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To do or not to do [OS]
Natsume Enodril-Miyano

To do or not to do

"Des histoires de décisions compliquées"
« Je ne vous demande pas de me sortir vos certificats et autres, je vous demande d'arrêter votre baratin et me dire si oui ou non mes pokémon ont été infectés par votre faute. »

Il se masse l'arrête du nez, les traits de son visage plissés en une expression de déplaisir certain. Les sourcils froncés, le regard aiguisé, fixé sur les traits de son interlocuteur, il a du mal à paraître totalement neutre quand il sent son sang bouillir au creux de ses veines. Ce n'est pas le première fois, toutefois, qu'il est dans cette situation. Il s'était révélé un assez bon négociateur, sans non plus tomber dans l'excès, quand il avait passé quelques mois dehors, il y avait plusieurs années de cela. Depuis, et quand bien même il continuait d'être mal à l'aise, il avait tenté de profiter de ces capacités pour en profiter au niveau professionnel. C'était plus ou moins comme ça qu'il avait réussi à vivre par lui-même, d'ailleurs : s'arranger pour avoir un week-end de libre, discuter d'une augmentation, s'arranger question congés... Bref, il fait qu'il s'en sort plutôt bien. C'est juste qu'actuellement, il ressent davantage le besoin de claquer du pied sur la table que de discuter subtilement.
Sa patience est d'ordinaire plutôt bonne pour ces choses. Si il y a une seule chose d'utile qu'il a pu tirer de son éducation chez les Shimomuras, c'est le fait de savoir mesurer le bon moment où réagir lors d'une négociation ; et encore, c'est quelque chose qu'il ne fait que depuis quelques temps maintenant, car il refusait par fierté auparavant. Dans tous les cas, il tend à ne pas laisser ses émotions influer sur ses choix lorsqu'il discute des achats qu'il doit faire. Ce sont, après tout, des sommes conséquentes, quand on parle de nourriture. Des sommes telles qu'il lui était arrivé de fixer les factures en se demandant comment diable il allait bien pouvoir réunir le paiement, mais il faisait toujours de son mieux, lorsqu'il pensait au fait qu'il prenait la qualité optimale pour ses pensionnaires. C'était après tout une des seules choses sur lesquelles il ne lésinait jamais, même si ce n'était pas raisonnable si il souhaitait faire du profit (ce qui n'était pas son objectif, aussi utopiste que ce soit). Et, d'ordinaire, il croyait ne pas avoir à s'en faire.
Puis, les résultats de l'analyse de sang de Nagi étaient arrivés.

Il avait laissé Noah faire son travail, lorsqu'il était venu, et lui avait demandé de se charger de ça pour lui ramener ses trouvailles, tandis que, de son côté, il avait remonté les sources et passé quelques appels pour se faire une idée certaine de ce qui le travaillait. Il s'était permis des doutes, au départ, ne souhaitant pas tomber dans sa méfiance habituelle, mais il avait visiblement pris trop de pincettes, au vu des résultats, et il n'avait plus envie de marcher sur des œufs.
Et ce n'était pas le visage malaisé du pauvre type en face de lui qui lui donnait envie de se calmer davantage, d'ailleurs. Qu'est-ce qu'il déteste ça, en plus. Juste en dessous de ceux qui crient, ou qui se montrent autoritaires, insultants et colériques, il y a les pleutres de ce genre-là. Ceux qui mentent les yeux dans les yeux, en sachant très bien que leurs actions sont dangereuses pour d'autres. Et celui à qui il parle semble définitivement tomber dans cette catégorie.

« Non mais, monsieur Shimomura, comprenez que-
- Miyano. »

Sans doute que son hésitation vient aussi du regard mauvais que Natsume ne retient pas depuis son arrivée, et des tapotements nerveux, brutaux, de ses doigts sur le bois nouvellement ciré de son bureau. D'ordinaire, contrairement à ce qu'on pourrait croire, il sait se montrer particulièrement diplomate et aimable, quand bien même il a horreur de ces fausses apparences et doit toujours se défouler par la suite à cause de la frustration accumulée. En même temps, ce n'est pas si compliqué. C'est pénible, mais comme Natsume a toujours fonctionné par imitation des comportements pour parvenir à une sociabilisation correcte et acceptée, il s'en sort plutôt bien. Toutefois, actuellement, le ton sirupeux et empli d'un désir d'apaisement de son interlocuteur met dans un danger conséquent cette amabilité.

