Je sors du lit, ensommeillé mais décidé à profiter au maximum de mes quelques jours sur l'île. Cachou, qui n'est manifestement pas de cet avis me le fait bien savoir et essaye de se cacher sous les couvertures tandis que Gala, toujours bienveillante, m'accompagne jusqu'à la salle de bain et s'assoit devant la porte pendant que j'enfile une tenue de sport. Si le Rocabot n'était pas très décidé à à se lever il y a quelques minutes, il a cependant suffit que je sorte son harnais du sac pour qu'il change aussitôt d'avis et qu'il me rejoigne en bondissant du lit. Je le luis passe et enfile ma ceinture de course à laquelle j'attache le chiot qui sautille sur place, impatient d'aller courir. Je referme la chambre d'hôtel derrière moi, fait rentrer la Macronium dans sa pokéball et nous partons en direction de la plage en petites foulées, pour s'échauffer. Il est à peine sept heures quand nous arrivons au bord de mer et il n'y a que quelques promeneur matinaux sur le sable. Nous remontons une grande partie de la côte sous les regards des Goélises et quand enfin nous sommes à bout -enfin surtout moi parce que Cachou pourrait continuer des heures-, je m'arrête à un bar pour prendre un petit déjeuner. J'invite Gala et Psykokwak à se joindre à nous et je sors du sac à dos les rations de chacun avant de passer un coup de fil à M. Jones, l'agriculteur qui me loue le champs en face de chez moi et qui s'occupe de Garnet pendant mon absence.

« Bonjour M. Jones, c'est Noah. Oui, lui-même. Je voulais savoir comment ça se passait avec Garnet ? Hm... Oui, je vois. Non, vous ne risquez rien, elle est juste un peu têtue mais pas méchante. Pas de problème, tenez moi au courant s'il y a le moindre soucis. Merci beaucoup, passez une bonne journée. Oui, je rentre dans deux jours. D'accord, c'est noté. N'hésitez pas si vous avez besoin de quoique ce soit. Merci, à vous aussi. »

Je raccroche, rassuré alors qu'un serveur dépose un café et un panier de croissants sur la table. Je le remercie, lui demande une gamelle d'eau pour les pokémons et profite de la douceur du soleil matinal. Je repense à ma journée de la veille, à la visite du lac souterrain protégé, une vraie perle et surtout à Emily que je n'avais pas vu depuis tellement de temps. J'ai encore du mal à y croire et je me suis rendu compte, en la retrouvant, combien elle m'avait manqué et j'ai déjà envie de la revoir. Elle a promis que la prochaine fois, c'est elle qui viendrait me rendre visite et ça me rend heureux. Je m'imagine déjà en train de lui faire redécouvrir les plages de son enfance et ça me met d'excellente humeur. Je passe alors le reste du petit déjeuner à y penser avant de rentrer à l'hôtel pour prendre une bonne douche.

Quand j'arrive au centre pokémon de Nuva Eja pour saluer quelques collègues et avoir des avis sur les derniers cas compliqués que l'on a rencontré chez nous, il est déjà presque 11 heures. Alors que je m'apprête à entrer, le Rocabot s'arrête brusquement et repart en sens inverse en courant. Je tente de le rappeler mais il m'ignore et je me retrouve, une fois de plus, à lui courir après. Nous faisons le tour du bâtiment et je manque de trébucher dans ses pattes quand il s'arrête brusquement pour regarder fixement devant lui. Je lève les yeux en le rouspétant pour voir ce qui a attiré son attention et je croise le regard d'une adolescente qui encourage l'un de ses pokémons à lancer une combinaison d'attaques. Curieux, je la regarde quelques minutes et découvre qu'en réalité, elle s'entraîne à la coordination. Je ne peux m'empêcher d'applaudir quand son ami réussi enfin ses attaques et que le spectacle qui en résulte est épatant.

