C’était le jour J et je le redoutais. Vous vous demandez bien de quel jour J il s’agissait ? Eh bien ce n’était ni celui des vacances, ni celui de mon second concours ou d’une éventuelle rencontre. Non, c’était le jour des vaccins de Sun et de Nyx. Si j’étais assez confiant concernant la phyllali, c’était une autre paire de manches pour la zorua. La pauvre avait une peur de bleue des aiguilles. En fait, elle avait peur de beaucoup de chose et son premier vaccin avait été toute une aventure. Maintenant qu’elle savait à quoi ressemblait la seringue, dès qu’elle me verrait avec, je n’aurais aucune chance de l’attraper, surtout qu’elle était extrêmement douée à cache-cache, son talent d’illusion aidant, bien sûr. J’avais donc choisi de commencer par elle pour qu’elle ne se doute de rien, autant que possible. Prévenant, j’avais décidé de faire les vaccins à la maison, j’avais donc planqué dans le frigo les flacons et les seringues et j’avais attendu le week-end afin d’avoir le temps de m’en occuper parce que ça s’annonçait haut en couleurs.

Je ne voulais pas lui faire peur ni la trahir en lui mentant mais j’avais déjà essayé de la rassurer et de la convaincre et j’avais fait chou blanc. Il fallait qu’elle fasse son vaccin, il n’en était pas question autrement alors j’avais prévu de tenter de le lui faire durant son sommeil, peut-être ne remarquerait-elle rien. Après tout ce n’est pas douloureux, elle ne devrait même pas se réveiller si je fais attention, surtout que quand elle dort, elle dort. J’avais prévu le coup, je l’avais bien nourrie le matin et dès le début de l’après-midi, elle s’était endormie pour une bonne sieste en compagnie du lougaroc qui me regardait d’un œil mauvais, sachant pertinemment ce que je m’apprêtais à faire. Lui non plus n’aimait pas beaucoup les piqures mais il se laissait faire. Je lui ai lancé un sourire contrit en m’approchant lentement. J’ai désinfecté la nuque de la renarde avec un bout de coton imbibé d’alcool puis j’ai délicatement pincé sa peau. Comme vous l’imaginez, c’est au moment d’approcher la seringue qu’elle s’est éveillée. Dans un mouvement de panique, elle s’est jetée sur moi, m’a mordue la main et a filé comme si elle avait le diable aux trousses pour se planquer sous le canapé du salon. Bon, je n’avais pas eu l’idée du siècle. Non seulement j’avais raté mon coup mais en plus, maintenant, elle était terrorisée. Bien joué Noah. J’ai soupiré en me relevant, désignant la direction prise par la renarde au lougaroc qui s’est levé et s’y est rendu en trottinant. Je suis moi-même allé à la cuisine pour emballer ma main dans un torchon afin d’arrêter le saignement puis j’ai retrouvé mon loup dans le salon. Il était allongé sur le sol, la truffe sous le canapé à pousser quelques gémissements pour tenter de faire sortir la zorua. La journée promettait d’être longue.

Je suis retourné mettre le vaccin au frigo puis je suis revenu, décidé à la convaincre plutôt qu’à la forcer même si je n’y croyais pas beaucoup. Je me suis allongé à côté du loup et j’ai soupiré en plongeant la main pour attraper la renarde qui se débattait pour m’échapper. Je l’ai tiré de sous sa cachette puis je l’ai aussitôt serrée contre moi alors qu’elle luttait pour s’enfuir, la couvrant de caresses et l’apaisant du mieux que je le pouvais.

« Je suis désolée ma belle, vraiment désolée. Je t’ai surprise, je n’aurais pas dû mais ce vaccin, il faut que tu le fasses, c’est pour que tu sois en bonne santé. C’est important. »

Elle tremblait dans mes bras et je m’en suis excessivement voulu d’avoir tenté de la prendre par surprise. Ce n’était vraiment pas l’idée du siècle. J’ai croisé le regard accusateur du lougaroc et j’ai haussé les épaules en soupirant, ne sachant pas quoi faire. Il y avait toujours la solution qui consistait à l’emballer dans une serviette pour l’empêcher de gigoter mais je crois que ce sont mes fesses que botteraient Cachou si j’optais pour cette méthode alors je me suis contenté d’attendre qu’elle se calme, qu’elle cesse de trembler. Je lui ai expliqué longtemps l’importance du vaccin, que ça ne faisait pas mal, que ça ne prendrait que quelques secondes. Je n’étais pas bien sûr qu’elle me comprenne mais elle s’est calmée petit à petit. Sun, qui nous avait rejoints après l’épisode du canapé, lui léchait le museau en guise de réconfort tandis que Cachou gardait sa truffe posée sur le ventre de la renarde.

« Il faut le faire Nyx… Tu veux que je commence par Sun pour te montrer ? »

Elle savait très bien à quoi ressembler une piqure mais si ça pouvait la rassurer de voir que Sun ne souffrait pas alors pourquoi pas. Comme elle s’est blottie encore un peu plus contre moi, j’ai pris cette réponse pour un oui. Refusant qu’elle s’enfuie et qu’elle se cache à nouveau, je l’ai tendue au loup qui l’a prise délicatement dans sa gueule par la peau du cou et l’a portée jusqu’à la cuisine. Faire le vaccin de la phyllali ne m’a pris qu’une minute chrono. Elle n’a pas bougé et le temps de vider la seringue, c’en était fini. La petite zorua fixait son amie comme si elle était folle et dieu seul sait ce qu’elles se sont dits mais au bout du compte, la renarde a cessé de se débattre. Elle n’était pas très volontaire et elle s’est contentée d’enfuir son museau dans la fourrure de son amie mais je n’allais pas passer à côté de l’occasion. Je me suis dépêché de préparer le mélange du second vaccin, puis, aussi lentement et délicatement que possible, je l’ai piquée.

« Et voilà, c’est fini ! »

Je l’ai prise dans mes bras et l’ai caressée avec vigueur pour lui faire oublier ce mauvais moment, la félicitant pour son courage. Et puis, soudainement, dans mes bras, elle s’est mise à briller et à changer. Connaissant le poids d’un zoroark, je me suis dépêché de la poser au sol et aussitôt, la petite renarde a laissé place à un pokémon de taille imposante. Je ne sais pas si c’est d’affronter sa peur qui lui a permis d’évoluer mais devant moi se tenait un grand zoroark qui se détaillait curieusement avec un petit air paniqué sur le visage. C’est sûr que ça change… Je l’ai rassuré en effleurant son pelage et comme lorsqu’elle était petite, elle s’est précipitée contre moi pour cacher son museau sous mon bras, me faisant basculer sur le carrelage de la cuisine. La pauvre ne se rendait pas encore vraiment compte ni de sa taille, ni de sa force mais ça viendrait, avec le temps. Elle était courageuse.