« Il y a des chances que cette infection, enfin, ne soit peut-être que le fait d'un événement postérieur à l'achat de nos produits, et des accusations telles que les vôtres peuvent être gravissimes pour l'image de notre société-
- Votre société qui insinue que j'ai empoisonné mes propres pokémon ? »

Ses dents se serrent alors que sa phrase se termine dans un quasi sifflement. Il sait, pourtant, qu'il ne doit pas céder à son énervement et l'affaiblissement progressif de son sang froid, surtout à ce sujet. Ces conversations, aussi bénignes qu'elles aient l'air, pourraient bien se retourner contre lui dans une cour si il faisait une erreur, mais c'est quelque chose auquel il peine à penser quand les images du mois de ces quelques nuits de décembre lui reviennent en tête.

« J'ai passé des journées et des nuits entières à surveiller des petits et m'assurer qu'ils ne s'étouffent pas dans leur propre vomi en leur retirant de la gorge, et vous venez me voir pour insinuer que je l'ai fait moi-même ? »

Il avait bien cru que les petits ne s'en sortiraient pas, cette fois-là. Même Maxime, aussi optimiste qu'elle était, avait pâli en découvrant la propagation des dégâts. Puis, évidemment, il y avait ces soirées à entendre les geignements de ses pokémon, à supporter le regard d'Hayato, qui, déjà fatigué par sa patte abîmée, s'empêchait de dormir et de se reposer pour pouvoir être là à tout moment pour sa compagne et leurs enfants. Si il avait lui-même moins dormi, il avait fallu que son Luxray le pince avec ses dents pour qu'il accepte d'aller au moins se reposer un peu, tant l'idée d'être loin et impuissant face à leur souffrance lui retournait le ventre. Pendant un temps, il avait même envisagé d'annuler les vacances de Noël pour sa part, et les choses n'avaient pas tourné ainsi par le seul fait des efforts conséquents déployés par Maxime, et des analyses de Noah. Alors, évidemment, les propos qu'il entend ne peuvent que l'énerver : c'est peut-être même précisément le cas. Au moins, son agacement semble partagé, car l'homme en face de lui se tend davantage contre son accoudoir, en reprenant rapidement la parole d'un ton sec.

« Écoutez, il arrive que-
- J'ai bien compris que vous flippiez pour votre fric. Je veux juste une réponse claire : est-ce que c'est de votre faute, oui ou non ? »

Comme si j'allais vraiment avoir une réponse sincère. Que suis-je bête.
Cet entretien tourne en rond, et il s'en doutait avant même qu'il commence, à vrai dire. Une petite partie naïve de lui, pourtant, espérait qu'il y aurait une manière de régler le souci le plus simplement du monde, mais il fallait croire que non. Et, de son aveu, il avait sous-estimé sa propre envie de plus en plus grande de sauter à la gorge de son interlocuteur ; mais bon, la prison ne le tentait pas des masses, Clive étant déjà bien assez insupportable sans qu'il ne le voit en permanence. Sa patience, toutefois, s'effrite au fur et à mesure qu'il se rend compte que parler à un mur ne le mène à rien, sinon à plus d'arrogance affichée, même si il est incapable de remarquer qu'il fait preuve d'un comportement semblable, à l'instant.

« Il n'y actuellement pas de certitude donnée, et nous vous demanderons de ne pas répandre l'idée que ce pourrait être le cas, car nous souhaitons que nos relations restent cordiales. »

Il lève à peine les yeux au ciel devant la menace tout juste voilée. C'est grossier, mais clairement, si la fausse apparence de cordialité a disparu, c'est qu'il doit donner l'impression qu'il désire donner : celle qu'il n'hésiterait pas à aller au bout d'une potentielle démarche. La réalité, toutefois, étant bien différente, il ne se permit pas d'afficher quoi que ce soit de plus qu'un visage fermé et désintéressé au possible.

« Je vois. »

La réaction « adulte », quand vous avez un désaccord ou un souci avec quelqu'un, est généralement considérée comme celle de rester calme, et d'afficher le moins possible que vous êtes embêté par ce qui vous est dit. Natsume, lui, comme à chaque fois qu'il est énervé, aime faire les choses à moitié : il y a quelque chose de plaisant, pour lui, à agir ainsi. Et c'est pourquoi il ne relève même pas les regards en reprenant la parole, saisissant des dossiers entamés sur le bord de son bureau pour se mettre à les examiner comme si de rien n'était.