« Bravo, c'était génial ! »

Je ne peux m’empêcher d’applaudir et de sourire quand la jeune fille termine sa combinaison en félicitant son soporifik qu’elle a su, malgré sa paresse, encourager à réaliser un joli spectacle, je suis admiratif. C’est dingue la création des jeunes, ce pouvoir qu’ils ont d’imaginer des combinaisons qui peuvent sembler simple mais qui font plus que leur effet, si je n’avais pas été assez proche pour le voir dormir dans le coin, j’aurais juré que le soporifik avait bien disparu. C’était épatant, cette adolescente aurait bien des choses à m’apprendre… D’ailleurs elle me remarque et se tourne vers moi, me regardant avec un mélange de méfiance et de curiosité. Sans aucune forme de retenue ou de gêne, elle me questionne sur ma cicatrice. J’esquisse un sourire en me penchant à son niveau pour croiser son regard.

« Je me suis juste blessé un peu, il y a longtemps. »

La sincérité et l’absence de filtre des adolescents me met toujours un peu mal à l’aise mais cette jeune fille est différente, avec son œil cacheté et ses cheveux mauves, accordés avec les pokémons qui paraissent autour d’elle. Elle est juste adorable et me demande suspicieusement qui je suis, normal. Je me dépêche de lui répondre pour ne pas qu’elle prenne peur, je ne veux pas la voir fuir et abandonner son entraînement.

« Je m’appelle Noah, je travaille au centre pokémon de Vanawi, je suis venue rendre visite à des collègues à Nuva Eja. »

Je lui souris sincèrement en détaillant chacun de ses pokémons qui semblent heureux et en pleine santé, y compris le soporifik qui fidèle à lui-même, dort dans un coin.

« Je suis coordinateur moi aussi, enfin juste un débutant, tu es bien plus douée que moi. Je suis désolé si je t’ai dérangé mais ta prestation valait des applaudissements, sans aucun doute. Dis, ça te dérange si je te regarde un peu en échange de quelques croissants, pour toi et tes amis ? »

Je tire de mon sac un sachet rempli de viennoiseries que je lui tends, un sourire sincère sur les lèvres. Ce qu’elle fait avec ses pokémons est très instructif, personnellement je suis toujours dans l’affrontement et je ne pense jamais à ce côté magie, un peu rêveur qui suscite la vraie surprise chez le spectateur, elle pourrait vraiment m’apprendre des choses. Alors qu’elle accepte mon deal et se saisit du sachet, je fais venir Alaska, Cachou et Gala qui me font une grande fête de bonjour avant de remarquer l’adolescente et ses compagnons. Le premier à s’élancer vers eux, évidemment, c’est le rocabot. Il se précipite sur la jolie moufouette et se penche en avant en remuant la queue, il l’invite à jouer avec lui. Le goupix et la macronium, quant à eux, se tiennent sagement près de moi et observent curieusement la scène sans oser s’approcher. Et finalement, sans que je ne lui ai demandé de nous rejoindre Tac sort de sa pokéball et avance en cancanant avant de finir par heurter les jambes de la jeune fille et retomber sur son petit postérieur.

« Je suis désolé, il n’est pas méchant, juste un peu maladroit. »  

Je vois bien que ma réponse à propos de ma cicatrice ne lui convient pas. Ah la curiosité des enfants... Elle devra pourtant s'en satisfaire car je ne suis prêt à replonger dans ce passé douloureux. Je hausse les épaules en esquissant un sourire. Est-ce que je souris trop ? Je dois peut-être avoir l'air louche, oui, comme avec cet adolescent à Vanawi mais les circonstances n'étaient pas exactement les mêmes, nous étions en pleine nuit, il n'y avait personne. Ici, le soleil est haut dans le ciel, le centre pokémon à quelques pas et on aperçoit des promeneurs sur la voie verte près de la côté un peu plus loin. J'espère que je ne l'intimide pas ou ne lui fais pas peur. Enfin, il est quand même recommandé de se méfier des inconnus et en observant plus attentivement l'adolescente, c'est vrai qu'elle ne semble ni très méfiante, ni très impressionnée, peut-être un peu inconsciente ? Ou juste naïve ? Elle n'en a pourtant pas l'air, peut-être que je ne fais pas si peur que ça finalement, que je n'inspire pas le doute avec mon sac de croissants, mes pokémons et mon air de touriste. Ouais, ça doit être ça.

