me suis autorisé une petite sortie dans la capitale pour fêter l'arrivée de deux nouvelles alliées. Vanawi, ce n'est pas la porte à côté, par rapport à Baguin, on est d'accord. Mais je ne connais que trop bien les lieux branchés dans la ville où je réside, justement. Je voulais changer un peu d'air, et pour ça, rien de mieux que d'aller traîner là où tout va plus vite que la musique. De nouveaux coins chaque jour apparaissent, dans la ville portuaire, et ce, pour le plus grand plaisir de ma curiosité. Mais bon, il est temps de rentrer, maintenant.

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Dans la street

Je me mettrais presque à danser sur le chemin du retour, tel Gene Kelly quand il chante sous la pluie. Mais si les nuages noirs sont à l'horizon, je crois que j'ai encore un peu de temps avant qu'il ne se mette à pleuvoir ; et même, ça ne me dérangerait pas tant que ça, en vérité. Surtout qu'il n'y a presque personne, dehors. Seules quelques motos et autres voitures passent pour éclairer de leurs pharese lumineux le trajet qu'ils empruntent, passant parfois près de moi à une vitesse qui, sans doute, n'est clairement pas autorisée. Ce serait certes mon travail d'en stopper quelques uns pour les prévenir, mais il ne s'agit pas de la ville à laquelle je suis affiliée, et de toute façon je ne suis pas en état d'assurer mon travail de milicien. Quand bien même, là, je n'en ai pas non plus vraiment l'envie ; tant qu'ils ne tuent personne... Enfin, comme j'ai dit, de toute façon, il n'y a pas foule, à Vanawi, à cette heure-là.
Excepté... Un rongeur ?.. J'entends derrière moi un babillage de rugissements mécontents. En me retournant, je n'aperçois rien si ce n'est, à mes pieds, un petit hamster d'une dizaine de centimètres, au maximum. Un Dedenne, de ce que je reconnais. Ces bestioles-là sont plutôt communes, à Kalos. Une espèce qui ne m'est donc pas étrangère, et à laquelle j'adresse un léger sourire plutôt amusé. Il n'a pas l'air très amical, aux premiers abords. J'aimerais bien savoir pourquoi il semble aussi agressif avec moi, tiens.

« Bonsoir. »

Dommage, que les humains ne puissent pas encore comprendre le langage des Pokémon... Mais je vais faire de mon mieux pour voir ce que je peux faire. Je m'accroupis afin de me rapprocher de sa hauteur. Lentement, même s'il s'agit d'une mauvaise idée, je tends mon doigt, dans l'espoir qu'il le renifle afin de s'assurer que je ne lui ferais aucun mal. Mais cela produit plutôt l'effet inverse. La petite souris orange se tend et montre les dents avant de planter ces dernières dans la chair de mon index. Heureusement, ça ne fait pas trop mal, mais je le laisse mordiller à sa guise, puisqu'il est si méfiant.

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« Hé... Je ne vais pas te faire du mal, hein. »

De bien vaines paroles, j'en suis conscient, mais ça ne m'empêche pas d'essayer. Je suis bien plus dans la parole que dans l'action pour tenter de calmer les autres. Enfin... Il y a bien des fois où ma maladresse m'empêche de trouver les mots qu'il faut, mais avec les Pokémon, ça ne sert à rien de recourir à la force : ils vont juste se sentir encore plus menacés. Alors c'est d'une voix calme mais un peu en grimaçant que je tente d'apaiser la petite bêbête. Je secoue un peu mon doigt pour qu'il la lâche, sans succès. En plissant les yeux, je constate d'ailleurs que son pelage est un peu terne. Ce n'est pas un Pokémon domestique, j'en mettrais ma main au feu. Enfin, plutôt au rongeur, en l'occurrence, mais ça... Il se rend peu à peu compte que c'est inutile d'essayer de mordre plus, alors me donne des petits coups de jus. Ce n'est pas bien agréable, mais le peu de force qu'il y met me permet de ne pas ressentir une trop grosse douleur non plus. C'est dans la mesure du supportable, d'autant plus qu'il semble... Fatigué. Il relâche sa prise sur ma peau, essouflé après un si 'grand' effort. Il est un peu moins trapu qu'un Dedenne habituel, aussi. Pas de doute supplémentaire : soit il a toujours vécu à la rue, soit il a été abandonné d'une manière ou d'une autre.

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« Attends, j'ai peut-être quelque chose, pour toi. »