« Alors avec toute ma cordialité, foutez-moi le camp. Je crois qu'on en a terminé.
- Mais enfin- !
- Yann ! »

Son regard ne s'est même pas relevé vers la porte au fond à droite qui vient de s'ouvrir, laissant apercevoir le visage d'un cinquantenaire visiblement un peu à l'ouest. D'une voix qui tente d'être désolée mais qui laisse en même temps clairement voir que ce n'est pas réellement le cas, il s'approche pour poser une main sur l'accoudoir du représentant. Sous son ton compatissant, un certain amusement transparaît, et Natsume est quasiment sûr qu'il devait être en train d'écouter à la porte, pour avoir été aussi rapide.

« Allez, vous l'avez entendu, faites pas la sale tête. J'vous indique pas la sortie, m'sieur. »

Son gloussement couvre partiellement les grognements frustrés qui s'évanouissent au fur et à mesure que l'intrus s'éloigne,  seul moment où le regard de l'asiatique se relève. De son côté, Yann étire le cou pour s'assurer qu'ils sont enfin seuls, et se rapproche sans grande prudence du bureau du cadet, prenant même le loisir de poser ses fesses dessus. Natsume lui offre un regard blasé, parfaitement conscient qu'il ne fait que ça que pour le faire réagir, ce qu'il se refuse donc à faire. Un peu déçu, l'aîné esquisse une moue boudeuse.

« Dooooooonc ? »

Il minaude presque pour obtenir l'information qu'il désire, curieux comme tout. Ne voyant sans doute pas l'intérêt de faire du suspense, l'autre lui répond plutôt prestement, quoique il concentre toujours son regard sur ses papiers. Et Yann, qui ne s'en est jamais vexé, est plutôt amusé de voir que l'écriture du cadet est plus hachée, plus vive ; si il cherche à cacher son irritation, c'est assez raté, mais bon. Pas comme si Yann pouvait se permettre de faire la leçon sur les méthodes de compensation, en même temps.

« Ils nient, si je diffuse l'affaire, ça sera un procès en diffamation. »

L'ancien comédien hausse un peu les sourcils, esquissant une demie grimace inquiète, à la fois quant à ce qu'il entend, et quant à la réaction quelque peu désintéressée de l'éleveur face à un aussi gros problème potentiel. Comme pour tenter de se rassurer sur la santé mentale de son interlocuteur, il crut d'ailleurs bon de clarifier les choses.

« Et j'imagine que t'as pas la thune pour aller contre une grosse boîte au tribunal, c'est ça ?
- Plus ou moins, oui. »

Nouveau silence. Et pour être sincère, Yann n'avait jamais été à l'aise avec les silences : enfant, il était un de ces gamins qu'il fallait continuellement occuper sous  peine de voir les larmes de crocodile commencer à tomber. Du coup, il n'y avait rien de bien surprenant dans son insistance, et ce en dépit de l'inconfort visible de son ami, qu'il tendait pourtant à respecter d'ordinaire. Quelque chose, en plus, continuait de le perturber et de lui donner envie de pousser la question jusqu'au bout. En haussant les épaules, il posa davantage son derrière sur le bureau, quitte à récolter un autre regard agacé, plus relevé cette fois, ce qui lui fit se dire qu'il abusait peut-être juste un petit peu.

« Tu peux toujours trouver un avocat, pour, enfin..
- J'ai déjà une avocate. J'avais juste pas envie de me foutre là-dedans, j'ai déjà assez de soucis comme  ça. »

Et, comme si il avait dit quelque chose qu'il ne voulait pas dire, il se crispa durant quelques secondes, moment où Yann vit passer dans ses yeux une lueur qu'il n'aurait pas su clairement identifier, mais qui ressemblait presque à de la panique. Ou du moins, à la panique de quelqu'un ayant peur d'être transparent qui se rend compte qu'il est transparent. S’apercevant de cela, il se dit qu'il ne risquait rien à reprendre la parole, ou du moins, c'était encore la solution qui lui déplaisait le moins.