Quand je lui avoue être moi-même coordinateur, je remarque aussitôt la lueur d'intérêt s'allumer dans ses yeux et son regard se poser sur moi, comme si elle me jaugeait. Elle dénoue les bras et vient plonger sa main dans le sachet de croissants, comme si être coordinateur nous rapprochait un peu alors que nous sommes des inconnus, comme si ce petit monde et cette passion lui accordait le droit de me faire confiance. Et quand elle me propose de participer, de lui montrer un peu ce que je sais faire, je souris, un vrai sourire cette fois, pas un semblant ou une esquisse, un sourire qui fait remonter mes pommettes jusqu'à mes yeux.

« C'est d'accord mais tu ne seras pas trop impressionnée, mes pokémons sont eux aussi des débutants, que dis-tu d'un petit match à deux contre deux ? Ça nous permettra de varier les attaques, qu'en penses-tu ? »

Je la regarde partager un nouveau croissant qu'elle vient de tirer du sac en plusieurs morceaux pour ses compagnons et j'en profite pour faire venir mes propres alliés. La moufouette ne semble absolument pas rassurée par mon rocabot qui se précipite à sa rencontre pour jouer. Elle gonfle et hérisse son pelage pour se montrer plus impressionnante dans l'espoir de faire reculer le chiot mais ce dernier se contente d'aboyer sur l'animal et je dois le rappeler à l'ordre pour qu'il revienne vers moi et se jette sur Alaska pour partager une partie de jeu commune. Je les regarde un instant rouler sur le sol, s'amusant à s'écraser l'un après l'autre en grognant très fort, parce que tout est plus drôle quand on grogne très fort, et se sauter dessus encore et encore. Et puis mon canard nous rejoint, sortant de sa pokéball de son plein gré avant de venir s'écraser sur les pieds de la dresseuse.

« C'est ça oui, il est encore très jeune mais c'est un excellent coordinateur. Il te plaît ? »

L'adolescente hoche vivement la tête et me demande de l'utiliser dans notre affrontement. Je regarde le psykokwak qui tourne en rond, se demandant où il atterri jusqu'à m'apercevoir et venir vers moi en trottinant. Je tends mes bras vers lui pour le soulever et le serre contre moi.

« Qu'est-ce que tu en dis, tu veux te battre ? »

Tac me répond en cancanant bruyamment et en agitant ses ailes et je prends cette réponse pour un oui. Je souris en le grattouillant un peu derrière la tête avant de le reposer au sol, en face de la jeune coordinatrice.

« Il est d'accord. Alaska, tu es partant aussi ? »

En entendant son nom, le goupix se dégage de sous le poids du rocabot qui l'écrase au sol, s'ébroue et vient se placer à côté du canard jaune. Lui aussi est d'accord. Seul Cachou nous regarde, un peu grognon de ne pas avoir été choisi pour ce duel.

« Voilà donc tes adversaires. Dès que tu auras fait ton choix on pourra commencer. Je suis désolé, je n'ai pas beaucoup de temps mais je vais faire de mon mieux pour arriver au bout de ce combat. »

