J’arrive presque à neuf heures au centre pokémon ce matin et je suis très en retard. De tous les jours de la semaine, il a fallu qu’un Grotadmorv en colère choisisse ce matin pour envahir le périphérique et bloquer la circulation pendant plus d’une heure, jusqu’à ce que les rangers parviennent à le capturer. Ce même matin où je reçois évidemment une classe de jeunes lycéens qui viennent visiter le centre et les laboratoires et que je dois gérer puis que le médecin-chercheur est en congés jusqu’à la semaine prochaine. Lois de Murphy, quand tu nous tiens… A peine garé, j’enfile ma blouse en sortant de la voiture et dans ma précipitation, je manque de refermer ma portière sur Cachou qui me suit à la trace et sur Gala qui depuis maintenant deux jours, ne quitte plus d’un pouce l’œuf de Medhyèna que m’a offert Natsume. Il a fallu que je confectionne une poche en tissu pratique que la Marconium passe autour de son cou pour garder l’œuf près d’elle en toute situation. Quand je vous parlais d’une vraie mère poule…. C’est juste vraiment mignon, vraiment. Cachou part devant mais Gala me suit en trottinant la tête bien haute pour surélever l’œuf dans sa poche cousue main et un peu bancale mais au moins, elle est pratique et elle fait le boulot.

Quand nous pénétrons dans l’entrée du centre, la classe est déjà là, une trentaine d’adolescents patientent en discutant à droite ou à gauche, en détaillant curieusement les couloirs qui s’étendent derrière eux ou en observant les photos encadrés sur les murs représentants des pokémons, des employés et des clients, des techniciens de laboratoire, des articles de journaux qui parlent du centre…. Des souvenirs au fil du temps de ce qu’a été le centre pokémon et de ce qu’il est aujourd’hui. Je me place au centre de la pièce et j’attire leur attention en me raclant la gorge.

« Excusez-moi, rapprochez-vous, voilà. Vous pouvez avancer encore un peu, très bien. Alors je me présente, je m’appelle Noah Evans et je travaille ici depuis quelques années maintenant en tant qu’interne et chercheur. Je suis spécialiste des pokémons de type canin comme les Lougaroc dont vous avez un spécimen juste derrière vous ou encore les Goupix, Caninos, Malosse pour les espèces qui vous sont les plus familières. On va parler du centre maintenant, si vous avez des questions, surtout n’hésitez pas à m’interrompre. »

Je ponctue ma petite tirade d’un sourire pour les mettre à l’aise alors que tout le monde se tourne pour regarder le Lougaroc paresseusement endormi derrière les baies vitrées de l’accueil où le soleil réchauffe le sol. Une jeune fille lève brusquement la main et je lui  donne la parole.

« C’est vrai qu’ils ont plusieurs formes ?
- C’est vrai, il existe trois formes connues, celui-ci est de forme diurne. »

Elle hoche la tête et après m’être assuré qu’il n’y a pas d’autres questions, je les invite à me suivre dans la pièce de stockage où ils déposent leur sac et où je leur distribue à chacun une blouse jetable puis nous entamons la visite. Gala passe à côté de nous en trottinant, toujours la tête haute ce qui fait beaucoup rire les élèves. Elle disparaît dans la pièce qui  me sert de bureau et va retrouver son matelas moelleux disposé contre le radiateur. Un jeune garçon me demande ce qu’elle a autour du cou et je lui explique de quoi il s’agit, il semble à la fois curieux et surpris, je lui promets de le leur montrer à la fin de la visite. Nous commençons par les soins où je leur parle des internes, de notre travail, de l’organisation, des urgences, des infrastructures et du matériel. Excepté trois cancres à l’arrière, tous semblent très intéressés par ce que je raconte et ça me fait plaisir. Les échanges sont de moins en moins formels, ils ne lèvent plus la main pour poser des questions et parfois se coupent la parole les uns les autres mais le groupe est plus dynamique et je prends le temps de répondre à tout le monde. La partie des laboratoires est un peu plus longue pour eux, on sent clairement que leur intérêt se porte sur le métier d’interne et sur les soins aux pokémons mais ils se montrent quand même attentifs et je les remercie.

« Vous êtes célibataire ? »

Je sursaute en entendant la question et les adolescentes se mettent à glousser de mon mal aise. J’esquisse un sourire contrit en leur répondant que ça n’a rien à voir avec le sujet du jour et elles rigolent en me suivant dans la pièce suivante. Les jeunes de nos jours…. Nous finissons le tour des locaux peu après midi avec seulement une dizaine de minutes de retard. Je m’apprête à leur demander s’ils n’ont pas d’autres questions quand Gala déboule en courant dans le couloir en poussant des petits cris. Tout le monde s’écarte pour la laisser passer et elle s’empresse de tirer la manche de ma blouse pour me forcer à la suivre. Mais ce que je remarque surtout, avant même qu’elle ne me demande de la suivre, c’est qu’elle ne porte plus son œuf autour du cou.

« Je peux vous demander de rester là une minutes ? Je reviens tout de suite. »

J’emboîte le pas à Gala qui me mène jusqu’à mon bureau  où je découvre une petite femelle Medhyèna, roulée en boule sur l’épais coussin moelleux. En nous entendant arriver, elle relève la tête puis se dresse sur ses pattes et vient vers nous en titubant. C’est craquant, trop craquant. Elle se serre contre Gala qui la câline du bout du museau puis vient à ma rencontre, curieuse de savoir ce que je suis moi. Elle me lèche les bouts des doigts qui doivent sentir les croissants et le café puis elle part en courant en direction du couloir, la course mal assurée et les pattes qui partent dans tous les sens. Je rigole en entendant les exclamations des adolescentes du groupe qui viennent d’apercevoir le chiot. J’adresse une caresse à Gala en la félicitant puis nous rejoignons les lycéens. Les filles sont accroupies et couvrent de caresses la petite Medhyèna qui, sur le dos, se laisse tripoter de tous les côtés en mordillant des doigts à droite et à gauche. Les garçons, plu sréservés, observent la scène en souriant.

« C’est l’œuf que vous avez vu en début de matinée qui a éclot.
- C’est une fille ? Elle s’appelle comment ?
- C’est bien une femelle oui et elle n’a pas encore de nom.
- On peut lui en trouver un alors ! »

Après une longue liste de propositions et des discussions animées entre elles, les filles décident finalement de l’appeler Zora, apparemment le nom d’une chanteuse populaire qui fait fureur dans leur catégorie d’âge. Enfin je crois bien que c’est ce qu’elles m’ont dit mais Zora, c’est très bien.