« Hé... Si tu veux causer, tu sais que... »

Quand les gens ne veulent pas le faire, il ne sert à rien d'insister, et c'est tout particulièrement le cas avec son ami, qu'il sait réactif et vite défensif quand on approche des sujets complexes. Il admettrait, toutefois, qu'entre le gamin de dix-huit ans qui sifflait comme une vipère flippée dès lors qu'on lui posait une question personnelle, et l'adulte qui refuse encore de rencontrer son regard (habituel, toutefois, chez lui, puisque Natsume regarde rarement les gens dans les yeux quand il leur parle), il y avait une très nette différence. Un élément, toutefois, reste le même : le comportement  exact qu'il adopte lorsqu'il a effectivement quelque chose en tête.

« Tu penses que tu as tort d'avoir eu Masha et de te marier ? »

La question surprend malgré tout l'aîné, qui arrête pendant quelques instants ses balancements sur le bureau, ne s'étant très certainement pas attendu à ça. Entendre parler de soucis communs mais pas moins négligeables comme le stress, l'angoisse ou diverses choses aurait été plus envisageable, mais là, c'était un registre tout autre. Le personnel, c'était quelque chose que son ami n’abordait jamais, et qu'ils n'avaient jamais abordé par simple habitude, et peut-être par respect mutuel, aussi.Ne comprenant donc pas d'où cela venait, il balbutia un début d'intervention, un peu penaud. Il se souvenait avoir vaguement mentionné son ex-épouse, et Natsume avait aperçu plusieurs fois sa fille lorsqu'elle était venue lui rendre visite à la pension, mais c'était tout ; l'éleveur n'avait pas non plus beaucoup discuté avec elle, ce qui éloignait déjà l'hypothèse de la curiosité personnelle (si elle avait été un jour viable, venant de quelqu'un qui ne disait rien lorsqu'il venait travailler habillé en saucisse).

« ...Wow, euh... Tu me poses une question compliquée, là. C'est pas comme si j'étais un bon exemple, en plus, coco. »

Le barbu se massa la nuque. Sans être non plus gêné, Yann avait toujours eu quelques difficultés à parler de lui-même. Ce sujet-là, si il ne suscitait pas de malaise particulier, restait toutefois complexe. Mais, en remarquant que les yeux de son interlocuteur s'étaient relevé pour étudier ses réactions (un comportement qu'il devrait d'ailleurs sincèrement penser à arrêter, car ce pourrait être creepy, m'enfin), il supposa, sans grande preuve autre que son instinct, qu'il ne devait pas la poser pour rien. Après avoir poussé un long soupir, il haussa les épaules et d'une voix laconique, tenta de mettre ses pensées en ordre. Tant pis pour la raison qui pouvait pousser l'autre à lui demander ça ; de toute façon, il ne lui répondrait sûrement pas.

« Pas vraiment, enfin, j'aurais peut-être dû réfléchir davantage quand on s'est marié, avec Lena. Fin, sur le coup, on s'était dit que c'était une bonne idée, et j'avoue, bah... »

Il prit une petite pause. De lui-même, cela lui paraissait stupide, dit comme ça, mais il supposait qu'il n'y avait pas beaucoup d'intérêt à dire les choses de manière compliquée pour la forme. Si il prenait son temps, c'est aussi car il ne pensait pas que le scientifique serait pressé d'entendre sa réponse, mais, au vu de la légère inflexion de sa voix et de son intervention rapide, Yann constata qu'il avait tort.

« 'Bah' ?
- Bah ça a foiré car c'était une inconnue, en vrai, et qu'on l'a fait pour se prouver quelque chose. C'est souvent pour ça que ça foire, d'ailleurs. »

Rien de bien compliqué, pour lui. Natsume n'a pas l'air surpris non plus, d'ailleurs, voir même un peu ennuyé, comme si il avait posé une question dont il connaissait déjà la réponse, et qui le désemparait d'exaspération. Plus détendu, Yann s'étira machinalement avant de continuer.