La jeune fille semble à la fois étonnée et enchantée par mon idée. Je souris, ravi qu’elle lui plaise, depuis le temps que je cherche un petit affrontement en double, ça promet d’être amusant. Je jette machinalement un coup d’œil à ma montre et calcul rapidement de tête que j’ai environ vingt minutes si je veux avoir le temps de passer dire bonjour aux collègues et de ne pas rater mon bateau. Ça devrait le faire, surtout que l’adolescente a l’air motivée. Elle choisit son soporifik et son capumain pour faire face à mes deux alliés. Je souris face au couple atypique et qui promet pourtant un redoutable affrontement. Pour ma part, mes deux compagnons se regardent, se demandant bien ce qu’ils vont pouvoir faire et je réfléchis aussi à toute vitesse à quelques combinaisons exploitables et intéressantes. J’avoue que cette partie, le combat, ce n’est pas ma spécialité, j’ai une préférence pour la création d’une démonstration, pour réfléchir à un scénario et répéter une présentation, je manque encore trop d’expérience pour pouvoir penser à des combinaisons du tac au tac et en même temps essayer de battre mes adversaires. C’est vraiment pas facile mais tellement divertissant ! Ce combat sera donc pour moi un véritable bon entraînement à côté duquel je ne peux pas passer. Et sans témoins en plus, aucune crainte de décevoir des spectateurs, excepté mon adversaire.

« Bonne chance à toi et ton équipe, j’espère que ce sera un beau match. »

Je souris en la voyant prendre la main et commencer à attaquer. Mes alliés se tiennent près au combat, les sens en alertes, près à esquiver et riposter. Le Soporifik ouvre le bal, une lueur violacée se créé autour de lui, attirant à tous notre attention, nous engageant à nous méfier de ce qui va suivre. Mais la menace est toute autre, alors que la clarté envoutante donne l’impression que le couple est rongé par des flammes aux teintes nuancées, le Capumain en profite pour bondir et brandir sa queue à la dernière minute, dans laquelle une griffe ombre se dirige droit vers mes compagnons, semblable à la gueule béante d’un démon prête  à les avaler. Mon psykokwak, effrayé, se dépêche de reculer et Alaska, remarquant la crainte de son allié s’interpose entre le capumain et le canard.

« Alaska, fais attention à la griffe, lance une attaque poudreuse bien épaisse. Psykokwak, aide-le avec choc mental. »

Et en ce début de printemps, une neige épaisse, très épaisse se met à tomber sur notre arène improvisée, recouvrant le sol d’une poudreuse épaisse. Les flocons qui reflètent la lumière du soleil brillent d’éclats arc-en-ciel avant de s’écraser au sol. En entendant mon ordre le canard se fige, cesse de fuir et lance son attaque, transformant la neige épaisse et calme en une véritable tempête qui s’abat autour des pokémons. Le goupix bondit en avant, utilisant le terrain à son avantage, très à l’aise dans son élément. Il plonge dans la poudreuse pour éviter l’attaque de justesse qui s’abat sur le béton derrière lui et soulève des gerbes de neige. Cependant, le souffle de l’attaque le propulse en avant et il glisse violemment dans la poudreuse avant de se redresser, prêt à riposter. Je soupir de soulagement en le voyant se remettre debout sur ses pattes, au centre de l’arène, le soporifik face à lui et le capumain dans son dos.

« Maintenant Tac, couvre Alaska ! »

La combinaison qui n’était jusqu’ici destinée qu’à esquiver prend une toute autre forme. Je vois mon canard se concentre de toutes ses forces et la neige se rassemble petit à petit et se compacter en boules énormes qu’il lance en direction du capumain de la jeune fille aussi vite que possible.

Notre petit affrontement de rue se poursuit et ma contre-attaque atteint le capumain qui est projeté en arrière. Pourtant loin de se laisser démonter, il se relève et rassure son binôme, sous quelques jeux de mots de leur dresseuse qui m’arrache un rire. Malgré son jeune âge, elle est épatante et je risque bien de me faire botter les fesses si je me déconcentre. Néanmoins, plus qu’un véritable combat ou qu’un entraînement, cette rencontre est avant tout un jeu et un plaisir partagé. Y penser ainsi me fait sourire et retomber la pression, je ne pense plus seulement à faire de mon mieux ou à être bon, non, je pense d’abord à m’amuser et c’est exactement ce dont j’avais besoin.

