Feel the heat

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Je n'affectionne pas particulièrement les terres arides du Titak malgré leurs couleurs aux multiples teintes de jaunes, mais au moins, hormis les touristes, il n'y a pas tant de visiteurs que ça. Et les ruines offrent au moins un abri pour se protéger du soleil le temps d'une pause déjeuner. Ce n'est pas non plus un terrain sur lequel je vais souvent, alors je me suis dit que quitte à faire une sortie... Explorer les coins d'Enola que je connais moins ne peut pas me faire de mal, et de plus... Mulan, ma nouvelle recrue, voulait venir ici. La Ponyta s'accomode plutôt bien au climat de Baguin, mais elle ne se plaint certainement pas quand elle se retrouve sous un soleil de plomb. Les flammes qui parcourent sa crinière et sa queue semblent même plus ardentes que d'habitude. Je l'observe qui se roulent dans le sable chaud, comme si elle jouait, tandis que je suis assis à l'ombre des ruines au-dessus de ma tête, ma gourde d'eau bien en main dont je profite avec modération. Noah, en plus d'en boire, s'en insperge un peu la nuque comme je le lui ai appris. Sa sœur est partie jouer chez une amie, aujourd'hui, alors j'ai décidé de le prendre avec moi ; en le couvrant de la tête au pied pour qu'il n'attrape pas de coups de soleil, bien sûr. Enfin, en le couvrant... C'est paradoxal de dire ça dans une région aride et où il fait très chaud, mais le terme exact serait plutôt que je l'ai vêtu de façon à ce que la chaleur ne lui tape pas sur la tête. Et faut dire que si le bob me donne l'air vraiment con quand j'en porte, ça lui va, pour sa part, à merveille. C'est lui aussi qui m'a parlé des ruines, pour être honnête. Je l'ignorais, mais ça l'intéresse un peu, on dirait. Il enviait sa jumelle de les avoir visité avec sa classe l'autre jour, alors pour rattraper le coup, il désirait les voir avec moi si sa maîtresse ne l'y emmenait pas. Et je ne suis pas mécontent de passer un peu de temps avec mon fils.

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« Tu tiens le coup, mon grand ? Pas trop fatigué ? »

Noah secoue la tête. On a assez de bouteilles pour pouvoir survivre à la chaleur le temps de notre visite, en théorie, mais je ne voudrais pas que ça soit un calvaire non plus pour lui. Je le connais, il serait prêt à supporter n'importe quoi pour quelque chose qui l'intéresse. S'il avait trop chaud, il se ferait plutôt discret sans m'en parler, si ça lui permettait de continuer à examiner les ruines. Enfin 'examiner'... Avec son regard et son admiration d'enfant, évidemment. Mulan, la Ponyta que nous avons adopté récemment, vient le rejoindre pour espérer de lui quelques caresses sur le museau, qu'il lui donne en souriant légèrement. Depuis quelques jours, il y a quelque chose qui semble le tracasser, mais je n'ai pas encore osé demander ce que c'était exactement. Il a le droit d'avoir des secrets, après tout. J'ai d'abord mis ça sur le compte de la fin de l'année scolaire, puisque parfois ça le rend triste d'y penser, mais.. Je ne sais pas. J'attendais qu'il vienne me parler. Quand ce n'est pas à sa mère qu'il se confie, c'est à moi, de toute façon. Les mots ne lui manquent jamais lorsqu'il vient me faire part de ses doutes et de ses problèmes. J'espère que je lui suis de bons conseils, quand même.

« Pourquoi elle est pas là, Aurore ?
- Oh, tu sais... Elle aime pas trop les déserts, en vrai. »

Il demande probablement ça parce qu'elle est du type feu, elle aussi, mais ce que je me retiens de lui dire, c'est qu'elle fait plutôt sa diva, en vérité. Elle déteste quand le sable s'accroche à son pelage car c'est pas aisé de l'en déloger, après. Ironiquement, elle trouve la neige bien plus amusante, et au moins, elle peut la faire fondre quand elle en a envie. Mais bon, les terres arides... Très peu pour elle.

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« Alors comme ça, les ruines, ça t'intéresse ? C'est chouette. »

Quand on connait un peu Noah, on sait qu'il rêve de faire carrière dans la musique. C'est un truc qui le passionne depuis toujours. Les goûts peuvent évoluer et il peut changer d'avis plus tard, mais s'il continue dans cette voie, je suis certain qu'il ne risque pas de s'ennuyer, en tout cas, même si ce n'est pas non plus un domaine facile. Mais il aime beaucoup l'Histoire, aussi, de ce que j'ai cru comprendre. Lui qui est si timide à l'oral, son enseignante m'a raconté comment il présentait ses exposés avec fascination. J'ai été un peu surpris, mais il arrive, après tout, quand il est à la maison, qu'il m'explique ce qu'il a appris avec pas mal d'ardeur, quand il veut. Faut dire qu'il peut passer des heures à lire dans sa chambre, quand un sujet attire son attention. Moi qui pensais que les ruines allaient l'ennuyer un peu, à cause de son jeune âge...

« Papa ?..
- Oui, mon cœur ?
- Maëlle et moi, c'est bien qu'on dorme dans la même chambre ? »

Mon sourire tendre lancé dans sa direction s'affaisse un peu, remplacé par une expression étonnée. Je ne m'attendais pas à ce qu'il me parle de ça, encore moins maintenant. Je me demande pourquoi il s'interroge tout à coup là-dessus.

« C'est-à-dire ?.. Tu aimerais changer de chambre ?
- J'sais pas... »

Mulan observe mon fils avec un regard curieux en voyant la mine de ce dernier se ternir légèrement. Inquiet, je grimace, reconnaissant à ce ton, à cette expression, ceux qu'exécute mon gamin quand quelque chose le trouble mais qu'il n'ose pas m'en parler pour une raison ou une autre.

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J'avoue avoir un peu de mal à comprendre. C'est lui, après tout, qui voulait bien qu'ils dorment dans la même chambre. Si Maëlle n'a aucun mal avec l'indépendance, Noah était plus rassuré de ne pas encore dormir sans sa sœur. Ils ont évidemment deux lits séparés, mais quelques fois, ils aiment bien regarder des émissions ou des livres ensemble. Mais ça donne parfois lieux à des disputes, alors peut-être... Peut-être qu'il se demande s'il ne faudrait pas mieux désormais qu'ils aient chacun leur chambre ?.. Je suis confus. Je sais que Noah est plutôt du genre dépendant, au contraire de sa jumelle, alors ses doutes me troublent. Je tente de réfléchir à ma propre situation, mais Judith et moi avons toujours eu des chambres séparées, en fait. Cela lui arrivait de venir en pleine nuit jusqu'à mon lit pour dormir avec moi quand elle faisait des cauchemars, mais le lendemain elle revenait dans le sien.

« Eh bien... C'est sûr que vous ne pourrez pas dormir dans la même chambre pour toujours. Et ce n'est pas si grave, tu sais, ça pourrait même être amusant, d'avoir ton propre espace. Mais pourquoi tu me demandes ça ? »

Le regard de Noah perd davantage de son éclat. Il baisse les yeux tandis que la Ponyta donne des petits coups de museau pour le réconforter, mais ça ne suffit pas à l'enfant pour qu'il lui donne de nouvelles caresses et Arceus sait pourtant comme il aime câliner les Pokémon. Même le Pyrax un peu plus loin n'est pas suffisant pour attirer son attention.

« Peut-être que Maëlle, bah elle veut plus être dans la même chambre que moi.
- Elle te l'a dit ?
- Non, c'est moi qui pense ça.
- Alors dans ce cas, on a pas à s'en préoccuper tout de suite, n'est-ce pas ? On pourra voir ça plus tard. »

Je sais bien, malgré le sourire tendre que je lui lance, qu'il n'a pas l'air entièrement convaincu. Il veut bien me croire parce qu'il s'agit de moi, mais j'imagine que ce n'est pas aussi simple dans sa petite tête blonde. Ce sujet semble toujours le perturber un peu -depuis combien de temps, je ne sais pas- et sans doute que ça continuera jusqu'à ce qu'il verra par lui-même que ce n'est pas si dramatique qu'ils soient dans deux chambres différentes. Peut-être bien qu'il sera celui qui demandera le premier une telle chose. Après tout, c'est vrai qu'ils ne peuvent pas rester éternellement dans la même pièce. Ils voudront certainement et auront besoin d'un peu d'intimité chacun de leur côté, ne serait-ce que lorsqu'ils invitent à la maison des amis qu'ils n'ont pas en commun.

« On a largement le temps d'y penser, tu sais. Pour l'instant, tant que ça vous va, on... Oh ! Regarde ! »

Mon regard, dès qu'il s'est levé vers l'horizon, s'est tout de suite fixé sur une forme en particulier qui me fascine tout de suite dès que je reconnais à qui elle appartient. Aussitôt, mon fils suit la direction que je lui indique, et ses propres yeux se mettent à pétiller aussitôt. Son sourire revient, et mon soulagement avec. Il semble surpris et à la fois admiratif en distinguant le Pokémon sauvage qui se situe pas très loin de nous mais que je n'avais pas remarqué tout de suite, tellement son pelage se confond avec l'environnement.

« Un Feunnec ! Je croyais qu'ils étaient super rares !
- Bah on en voit pas tous les jours, on a de la chance ! Tu veux t'approcher un peu ? »

Tout de suite, mon fils hoche de la tête, plein d'enthousiasme. Et j'avoue que je préfère le voir quand il est comme ça.

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Nous nous éloignons un peu des ruines pour nous approcher de la Feunnec. Cette dernière n'a pas bougé de sa place depuis tout à l'heure. On dirait qu'elle est très concentrée sur quelque chose. Sur le sol, elle a maladroitement tracé des cercles étranges. Fasciné, Noah s'accroupit pour les observer, en tentant peut-être de comprendre ce que ça signifie. Un message envoyé à ses congénères ?.. Possible. On ne saura sans doute jamais, puisqu'un léger vent balaye les dessins que la renarde a mis du temps à dessiner. En apercevant son travail disparu, la jeune femelle baisse la tête, déçue. Elle lâche même un couinement à fendre le cœur. Mon fils, évidemment, n'y résiste pas.

« Oh... Elle pleure ?
- C'est possible. Ses dessins se sont effacés.
- C'est dommage, je les aimais bien !
- C'est vrai... Mais on peut peut-être les refaire, non ? »

Devant mes mots, mon garçon tourne brusquement la tête vers moi, les yeux pleins d'espoir. J'opine pour lui signifier que j'étais sérieux et commence à me lever afin de rejoindre la Feunnec. En remarquant notre présence venir dans sa direction, le Pokémon sauvage sursaute et commence à montrer les crocs. Mais nous nous arrêtons à quelques petits mètres d'elle pour pouvoir redessiner les traits que le souffle désertique a emporté. Avec des cailloux sur la terre aride, nous faisons alors toutes sortes de formes, pas forcément identiques à ceux qu'il y avait, toutefois. Je n'ai pas pu voir bien ni longtemps ce que la Feunnec avait fait, alors je tente autre chose. Noah, en revanche, a le soin d'essayer de se souvenir et passe de longues minutes à réfléchir avant de voir s'il se rappelle des croquis de la renarde. Celle-ci, d'ailleurs, a arrêté de nous fixer d'un air méfiant pour observer ce que nous faisions. Elle tourne autour de nous et cligne des yeux, rendue intriguée par nos activités. Je pousse un léger soupir, amusé et attendri par sa curiosité qui a bien vite remplacé ses soupçons.

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« Tu veux faire des dessins avec nous ? »

La venue de la Feunnec a fait relevé les yeux vers Noah, qui semble soulagé de voir qu'ils ont réussi à attirer son attention. Elle n'a plus l'air méfiante, au moins. La renarde penche sa tête au-dessus de ce qu'a fait mon fils pour regarder ses œuvres. Elle s'assoit pour les contempler, comme si elle y éprouvait un réel intérêt. Au bout de quelques minutes, elle se met à recommencer ce qu'elle faisait et redessine des formes circulaires au sol, juste à côté de celles de l'enfant. Celui-ci s'arrête même dans les siens pour rajouter sa touche personnelle aux tracés de la jeune femelle. Si au début elle est surprise, son expression change pour arborer un sourire amusé. On dirait que ça lui plaît. Alors ils continuent un peu leur duo. Je décide de me lever moi-même pour les assister également, et nous débutons alors un travail de groupe. On ne sait pas trop ce qu'on fait, mais on improvise. On regarde, on tente de coller nos figures, de les mélangers pour créer quelque chose de nouveau... Sous le chaud soleil que les vents favorables nous permettent de supporter, on en vient à dessiner un peu n'importe quoi, mais la Feunnec met la main à la pâte avec nous, utilise ses griffes comme crayons et sa queue comme pinceau, essaye même de faire des représentations de nous. Pour ceux-là, je l'y aide un peu. On fait mon portrait, celui de Noah, et c'est moi qui rajoute la Feunnec entre nous deux. Le modèle se reconnaît d'ailleurs aussitôt et pousse un petit cri joyeux. Elle semble contente, tant mieux. Restée un peu en retrait, Mulan ose même s'approcher à son tour quand elle nous voit rire. Sans doute qu'elle veut se joidnre à la partie également, et déjà, elle laisse Feunnec jouer aussi et on la fait monter sur le dos de la ponette. Je suis heureux que mon fils ait chassé le tracas qui le gênait tout à l'heure. Cela reviendra probablement plus tard, mais pour l'heure, il pense définitivement à autre chose.