« J'veux dire, on se connaissait depuis un an. En un an, tu connais rien de quelqu'un, c'est de la connerie que de croire le contraire, alors pour qu'un mariage de ce genre tienne... Bah c'est un foutu miracle, et c'est pas étonnant qu'on ait divorcé. »

L'asiatique ne sait pas trop pourquoi il a posé cette question, en vrai. Oh, il a une idée, si, mais pourquoi à lui, pourquoi ainsi, pourquoi sur cette situation en particulier... En vrai, c'est sûrement car certaines questions traînent au fond de sa tête depuis une vingtaine de jours, et qu'il ne s'est toujours pas permis d'y penser. Que ce soit à cause du travail, ou de ses propres blocages, il n'a pas vraiment réfléchi à la conversation qu'il a eu avec Samaël depuis cette fameuse soirée ; elle n'a pas cessé, pourtant, de la déranger en arrière-plan, comme un bruit muet au fond de sa tête.
Jusque à, il avait eu ces histoires diverses pour s'occuper, peut-être lâchement, également. Entre ça et les soucis plus personnels, comme les problèmes d'Axel à l'école... Disons qu'il avait eu de bonnes excuses. Mais, au fond, le problème restait là, sans réponse, sans même un angle de pensée. Et la frustration que cela engendrair, certes discrète, petite, ne faisait que s'accumuler avec le temps.

D'ordinaire, Natsume déteste ne pas avoir de solutions immédiates. Petit, il était du genre à s'énerver et à piquer des colères monstres quand les idées ne lui venaient pas tout de suite, tant habitué à ne jamais avoir de soucis sur ce point. Adulte, ce défaut l'a suivi, bien qu'il ait été forcé de relativiser depuis que ses relations amicales et proches se sont développées. Et dans ce cas particulier, il est bien forcé d'admettre qu'il ne peut rien y faire. Ses pensées ne sont toujours pas plus éclairées, et ce ne sont pas, malheureusement, les propos que lui servent Yann, qui l'aident véritablement. Il ne sait pas trop ce qu'il espérait. Peut-être la preuve que tout ça serait une mauvaise idée, car c'est actuellement ce vers quoi ses pensées penchent, quand bien même la culpabilité remonte en houle quand il s'en rend compte. Sans doute que c'est pour cela qu'il a demandé à quelqu'un dont il connait le mauvais passif à ce propos ; pour avoir une confirmation que c'est une mauvaise idée. C'est un comportement puéril et stupide, dont ila même un peu honte, mais ce qu'il entend ne va pas dans la direction de sa pensée, qu'il ne soutient pourtant pas lui-même.
Et honnêtement, il ne sait plus vraiment ce qu'il pense. Même le sourire rassurant de Yann ne lui donne pas envie de se détendre.

« Pas que je l'aimais pas, hein. Pendant un temps, je lui aurais tout donné. Alors je me suis dit que y'aurait pas de mal. »

Natsume se crispe quelque peu. C'est un raisonnement qu'il a failli avoir, pendant un temps. Se dire que si Samaël voulait ça, alors il pouvait bien céder à sa requête, même si cela le mettait personnellement mal à l'aise et qu'il n'y voyait aucun attrait. N'ayant toutefois plus les mêmes mauvaises habitudes qu'il y a quelques années, il avait par lui-même compris que c'était un comportement nocif. Mais avec quelques années d'expérience en moins, avec une immaturité émotionnelle plus grande... Quelques années auparavant, il aurait peut-être agi ainsi. Une autre pensée, alors, lui vient en tête ; est-ce que cette même immaturité ne serait pas encore présente ? Si il en s'en veut d'accumuler les éléments contre sans coupure de cette manière, il ne peut pas s'empêcher de dire que cette idée n'est pas infondée non plus. Après tout, vingt-cinq ans, c'est jeune. C'est un quart d'une existence moyenne, certes, mais il a conscience que ce n'est pas l'adultat soudain et total ; il n'est pas encore assez arrogant pour croire tout connaître du monde et de ses travers parce qu'il a vécu 2-3 trucs comme n'importe quel péquenaud sur terre. Sûrement qu'il se rendra compte d'ici quatre ou cinq ans que certaines de ses décisions ont été mauvaises, fondées sur l'impulsion. Celle-là, qu'elle soit un oui ou en non, pourrait bien en faire partie. Pourtant, sa propre certitude, qu'il s'efforce à construire, lui donnant toutes les bases supposément logiques pour en faire une indiscutable, ne tient pas dans sa tête. Quelque chose cloche, lui titille le cerveau, lui faisant se dire que son raisonnement n'est pas suffisant.
Leur cas n'est évidemment pas le même. Sans dire qu'il connait parfaitement bien son copain sur chaque sujet (car prétendre connaître totalement son partenaire c'est être soit arrogant, soit complètement con), c'est tout de même loin d'être un inconnu, et bien que ce soit compliqué à affirmer pour quelqu'un comme lui qui a autant de mal à saisir les autres, il croit pouvoir à peu près énumérer ses défauts, ses qualités et ses habitudes, les pénibles tout  comme celles qui l'indiffèrent (et celles qui l'attendrissent, parfois, sans qu'il n'accepte de le montrer car il suppose que ce serait embêtant). Les diverses longues, parfois pénibles et difficiles, ou simples et plaisantes conversations qu'ils ont eu en quasi neuf ans lui en ont appris assez pour ne pas avoir de grands doutes sur ses potentiels comportements. Sans tomber dans une prétention puérile, Natsume croit avoir une idée de qui il a affaire (et ça n'est pas peu dire, vu sa méfiance quasi pathologique, des fois). En plus, leur conversation a éclairé ce que pouvait être les attentes en face, alors ce n'est pas comme si il était entièrement perdu non plus. Les raisons, d'ailleurs... Elles sont bien différentes, encore.