Après quelques échanges humoristiques, nos deux adversaires se repositionnent et j’encourage les miens à faire de même pour se préparer à l’attaque qui va suivre. Curieusement, c’est le soporifique de la jeune Améthyst qui s’avance et qui, d’une attaque choc mental, soulève la neige tombée au sol jusqu’à créer une tempête dense et dangereuse dont je mets instinctivement en garde mes alliés. Le capumain se joint à la combinaison avec une attaque jet de sable et la tempête continue d’enfler, encore et encore jusqu’à se déchaîner sur le terrain. Mon pauvre psykokwak peine à s’agripper au sol et il doit s’aplatir pour ne pas être emporté par le vent. Notre vue est complètement masquée et les ennemis disparaissent dans le tourbillon. Je grogne en regardant autour de moi à la recherche d’une solution tandis que mes deux compagnons commencent à s’inquiéter de ne plus voir leurs ennemis.

Brusquement, le capumain et le soporifik apparaissent à travers la tempête comme par magie et très organisés, ils visent chacun l’un de mes pokémons, m’obligeant à chercher une parade pour chacun d’eux tandis que la tempête arrive toujours sur nous, menaçant de mettre fin au match. Je serre les poings, à la fois impressionné par la puissance de cette attaque mais aussi très embêté, je sens l’angoisse me gagner alors que mes deux alliés sont vulnérables sur le terrain. Si Alaska est assez rapide pour éviter le capumain, psykokwak est toujours presque immobilisé par le vent qui continue de souffler et je crains que le coud’boule qui l’attend ne le mette complètement K.O. Faisons les choses dans l’ordre, d’abord controns cette attaque. Et la clé va être le travail d’équipe.

« Tac, lance une attaque pistolet à eau vers nos adversaires, Alaska, enchaîne avec vent glace ! »

Aussitôt dit, le canard, malgré ses difficultés, se redresse suffisamment pour lancer une attaque eau qui jaillit devant lui et joignant son vent glace à l’attaque de son binôme, c’est un mur de glace qui apparaît et se dresse entre les deux équipes. Néanmoins, la force cumulée des deux pokémons de la jeune fille suffit à faire éclater le mur et mes propres alliés sont propulsés en arrière. Si le goupix parvient à se rattraper sur ses pattes et n’être égratigné que par quelques éclats de glace, le psykokwak, lui, roule jusqu’à mes pieds auxquels il se heurte violemment et je m’agenouille aussitôt pour l’aider à se remettre sur ses pattes et pour vérifier qu’il n’a rien de grave. En concours officiel, ce ne serait pas permis mais ici, je ne me pose pas la question, la santé de mes pokémons passe avant n’importe quel entraînement. Un peu sonné de son roulé boulé jusqu’à moi, il titube quelques minutes avant de se ressaisir. Quand je le lui demande il m’assure être en état de continuer l’affrontement et si je doute pourtant un instant, je le laisse faire, certain qu’il ne prendra pas très bien un refus de ma part. Rejoignant son binôme, il est plus remonté que jamais et se prépare à contre-attaquer. Objectif ? Faire disparaître cette tempête.

« Bon très bien, il est temps d’y voir quelque chose, pas vrai ? Psykokwak attaque tourniquet ! Eclabousse moi tout ça et Alaska, vent glace à nouveau ! »

Le psykokwak se dresse sur une patte et se met à tourner, le bec vers le ciel, projetant de l’eau sous forme de pluie sur l’ensemble du terrain. La neige de la tempête, au contact des gouttes d’eau disparaît et il ne reste plus que le sable qui désormais gorgé d’eau est plus lourd et plus difficile à déplacer. La tempête ralentit progressivement et Alaska profite de cet instant pour lancer sa propre attaque, gelant le tourbillon en milliers de particules de glace qui se figent dans une structure gelée s’élevant vers le ciel. J’admire un instant la construction de glace qui a réussi à figer le mouvement de la tempête et je souris. Il est temps d’achever cette combinaison.

« Et maintenant Tac, attaque Psykoud’boule ! »

Le pokémon s’élance aussitôt sur la structure de glace et l’explose de son offensive, projetant des cristaux gelés sur l’ensemble de notre arène de rue avant de les diriger, vengeur, vers nos deux adversaires.