Je plonge ma main dans ma poche pour y dénicher un quelconque reste de nourriture que j'aurais pu y glisser. On ne sait jamais, après tout, ce que je peux garder dans mes pantalons, il m'arrive de garder un peu de casse-croûte au cas où j'aurais faim. D'habitude, j'évite d'acheter des gâteaux industriels, mais il m'arrive, quand j'ai une grosse envie de sucre, de prendre un peu de temps pour voir ce qui se trouve dans les rayons enolians. Sourire triomphant alors quand j'arrive à atteindre, tout au fond, un paquet de Oreo à moitié entamé. Je le tends quand même au rongeur en espérant qu'il ne fasse pas le difficile, s'il a si faim, mais j'ai peu d'espoir quand il commence à reculer me voyant lui offrir le cookie. Il doit se méfier, évidemment. Pour au moins lui montrer que ça ne va pas l'empoisonner, je coupe un Oreo en deux et en mange un morceau. Wow... C'est toujours aussi chimique, ces trucs. Et ça donne encore plus faim, je crois. Mais bon, moi ça me fait l'affaire quand j'ai envie de me goinfrer de sucreries immondes. Par contre maintenant... Bah j'ai soif. C'est malin. Je dois me contenter d'avaler ma salive jusqu'à ce que je rentre à l'hôtel, toutefois, mais je surveille le hamster pour voir s'il s'est avancé. Je le vois renifler la nourriture, toujours sur ses gardes, et en prend un tout petit bout dans ses dents pour goûter. Au bout de longues secondes où il mâche son minuscule morceau, il se met tout à coup à me fixer d'un œil mauvais, sans rien dire de plus. Puis, enfin, d'une rapidité assez extraordinaire, le Dedenne sauvage se jette sur le biscuit, affamé, et le termine d'une traite. Il se met à rugir ensuite. Je crois qu'il en veut plus. Alors je sors ce qu'il me reste -c'est-à-dire pas grand chose- et lui donne tout ce que j'ai pour le nourrir. Mais la vitesse à laquelle il se lance sur le peu que je peux lui tendre arrive à m'écarquiller les yeux. C'est impressionnant et triste à la fois de le voir se jeter corps et âme sur un rien que je possède.

« Eh bin... T'avais vraiment faim, toi. »

Mais ce n'est pas lui qui répond à mon commentaire, cette fois. Nous nous retrouvons tous les deux surpris par un jappement derrière moi. En me retournant, je découvre un jeune Ponchiot. Attendri par le toutou, je ne me peux m'empêcher de tendre la main pour lui gratter le ventre quand le nouveau venu s'allonge sur le dos. Mais dès que ce dernier lève la tête pour apercevoir le Dedenne, celui-ci bondit de peur et se cache derrière mes jambes en tremblant un peu.

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« Héhé, calme-toi, il ne va pas te manger. Il veut juste jouer. Enfin... Je crois. »

Je n'aurais pas pensé que le petit Dedenne qui semblait si hargneux avec moi ait peur d'un... Bah d'un chiot qui paraît tout à fait adorable. Ce dernier d'ailleurs est curieux de la présence du rongeur et tourne autour de moi dans l'espoir de pouvoir le renifler, mais le hamster s'empresse de grimper sur moi jusqu'à mon épaule pour éviter tous contacts avec le toutou, qui aboie déjà pour essayer de le faire descendre. Trop effrayé pour me repousser, j'en profite pour tapoter légèrement sur la petite tête du Dedenne afin de le rassurer, mais je crois que c'est peine perdue pour cette fois.

« D'accord, d'accord, on va s'éloigner... Au revoir, toi. »

Je fais un signe de la main pour saluer le Ponchiot avant de le laisser gambader dans la rue jusqu'à disparaître tout à fait dans l'obscurité.

« Tu veux que je te laisse aussi ?.. »

Je m'adresse cette fois-ci au Dedenne. Il considère la question quelques secondes, avant de sauter de mon épaule. J'attends qu'il parte, puis continue mon propre chemin jusqu'à mon hôtel. L'air est un peu plus frais, en soirée, c'est assez agréable. Je profite de la fraîcheur de la nuit pour me balader au cœur de la capitale avant de enfin atteindre mon hôtel, en évitant au passage un Tadmorv d'Alola qui se faisait remarqué par d'autres habitants de la nuit. En marchant un peu maladroitement à cause de la fatigue, je prends l'ascenseur puis monte enfin dans ma chambre, avant de pouvoir m'écrouler sur le lit sans même prendre la peine de me déshabiller. Mais dès que mon ventre touche le matelas, je sens un petit poids me comprimer littéralement la poitrine et je me reçois quelque chose qui s'apparente à une petite décharge électrique. Je sursaute et recule d'un bond avant de tomber sur la moquette au motif de rosaces, et m'ébroue un peu pour reprendre contenance et voir ce qui me gênait tant sur le lit. Je plisse les yeux pour apercevoir dans la semi-pénombre un petit truc rond... Qui rugit. En allumant la lumière, je reste muet un court moment lorsque je vois le Dedenne que j'ai croisé tout à l'heure. Assis sur le lit, je tente de m'approcher doucement pour ne pas lui faire peur.

« Eh bin ? Qu'est-ce que tu fais là ? »

Mais la gerbille orangée ne me répond pas. Elle se contente de s'installer sur le deuxième oreille du lit double et se roule en boule, semblerait-il pour dormir ; ou du moins, elle prend la position qui y suggère. De mon côté, je pousse un léger soupir, décidé à répondre à la question mais un peu plus tard cependant. Cela attendra au moins demain matin. Le Dedenne a probablement dû me suivre sans que je ne le voie. Je me contente de me déchausser et de me mettre en sous-vêtement avant de me glisser sous les draps, ronronnant si je le pouvais au contact moelleux du matelas. Il ne faudra quelques secondes une fois installé confortablement pour que je sente une autre chaleur me coller. En rouvrant les yeux brièvement, je ne peux qu'esquisser un sourire amusé et peut-être aussi attendri en remarquant le Pokémon électrique qui s'est lové contre moi. Bon, j'imagine qu'il ne va pas me quitter tout de suite, lui.