Si il était parfaitement honnête, il admettrait qu'étant donné que son cas est à l'antithèse de ce qu'il entend, il y a des raisons de croire que ce ne serait pas forcément une catastrophe. Il était le seul, après tout, à craindre le pire dans son coin. « Comme toujours », lui dit-on parfois, avec un sourire qui n'en est pas vraiment un, et le ton agacé de quelqu'un qui n'ose pas vous dire qu'il en a marre, de vous, de vos interrogations, de vos doutes, de vos craintes. Il l'avait longtemps pris dans les dents, et continuait d'ailleurs de l'entendre de la bouche de collègues qu'il appréciait pourtant, mais il n'arrive pas à empêcher ses pensées de penser au pire. Il sait que c'est irrationnel, au fond de lui. Mais le nœud dans son estomac est toujours là, bien présent, pesant, étouffant. Le fait qu'il soit insensé ne change rien à sa présence, et plus il tente de comprendre, de peser des arguments, plus il se rend compte que les choses ne s'accordent pas aussi simplement dans ses pensées.

Pendant ce temps, d'ailleurs, le regard de Yann le suit alors qu'il semble perdu dans ses pensées. Compatissant, bien qu'il ne sache pas vraiment ce qui peut se passer dans la tête de son ami, il reprit la parole, sortant le cadet de ses pensées noires.

« En vrai, quand Masha est née, on a découvert qu'on ne se connaissait pas, et qu'on ne savait pas se parler. Donc à partir de là, la simple certitude d'être amoureux, tu vois, c'est que dalle pour tenir. Mais j'ai jamais regretté d'avoir eu ma fille, et pour le mariage, bah... »

Il haussa les épaules distraitement. Pendant quelques secondes, il parut hésiter sur la marche à suivre. Mais, finalement, comme si cela fatiguait de tourner autour du pot, il recommença à parler.

« Je sais pas, en vrai. J'ai pas de réponse à te donner. C'est une expérience de ma vie comme une autre, même si ça a foiré magistralement parce que j'étais pas prêt ou même dans le bon cadre. J'suppose que ça dépend de ce pourquoi tu le fais, quelque part, et de, bah... Du temps qui passe. »

C'est vague, très vague. Mais plus Natsume l'écoute, plus il se rend compte qu'il va peut-être devoir accepter le fait qu'il n'y a pas de réponse sûre, ou de catégorisme possible. Il ne peut pas objectivement  ranger l'idée comme une mauvaise chose, ou l'inverse, ce qui le frustre. Car pour lui, les choses marchent, ou ne marchent pas. Le milieu n'existe pas, et c'est ce qui rend la plupart de ses  décisions corrompues par la crainte de l'échec absolu. En vérité, Natsume est un peu frustré. Il espérait quelque chose de clair, des éléments faciles à repérer pour ensuite voir si ils pouvaient coller à sa propre réalité, mais il n'a rien eu de tout ça, sinon la vérification d'une chose qui le frustre. Chaque cas est différent, et il n'y aura que lui pour prendre le choix qui semble optimal. Yann ne semble d'ailleurs pas plus sûr de lui-même.