Le mur vole en éclats, sonnant légèrement les compagnons de l’adolescente. Chaque duo profite d’un court instant de répit pour reprendre des forces, nous-même utilisons ce laps temps de pause pour reprendre des forces, surtout mon psykokwak qui arrive à ses limites, il est très jeune après tout et je lui en ai déjà beaucoup demandé pour ce match amical. Néanmoins, il ne se laisse pas démonter et quand la jeune fille encourage ses pokémons, il se replace sur le terrain, prêt à terminer son tour. Malgré leur état de fatigue également discernable, nos adversaires entament une nouvelle combinaison haute en couleurs. Le soporifik lance une attaque gaz toxik qui prend la forme d’un long serpent dont la gueule ouverte se dirige droit sur mes alliés. Le capumain a plongé au cœur du reptile de fumée, protégé par une attaque choc mental de son compagnon, il se met à hurler, donnant un aspect presque surnaturel à l’animal qui ondule vers nous. Comment allons-nous pouvoir bloquer une attaque aussi immatérielle ?

Mon canard, en voyant le serpent, s’est instinctivement reculé de plusieurs pas tandis qu’Alaska s’est placé devant lui. Malgré sa détermination, le pauvre semble effrayé et je n’ai malheureusement pas le temps de le prendre dans mes bras pour le rassurer car l’attaque arrive très vite. Bon très bien, très bien…

« Alaska, commence par une attaque brume, camouflez-vous ! »

Aussitôt dit, aussitôt fait, une épaisse brume a commencé à se répandre sur le terrain, permettant ainsi à mes alliés de se cacher et d’échapper pour un temps court à l’attaque de nos adversaires. L’inconvénient c’est que pour nous aussi, la visibilité s'est réduite. Si j’aperçevais toujours par flash le serpent onduler dans la brume, donnant ainsi l’impression qu’il flottait dans un ciel nuageux, j’ai perdu du regard mes compagnons. J’ai essayé de me rappeler des conseils lus dans « la coordination pour les nuls » et j’ai commencé à regarder autour de moi, à la recherche d’une idée.

« Très bien,  Tac, utilise Vibraqua et toi Alaska, rassemble la brume avec vent glace ! »

Un vent frais a rafraîchi l’air, faisant se lever la brume dans un tourbillon au cœur duquel, mes deux pokémons se préparaient à encaisser l’attaque de nos ennemis qui se dirigeaient vers eux, aussi rapidement que possible. Le canard a levé son bec en l’air et une sphère bleue est apparue au cœur du tourbillon, comme portée par le vent. Le tableau était spectaculaire. D’une part, le serpent crieur, d’une vive couleur mauve et menaçante et d’autre part, le typhon de brume claire d’où perçait en son centre, l’éclat bleu de la sphère d’eau qui palpitait énergiquement dans l’attente d’être lancée. Et puis, propulsée à la fois par Tac et par le vent d’Alaska, l’orbe a percé le tourbillon et s’est précipitée à la rencontre de l’animal ondulant sur l’arène improvisée. Les deux attaques se sont rencontrées au centre du terrain et le souffle de l’explosion a projeté durement mes deux compagnons en arrière, les faisant heurter mes pieds et les secouant suffisamment pour les mettre K.O. J’ai grimacé en m’agenouillant pour les examiner, pas très fier d’être à l’origine de cette dernière attaque, heureusement ils étaient juste sonnés, ils n’avaient rien de grave.

« Bravo les garçons, c’était un beau match. »

J’ai effleuré leur duvet chacun leur tour avant de regarder mon adversaire pour m’assurer que ses alliés s’en étaient aussi bien sortis que les miens. Au moins, s’il y avait une urgence, le centre pokémon était à côté.

