Jōdan.
ft Minuit, PDV Mina, 28 avril 2023.
Ce matin en est un comme tant d'autres, sur les terres de l'Elevage du Tonnerre Nocturne. D'un geste rendu machinal par l'habitude, je jette ma cape sur mon dos, fixant la broche qui la maintient en place avant de rabattre son capuchon de manière à abriter complètement mon visage des premiers rayons de l'aube. Ce n'est qu'une fois ce rituel accompli, que j'actionne d'une main gantée la poignée de la porte de ma demeure avant de me glisser sur le palier, suivie de près par ma chère Minuit qui comme à l'accoutumée ne me lâche pas d'une semelle. L'air est frais ce matin, doux & agréable ; il semblerait qu'aujourd'hui soit une de ces rares journées où je ne souffrirais pas trop de la chaleur vêtue ainsi que je dois l'être chaque jour qu'importe le climat. Lourde cape de velours, longs gants, jupes ou pantalons longs, au minimum bottines ; tout l'attirail nécessaire à ne pas laisser les rayons meurtriers du soleil atteindre la moindre parcelle de peau blafarde faute d'y être exposée. Contraignant, certes. Heureusement, j'ai la chance de ne pas être si sensible que cela à la chaleur.. Il me faut tout de même des températures élevées & une atmosphère lourde pour être véritablement incommodée. Le fait de vivre depuis plusieurs années sous un climat tropical avec mon léger soucis aura peut-être fini par jouer là-dessus, remarque. Un fin sourire en coin, très discret, se dessine brièvement sur mes lèvres alors que mon regard se porte sur les terres du domaine. Au loin, je peux deviner la silhouette de mon époux, parti quelques dizaines de minutes avant moi commencer à distribuer les rations de nourritures à nos pensionnaires & aux résidents de la Pension. Notre fils doit déjà l'avoir rejoint dans cette première tournée du jour ; il ne manque plus que moi.
Comme chaque matin, ma tournée commence par la Pouponnière. Soins aux œufs, surveillance rapide de leurs états respectifs, vérification des couveuses.. Tout un rituel bien rôdé, mais toujours effectué avec la même attention, la même rigueur. Pas question de manquer quoique ce soit, aucun détail, de prendre le moindre risque. J'ai quelques écho à prévoir aujourd'hui me semble-t-il, les petits Malosse, Posipi et Negapi de la semaine passée n'y sont pas encore passés me semble-t-il. Un appel discret de la belle Noctali chromatique qui m'accompagne me tire finalement de mes pensées & de ma concentration plusieurs minutes après notre arrivée, & je lève aussitôt les yeux vers elle, pour la trouver sur l'étagère où reposent sagement les Œufs appartenant à mon époux, mon fils ou moi-même ; son museau doucement posé sur une coquille qui s'illumine subitement. Vivement, je la rejoins, pose une main prudente sur le petit ovoïde alors qu'elle s'en écarte légèrement pour me laisser faire. Mes sourcils se froncent brièvement, avant que mon visage ne retrouve sa neutralité caractéristique. Le petit bouge bien ce matin, en effet, & la lueur immaculée reste présente plusieurs longues secondes avant de s'estomper peu à peu. Ce bébé nous est arrivé il y a quelques semaines maintenant, & il faut bien avouer qu'il aura pris tout son temps, comparativement à ses congénères dont j'ai l'habitude de prendre soin. Enfant du Carvanha de Silas Fisher, un de mes anciens stagiaires désormais Hôte de Pension, il a été conçu ici-même, d'une mère appartenant à mon Elevage pendant un séjour du père dans le but justement de rencontrer des membres de son espèce ; un objectif largement atteint, comme l'avait prouvé l'existence-même de cette progéniture. J'avais été assez fière, en un sens, de rendre père & petit à leur dresseur, mais celui-ci avait décidé de repartir sans le futur bébé. Après concertation silencieuse avec son allié, il avait plutôt décidé de me le laisser, de m'en faire don en somme ; justifiant la présence du petit Œuf sur l'étagère réservée aux futurs alliés des employés de l'Elevage. & je dois bien admettre que malgré moi, j'avais fort hâte de rencontrer ce tout-petit qui avait, comme pour nous faire languir, décidé de prendre le plus de temps possible avant de découvrir son nouveau monde. Enfin, l'essentiel demeure qu'il nous arrive en pleine santé, n'est-ce pas?
Lentement, précautionneusement, j'examine son cocon protecteur avec une attention accrue. Si cela lui a pris longtemps de montrer les premiers signes d'éclosion, l'expérience m'a déjà prouvé que la suite peut alors s'enchaîner très rapidement. & en effet, quelques instants plus tard à peine, le petit artéfact se met de nouveau à briller, avec plus d'insistance encore ; & il ne m'en faut pas plus pour me décider. Presque précipitée, toujours prudente cependant, je m'en saisis d'un geste vif avant de quitter la Pouponnière d'un pas rapide, talonnée de près par Minuit. Dans mes bras, l'œuf se fait de plus en plus agité, & la lueur immaculée ne faiblit bientôt plus du tout. Autant de signes que l'instant est proche, & c'est avec un certain soulagement que nous atteignons le Bassin au bout de quelques minutes. Tout juste le temps de m'accroupir près de l'eau pour y glisser mon précieux fardeau, que celui-ci décide qu'il est temps de voir le soleil pour la première fois. Sous nos yeux se dessine le petit corps rond d'une toute jeune Carvanha au regard curieux, s'agitant vivement dans les flots en projetant des éclaboussures tout autour d'elle, faisant râler plusieurs autres pokémons ; plus pour la forme qu'autre chose cependant, car aucun, pas même le plus grognon d'entre eux, n'émet le moindre geste envers elle, se contentant généralement de se mettre hors de portée. Un ronron rieur & discret échappe à mon alliée de toujours, reflet de mon propre amusement. Petite puce farceuse.
- Joke. Ca me paraît adapté, qu'en dis-tu Minuit?
- Lii.
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