« J'veux dire, après cinq ou dix ans, t'es plus la même personne, et l'autre non plus. Donc ça marche plus, si c'était superficiel. Avec ou sans histoire de contrat légal. »

Il le sait, tout ça. Il le sait très bien, alors pourquoi est-ce qu'il continue de poser des questions ? De se torturer la tête avec des exemples, des suppositions, quand il sait déjà ce qu'il entend de la bouche de son ami ? Frustré, il ne répond que par un hochement de la tête, dépassé par son propre mode de pensée, qui ne fait décidément absolument pas sens, et qui ne l'aide pas à y voir plus clair. Remarquant la manière dont sa poigne sur son stylo s'est légèrement appuyée, Yann esquisse une expression quelque peu désabusée.

« M'enfin, ça, tu le savais déjà, j'pense. »

Natsume relève rapidement les yeux, mais ne répond pas directement ; c'est inutile, après tout, d'énoncer les évidences. En réfléchissant deux secondes, d'ailleurs, car Yann réfléchit toujours après avoir parlé (une très mauvaise habitude qui le poursuivra sans doute à vie), il en vient à se demander pourquoi son interlocuteur pense à ça, et à envisager quelles raisons auraient pu le pousser à le faire. Curieux, et un peu inquiet, il plisse les yeux, la voix hésitante, comme si il se doutait de quelque chose.

« Pourquoi, tu... ?
- Pas envie d'en parler.
- Ah. » 

Silence gênant, durant une seconde. Natsume s'en veut un peu, pour le coup, car sa voix a été sèche, et il s'excuse par une expression embêtée. En vrai, il ne sait pas vraiment si il veut en parler ou non, mais il a le certitude que si il le faisait, ce serait brouillon, pathétique, et qu'il ne ferait qu'être agaçant. Alors, par sécurité, il préfère encore se taire et éviter de s'épancher dans ce qu'il suppose être un misérabilisme indécis insupportable. Heureusement pour lui, son interlocuteur ne pousse pas la question plus loin

« J'vois. Tu veux causer boulot ?
- Ce serait plus agréable, oui.
- Compris. Enfin, ça tombe bien, parce que... »

L'asiatique plissa les yeux devant la manière évidente qu'avait l'aîné de prendre d'un seul coup des pincettes, avec sa voix plus douce, plus lente, et l'hésitation de son regard qui ne parvenait pas à se fixer sur un point fixe, et encore moins dans le sien. Suspicieux, il garda malgré tout son calme alors qu'un nœud se mettait à se former dans sa gorge, se contentant d'indiquer silencieusement à son interlocuteur qu'il serait agréable qu'il ne tourne pas quarante ans autour du pot non plus. L'air embêté, Yann esquissa un sourire gêné, ses doigts triturant nerveusement sa nuque.

« Quand le type en costard s'est ramené, en même temps, y'a un œuf de la pouponnière qui arrêtait pas de s'agiter et Misato est venue me chercher en panique, alors...
- Le bleu ?! »

Envolée, l'angoisse qui semblait crisper tous ses muscles sur place, bloquer sa mâchoire dans une éternelle expression renfrognée, et accorder sa voix dans une tonalité monotone. Le cadet s'est relevé d'un coup, le regard attentif, le geste vif, les traits de son visage déformés en l'expression d'une curiosité dévorante, avec ses grands yeux marrons écarquillés. Yann reste un peu immobile, d'ailleurs, en le voyant claquer des mains avec une telle vigueur sur le bureau pour se relever geste qui doit être douloureux en plus d'être inutile et bruyant, d'ailleurs. Et en un sens, ce fut une erreur grossière de sa part de rester planté là, car en quelques secondes à peine, le châtain avait enjambé quasiment toute la pièce pour saisir la porte, lui passant devant avec une vitesse quasi-prodigieuse. Étonné et un peu inquiet, le barbu se permit de le retenir en attrapant son poignet in-extremis, un sourire gêné aux lèvres.