Cette combinaison, orchestrée à l’improvisation de la jeune Coordinatrice, est à l’image de l’artiste. Un travail bâclé, inégal et peu travaillé, un résultat à la fois grandiose et décevant. Amethyst possède une imagination et une énergie débordantes mais peu de rigueur, ce qui ne lui permet pas souvent d’aller par-delà ses idées. Heureusement pour elle, ses alliés lui sont dédiés, un peu aveuglément peut-être, et se fient à son jugement. Mais à l’intérieur de ce serpent empoisonné, même protégé par le Choc Mental de son compagnon de combat, Diddy Kong risque gros. Des sueurs lui parcourent le dos tandis qu’il laisse entendre sa voix dans la gorge du serpent. Pour sa part, Waluigi sent qu’il en est au point de non-retour. Il ne pourra plus rien fournir suite à cette attaque qui lui demande un contrôle et une maîtrise qu’il n’est pas encore certain de posséder. Il est passé d’une simple pratique à un combat plutôt avancé trop rapidement. Est-ce toujours aussi difficile, la Coordination? Amethyst ne semble même pas se rendre compte de la posture précaire de ses deux compagnons tandis que la créature qu’ils ont formée avance péniblement et sans but en direction de leurs adversaires qui se sont laissés impressionner par son petit jeu de fumée. Si seulement ils savaient que tout ceci ne tient qu’à un fil… D’ailleurs, la brume fait presque perdre sa concentration au Soporifik qui laisse échapper un gémissement qui inquiète beaucoup le Capumain. Ce dernier étend sa queue pour toucher son ami, lui offrant son soutien et en quelque sorte un peu de sa force. La forme du serpent est de plus en plus floutée. Une bille azurée vient flotter au cœur de la brume, petite planète bleue dans l’immensité éphémère d’un brouillard d’apparence infini. Le choc entre les deux combinaisons est telle qu’une explosion survient, envoyer valser tous les combattants de cette lutte acharnée pour la perfection. Waluigi ne se relève pas, mais fidèle à lui-même Diddy se redresse, tout tremblant et complètement épuisé, mais satisfait. Avec le Goupix et le Psykokwak incapable de continuer, leur petit Concours improvisé vient de prendre fin de manière totalement spectaculaire. Amy reste un long moment complètement abasourdie à simplement regarder le corps inanimé du Pokémon Psy avant d’être rappelé à l’ordre par le singe qui s’est rapproché de sa dresseuse. La jeune fille rappelle finalement le Soporifik à sa balle, sachant qu’elle n’aura qu’à faire quelques pas pour faire soigner ses compagnons : l’avantage de se trouver dans la cour du Centre Pokémon. «Hey c’était super Noah, t’es doué en fait hein. J’aime pas beaucoup les Goupix habituellement, mais le tien clairement il a la classe. T’as vu aussi comment Diddy et Waluigi se sont battus? C’était juste wow.» Dans son esprit, Amethyst se convainc d’être prête pour son premier Concours. Il est vrai que cette pratique contre un véritable Coordinateur (du moins quelqu’un d’assez responsable pour prendre son entraînement au sérieux) lui a été un très bon défi, un défi qui lui permet de progresser. Sauf qu’elle a ce regard affuté pour ne voir que les améliorations et non tout ce qui lui reste à travailler. Satisfaite, l’adolescente récupère le Capumain et le hisse sur son épaule avant de récupérer son sac avec tout aussi peu de délicatesse. Elle offre ensuite un de ses rares sourires envers les adultes, haussant les épaules avec une désinvolture caractéristique de son personnage. «Hé, c’tait sympa, on se refera ça quelque part dans les finales un de ces jours! Avec un jury et tout. Bonne chance pour tes Concours et tout. Tiens toi près de ton téléviseur, tu vas finir par me voir sur les planches, moi aussi.» Ses yeux, un instant, luisent de rêves. Elle renifle. «Aller, salut.» Comme elle vient, Amy disparaît. Ainsi elle a l’habitude. Elle se contente de vous emprunter, l’espace d’un instant souvent éphémère. (c)Golden

feat. Noah Evans

HORS-JEU: