L'Elu auto-proclamé des Monarchistes fait son entrée ! La Compétition, Elixir et le Gouvernement sont en crise et les Anarchistes demandent la démission du Chef du Conseil.
/!\ C'est pas pour le dessin moche, c'est juste pour avertir que je ne défends pas les propos de Tristan bien sûr et qu'il agit sous le coup du délire et de la paranoïa provoqués par l'Emergendémie, il est évidemment manipulateur et égocentrique dans ce post /!\
16 Décembre 2017
Orage. Tempête. Je l'ai perdu dans les flots déchaînés qui nous ont séparé ce soir... et peut-être pour de bon. Ma main tendue ne l'a pas atteint. Ou plutôt, il l'a refusé, la marquant au passage d'une griffure qui ne se soignera pas. Je reste encore choqué de ce qui s'est passé ce soir, mais j'imagine que je n'aurais pas le temps de pleurer là-dessus davantage, avec tout ce qui nous tombe dessus ces derniers temps. J'avais juste... besoin de m'isoler un peu avant de laisser tout ça de côté. Mes doigts pourtant tremblent encore et je ne peux pas les arrêter, et si je les vois mal à cause de mes yeux humides, je les sens qui n'arrivent pas à se calmer depuis tout à l'heure. Je me surprends même à sursauter lorsque des bras viennent doucement se poser sur mes épaules. D'un geste vif, je relève la tête vers Synkro qui veille toujours sur moi. Son regard, autrefois aveuglé par la colère, a laissé place à une profonde tristesse. Tenter de le rassurer ne sert à rien, je ne serais guère crédible. Lui dire que je vais bien serait d'autant plus un pur mensonge que je ne vais même pas chercher à donner moi-même comme excuse. Sans arriver à comprendre ce qui s'est passé, la seule chose dont je suis sûr, c'est que je ne vais pas bien, actuellement. Il n'y a pas même un petit bruit de pluie dehors pour m'apaiser, car la nuit est étrangement calme et sereine, ce qui rend le tout encore pire. Le ciel nocturne fait preuve d'un étrange silence et d'une tranquillité énervante. Elle s'est déposée sur l'île comme d'habitude, indifférente et impuissante face aux tourments qui secouent ses habitants depuis des mois, voire des années. L'explosion à Amanil, la fin du Régime, l'épidémie... Moi qui ai été personnellement épargné de tous les problèmes que ces derniers événements ont pu causer, est-ce que moi aussi, comme cette nuit inébranlable, je suis en vérité demeuré insensible face à tous ces appels à l'aide ?..
Tu ne peux pas comprendre. Je me rappelle de ses mots qui sont sortis avec une telle violence que je ne pouvais croire les avoir entendu de lui. Une partie de mon monde semble s'écrouler alors que je me remets en doute, que je commence à me demander si, au final, ce ne serait pas le Weber qui aurait raison depuis le début. Puis une pression plus forte sur mon épaule de mon Pokémon me dissuade d'aller plus loin dans cette pensée, car si je continue, il risque de ne pas y aller de main morte. Je ne peux pas laisser des sentiments aussi pesants et pessimistes me saisir maintenant. J'ai d'autres choses à faire, d'autres gens qui m'attendent... Mais ça fait mal. Ma tête et ma poitrine se compriment autour de moi, avec une telle force que je crois être aussi fragile que de la porcelaine. Aah... Mais ne suis-je pas être Maître de la Ligue, maintenant ? Ne suis-je pas censé être imbattable et résistant ?.. Il ne fait pas long feu, aujourd'hui, celui que certain.e.s peuvent admirer. S'ils savaient, tous... J'ai des faiblesses aussi nombreuses qu'il y a de Pokémon eau existants. Une brindille qu'une brise légère pourrait faire plier à volonté, voilà comment on pourrait me décrire. C'est toutefois un véritable ouragan qui m'est passé dessus. Émotionnellement, physiquement... Le genre qui laisse peu de traces derrière lui. Le genre qui te garde un souvenir marquant, éprouvant, blessant. Et qui est difficile à décrire, ou même à raconter. Je suis surpris quand ma mère sort tout à coup de sa chambre, son portable à la main. Quand elle voit que je suis revenu, elle semble étonnée d'abord, puis inquiète ensuite tout en rangeant l'appareil dans sa poche. Je devine qu'elle comptait m'appeler, comme elle voyait que je tardais à revenir. Elle avait des raisons de se faire du souci. Mais ce n'est pas quelque chose que je vais lui confirmer ce soir. Pas maintenant, en tout cas. Il n'est pas aisé de faire tout un monologue sur ce qu'on vient de vivre quand ce fut difficile. Et elle remarque bien que je ne suis pas en très grande forme. Aussitôt, elle accoure vers moi pour s'installer sur le canapé du salon à mes côtés où je suis assis, les jambes repliées sur moi-même, avant de venir me blottir contre elle. Elle ne dit rien, mais juste l'espace de quelques instants... Je ressens enfin un peu de chaleur.
Dès le début, en fait, j'aurais dû me méfier. Il régnait sur les terres de la pension familiale une ambiance lourde et pesante qui faisait naître un poids au fond de mon estomac sans que je ne puisse connaître l'origine. Ma préoccupation pour Tristan était si forte toutefois que je refluais ce sentiment étrange qui me suivait et qui me disait de faire demi-tour, comme si quelque chose de terrible m'attendait. Je n'ignorais pas complètement cet instinct mais pensais qu'il y avait un rapport avec l'état de mon ami de plus en plus alarmante. Avec la propre santé déclinante de Natsume, je savais cependant à quoi m'attendre, alors ça ne m'effrayait nullement, même si je savais que ce que j'allais voir n'allait pas forcément me plaire ; et j'étais loin d'imaginer à quel point. Avec mes obligations pour aider à la reconstruction et l'anxiété qui me rongeait depuis la découverte de la maladie de mon copain, je n'avais malheureusement pas eu le temps de voir le Weber comme je l'aurais voulu, même si je suis passé régulièrement et que je savais qu'il avait de son côté sa famille pour l'épauler au cas où, malgré la triste nouvelle que j'avais apprise concernant ses parents, que j'avais connu et que j'avais regretté, à la fois personnellement et vis-à-vis de la peine qu'avaient dû éprouver Tristan et ses sœurs. Je ne l'avais pas vu depuis le décès de sa mère, maintenant que j'y pensais. Et je redoutais d'autant plus le résultat que cette perte avait dû engendrer chez lui quand je me rappelle de l'état dans lequel je me trouvais après la disparition de mon père. Mais j'étais là coûte que coûte pour le réconforter, même si ce que je pouvais faire était bien maigre en comparaison de ce qui doit l'accabler. J'avais eu un peu d'espoir que ma présence puisse l'aider en quoi que ce soit.
« Tristan ?.. Tu es là ?.. »
Je toqua doucement à la porte, avant de constater qu'elle était entrouverte. Je l'appela encore pour bien lui signaler ma présence et me permis d'ouvrir l'entrée avec précaution et lenteur après avoir demandé à mon Gardevoir de m'attendre dehors le temps que je finisse. Incertain, je passais la tête à l'intérieur de la demeure que je connaissais bien mais que j'avais pourtant du mal à reconnaître ce soir. Je fus tout d'abord surpris par la pagaille et le désordre qui régnaient dans la pièce, comme en proie au chaos du propriétaire des lieux. Des portraits cassés, des objets tombés au sol, des draps éparpillés un peu partout... Le cœur battant, je m'avançais dans la pièce principale pour constater les dégâts en détails. Un véritable carnage. Impossible de ne pas savoir le responsable de tout ceci quand la seule autre personne présente était recroquevillée dans un coin, le corps entier tremblotant et les yeux hagards, perdus dans le vague. Frappé par sa perte de poids et sa pâleur, je pouvais l'entendre claquer des dents comme s'il avait très froid, en dépit de la chaleur de la maison. Le voir dans un tel état me saisit, manquant de me faire chanceler sur place alors que je reconnaissais à peine mon ami. Est-ce qu'au moins il pourrait me reconnaître ? Se souvenait-il toujours de moi ? Aussi dicrétement que possible mais toujours en faisant en sorte d'être face à lui, je m'avança un peu pour approcher ma main en sa direction. Lentement, je la posa sur son épaule, espérant une réaction, quelque chose. Ma voix, plutôt légère, avait seulement pour but de le sortir de sa torpeur en lui signalant ma présence.
« Tristan ?.. Tristan, je-... - Qui va là ?.. Qui êtes-vous ?! »
Violente et brusque fut sa réponse et le sursaut qui s'empara de lui, me faisant bondir en arrière pour éviter un potentiel coup de sa part alors qu'il tenta de se relever et de s'accrocher comme il put au mur derrière lui. Je voulus l'aider en remarquant qu'il semblait avoir du mal, mais il ne me laissa pas faire, reculant au moindre pas que je faisais vers lui.