Nous passons bien tout l'après-midi à jouer ensemble. Noah est tout excité car il a vu un Pokémon pas si commun que ça aujourd'hui et qu'il a hâte de le dire à ses amis pour leur raconter notre journée. J'espère simplement que sa vantardise ne va pas lui attirer des ennuis, mais il sait se modérer, quand il veut. Je lui dirai, un jour, que c'est pas nécessairement comme ça qu'on se fait des copains, mais bon, ça a l'air de lui faire tellement plaisir, là... Je lui apprendra plus tard, s'il n'en tire pas des leçons lui-même. Pour le moment, je vois comme il s'amuse. Même que la Feunnec n'a plus du tout l'air hostile vers la fin de la journée et qu'elle le laisse même lui faire des caresses. Je dois bientôt mettre un terme à ça, puisque nous devons repartir à la maison.

« Oh... Déjà ?.. D'accord. Au revoir, Feunnec ! »

Mulan nous suit au trot pendant que nous saluons la jeune femelle d'un signe de la main pour lui faire nos adieux. Mais aussitôt, nous entendons des petits couinements peinés. Surpris, je ne rêve pas quand je me rends compte qu'ils viennent de ladite Feunnec que nous nous apprêtions à quitter. Rapidement, avec ses petites pattes, elle s'approche de nous et vient frotter sa tête contre ma jambe.

« Papa... Je crois qu'elle nous aime bien. »

C'est ce que je pense aussi, à la voir chouiner, comme si elle n'aimait pas qu'on l'abandonne. C'est qu'elle s'est attachée plus vite que je ne l'aurais cru. Mais bon, je ne résiste pas bien longtemps à ses grands yeux tristes et à ses oreilles baissées. Je m'accroupis alors pour me mettre à sa hauteur.

« Tu veux venir avec nous ? »

Le jappement suivant ne laisse aucun doute alors qu'elle remue un peu de la queue et qu'elle s'agite de nouveau, tout à coup excitée face à ma proposition. Elle vient même se blottir contre moi, et je sais qu'aucun retour en arrière n'est possible quand je commence à la prendre dans mes bras une fois remis debout. Elle se roule en boule au creux de ma poitrine, comme soulagée. Je suis bien faible, c'est un fait, mais... Elle est vraiment adorable, en fait.

« Bon bah...
- On la garde ? Pour de vrai ?
- Je crois que là, c'est plutôt évident. Allez, maintenant, on rentre à la maison.
- Ouaiiiis ! »

Il pousse un petit cri de joie et sautille sur place, fou de joie. J'ignorais que ça le mettrait d'aussi bonne humeur, mais... Bon, faut dire que je me suis un peu attachée à cette boule de poils jaune et orange, aussi, même si nous ne nous connaissons pas encore bien. J'avoue que ça fait un joli ajout dans mon équipe, aussi, par son double type assez sympa. Alors que nous nous dirigeons vers la sortie des ruines, toutefois, mon garçon me tire une nouvelle fois le t-shirt pour attirer mon attention et me montre quelque chose du doigt. Je suis ce qu'il me désigne et manquerait presque de sursauter, abasourdi, quand je constate un autre Feunnec qui est apparu un peu plus loin. Bah ça... Moi qui pensais qu'ils n'étaient pas si communs à l'état sauvage...

« Oh, regarde, papa, un autre Feunnec ! Je croyais qu'ils étaient rares !
- Bah... M-Moi aussi...
- On a trop d'la chance, alors !
- Euh... Euuuh... O-Ouais ?.. »

Décidément, cette sortie valait le détour.