« Woh, woh, doucement ! C'est bon, je l'ai amené, courres pas, t'as même pas lacé tes chaussures. »

Si Natsume lui aurait grogné dessus pour avoir pris la liberté de l'empoigner ainsi sans son accord, il se trouva tellement bête lorsqu'il baissa les yeux pour découvrir qu'il avait effectivement oublié de le faire, qu'il se dit qu'au final, mieux valait qu'il se taise. Et en outre, le son d'un craquèlement régulier attirait bien plus son attention que ça.
Posé sur le bureau de la réception, la couveuse portable est agitée. Son contenu se balance de gauche à droite, se percutant dans un rythme régulier contre le verre qui le maintient en sécurité. Il ne serait pas tombé, mais l'éleveur se dépêche pourtant de l'entourer de ses bras pour s'assurer qu'il ne lui arrive rien, la prise ferme mais pas moins dénuée de tendresse. Il ne sait pas ce que contient cet œuf, à vrai dire, mais cela ne l'empêche pas de le sortir avec une immense délicatesse, et de l'observer comme si il était tout ce qu'il y avait de plus bon en cette terre. Enfin, du moins, au vu de son expression qui permet à Yann de se dire, en l'observant d'un œil dans le coin du couloir qu'il a descendu sans se précipité de son côté, qu'il va tout de même bien et que ce n'est qu'une façade.

Au moins, la présence de l’œuf dans les bras du scientifique fait qu'il ne risque rien lorsqu'une chose rose et visqueuse sort d'un coup net de ce dernier. Un morceau de coquille vole dans le visage du réceptionniste, qui pousse un piaillement de douleur à peine relevé par l'hôte, trop occupé à s'émerveiller avec de grandes lueurs niaises dans ses yeux. Plus le contenu de l’œuf se révèle, d’ailleurs, plus ce dernier semble réagir. De l'affection quasi naturelle, Yann est sûr qu'il est passé à un ébahissement total, à la limite de l'incrédulité : il saisit davantage pourquoi lorsqu'il se rend compte qu'il s'agit d'une véritable Lilia vivante. Quoique très petite, la créature semble déjà curieuse, triturant les doigts de l'éleveur avec ses tentacules, sans que cela ne suscite la moindre réaction du scientifique, bien trop émerveillé. Il semble quasi absent, en outre et n'aurait pas bougé si le brun n'avait pas poussé un cri à la limite de la tessiture d'un chanteur d'opéra.

« Oh. Oh, la vaaaaaaaache !
- Yann, mes tympans.
- Nan mais, sérieux ! C'est qui qui t'a fait livrer ça, déjà ? Non parce que même-moi je fais mieux, question signature ! »

Lorsque l'oeuf avait été déposé devant la pension, personne n'avait donné la moindre information à son sujet. Si on aurait pu croire à un abandon, le fait qu'il soit soigneusement emballé dans une couveuse particulièrement coûteuse avait fait se poser quelques doutes aux deux hommes. Doutes qui s'étaient confirmé quand ils avaient remarqué ce qui accompagnait ladite couveuse. iEn dessous de celle-ci, une petite carte est attachée, sur laquelle est dessinée une petite maison, juste au dessus d'un personnage en bâtons. Yann le dévisage avec curiosité, interloqué, autant par la grossièreté du trait que par le sens. Natsume, lui n'y jette qu'un regard négligent, et relève les épaules comme si de rien n'était.

« Aucune idée. »

L'aîné n'est pas sûr de le croire. Enfin, d'un côté, c'est loin d'être la première fois qu'il fait un coup pareil, mais Yann croit comprendre qu'il n'en a pas envie, et qu'il a visiblement besoin de temps, même si il ne le saisit pas lui-même. Alors, au lieu de s'entêter à démêler le vrai du faux, car il y a de fortes chances pour que l'autre se torture déjà assez l'esprit avec ça, Yann esquisse une expression quelque peu bêta.

« … Hm, donc, est-ce que c'est le bon moment pour parler de mon augmentation, ou... ? »

La porte qui avait claquée derrière lui était signe que non. Enfin, le pauvre pokémon tout penaud au cœur brisé en train de regarder la porte, c'était autre chose.

« Hé, t'as oublié ta Lilia, neuneu.
- Merd- ! »

En pouffant un peu stupidement, il se dit qu'au fond, il n'y avait probablement rien à craindre. Les choses iraient à leur rythme, et l'hôte le comprendrait bien par lui-même ; il n'avait pas besoin qu'il le lui dise, en vérité.



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15H
Éclosion de Shiho
Natsume Enodril-Miyano
Natsume Enodril-Miyano
Eleveur
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Ven 6 Juil 2018 - 3:47
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