« Tristan... C'est moi, Sam. Samaël. Tu te rappelles ? - Sam !.. Sam... »
Je préférais demander, comme je savais que l'épidémie pouvait faire des dégâts parfois non négligeables au cerveau des malades. Mais entendre mon nom sembla lui avoir fait au moins un petit choc puisqu'il s'exclama tout de suite, avant de laisser son regard de nouveau se perdre dans le vague et de réfléchir. Ses yeux un peu éteints me scrutèrent un peu plus durement alors que, enfin, j'avais l'impression qu'il savait réellement qui j'étais. Au moins, sa mémoire ne paraissait pas affecté, ou du moins, pas totalement. J'ignorais jusqu'où les effets de l'Emergendémie allaient, pour tout dire, alors je tentais des trucs. Les cernes qui encadraient ses yeux et son teint blafarde n'étaient toutefois pas des plus rassurants.
« Qu'est-ce que tu fais ici ?.. - Je... Je suis venu pour t'aider... Je voulais voir comment tu allais... »
Je triturais nerveusement mes doigts, choisissant mes mots avec soin, prenant sur mon temps de parole pour ne pas risquer de dire quelque chose qui pourrait le brusquer, même si je me demandais de plus en plus si ça ne serait pas inévitable, vu son état. Était-il au moins stable mentalement ?.. Avec tout ce qui lui était arrivé, j'avais pris peur pour lui, d'où aussi ma venue une fois que je fus sûr que je pouvais m'absenter auprès de Natsume et après avoir appris pour la disparition tragique de sa mère. J'étais venu le voir à de nombreuses reprises déjà, mais pendant quelques jours, je n'avais pas eu le temps de passer le voir. Je déglutis, gêné par le silence qui s'installa tout à coup et par la manière dont il me dévisageait à présent. Il cligna des paupières, comme surpris ou confus, et laissa un blanc s'installer entre nous. Je n'osais rien dire de plus pour le moment, mais je crois que je m'attendais à tout sauf à ce qu'il parte aussi soudainement dans un grand éclat de rire. Mais pas un de ceux qui étaient plaisants à entendre.
Pourtant, je ne riais pas, moi. Je ne comprenais pas pourquoi il se comportait comme ça. Je me disais que ça devait être la maladie, encore une fois, mais il était véritablement étrange. Je n'avais plus sous les yeux le Tristan que je connaissais. La gentillesse et la douceur dans ses traits avaient disparu au profit d'une lueur mystérieuse et presque rancunière qui dansait dans son regard, comme s'il pensait que je me moquais de lui et qu'il y avait quelque chose qu'il ne me disait pas. Pour la première fois avec lui, j'avais un sentiment désagréable qui prenait place dans mon ventre pour y semer un creux froid et bizarre. Je n'aimais pas ça. Et j'aimais encore moins sa façon de s'approcher, révélant une démarche maladroite qui cachait une certaine forme de colère par ses mouvements lourds mais secs.
« Mais... Je-... - Depuis quand... Depuis quand est-ce que tu te préoccupes des autres, toi ? Depuis quand est-ce que tu te préoccupes de moi ?! T'étais passé où, quand j'en avais besoin ?! »
Sur ces mots, sa main vint débarrasser la petite table à côté de laquelle il passe d'un revers de la main, entraînant la chute d'une lampe qui se brisa aussitôt au sol. Je sentais une aura désagréable émaner de lui, qui ressemblait à s'y méprendre à de la colère. Mais je ne saisissais pas... Je ne saisissais pas pourquoi il semblait tant m'en vouloir. J'étais pourtant régulièrement aller chez lui pour m'assurer de son état préoccupant. Chaque fois que j'étais venu, la maladie s'était contenté d'une fièvre affreuse et de douleurs un peu partout dans le corps. Il était arrivé que le Weber ait des hallucinations et je ne crois pas qu'il m'ait un jour reconnu lorsqu'il était cloué au lit, mais ma présence néanmoins n'avait pas un effet négatif sur lui. Quand je lui parlais et que je faisais en sorte qu'il soit à l'aise, j'avais l'impression qu'il était soulagé, quelque part. Je me rendais compte, cependant, que je m'étais sûrement trompé, au final. Jamais encore je ne l'avais vu sortir de son lit et encore moins agir de la sorte. Il était méconnaissable, mais j'avais l'espoir qu'il se rappelle de tout ce qui s'était passé pour qu'il ne croit pas que je l'ai délaissé.
« Mais... De-Depuis toujours !.. Je suis venu te voir toutes les semaines pour-... - Mensonge ! Mensonge éhonté ! Tu n'es jamais venu... Jamais ! »
Ses accusations me firent l'effet d'un coup dévastateur. Il délirait, probablement, mais comment arriver à le raisonner ? Est-ce qu'il croyait vraiment que je l'avais abandonné ?
« Tristan... Je te jure, j'ai tenté de m'occuper de toi, de savoir comment... comment t'aider !.. - Arrête ! Tu mens encore ! Menteur ! »
Perdant la tête, il haussa le ton, et moi je me repliais de plus en plus sur moi, comme un animal apeuré. Il n'avait aucun souvenir de moi, alors ?.. Du jour où il m'avait annoncé avoir été atteint à celui qui a précédé le décès d'Anaïs, j'étais pourtant à ses côtés aussi souvent que je le pouvais. J'étais allé lui chercher des médicaments pour qu'il ait moins mal, je lui donnais à manger quand j'étais le seul présent ce jour-là, je l'ai même aidé à se lever pour qu'il se lave quand c'était trop douloureux pour lui de se redresser. Il avait même réussi, parfois, à me parler. Savait-il que c'était moi, je l'ignorais et je l'ignore encore aujourd'hui, mais il m'avait remercié. À de rares fois, il m'avait même souri. Un sourire léger mais sincère de reconnaissance, qu'une expression plus chaleureuse venait accompagner. Et dans ces moments-là, je me rassurais en me disant que ça allait s'arranger. Je n'imaginais pas qu'il pourrait se comporter comme ça, avec cette violence que je ressentais jusqu'ici tandis qu'un sentiment de malaise s'insinuait de plus en plus en moi.
« Tu étais là, la première fois que je suis tombé malade ? Que j'ai commencé à avoir de la fièvre et à vomir mes tripes ? Tu étais là, quand mon père est mort et que ma mère l'a rejoint peu de temps après ?! »
Je ne savais pas pourquoi le sort avait décidé de s'acharner sur lui. Pourtant ses sœurs, par un fait que je n'explique pas, n'avaient pas mis si longtemps à s'en remettre, même si la perte était encore présente. Mais, et je m'y attendais, le coup était extrêmement rude pour Tristan qui n'était pas aussi résistant qu'il voudrait le faire croire déjà de base. Et même quand on était fort mentalement, perdre quelqu'un qu'on aimait était toujours très difficile, alors deux à la fois... Je n'osais même pas y penser. Penser à comment le Weber avait dû supporter tout ça. Penser aux dégâts que la nouvelle avait provoqué chez lui, sans compter sa rupture avec Adélia. Il était détruit, ça se voyait, mais je restais impuissant devant, lui, et surtout piteux. Il n'y avait pas de bonne ou de mauvaise réponse à lui apporter. Je constatais simplement qu'il avait bel et bien oublié tout ce que j'avais fait. Et ce n'était pas bon signe.
« Je... Je suis désolé, pour tes parents... - Non !.. Non, tu n'es pas désolé ! Tu es tout sauf désolé ! Ce ne sont pas tes piteuses excuses qui vont les ramener ! »
Ses mots étaient de plus en plus violents à mon encontre. Je me surprenais même à avoir un mouvement de recul, sursautant alors qu'il élevait la voix de nouveau. Il commençait à me faire peur. Et c'était un sentiment qu'il ne m'avait jamais donné jusqu'alors. L'heure était grave, et il était au plus mal. Mais comment le soutenir, alors qu'il refusait mon aide, qu'il semblait même me rejeter tout entier ? Et surtout... Si moi-même je n'arrivais pas à tenir la distance... Il avait réussi à me faire trembler, à ressasser des souvenirs douloureux. Quand papa mourut, moi aussi j'avais eu des effusions de colère et de tristesse, m'emportant comme si j'étais coincé au milieu d'un océan de désespoir. Je ne savais pas quoi faire, j'étais même désemparé. Là encore, je me mis à éprouver de la peine mais aussi de l'indignation. Je sentais les larmes monter tandis que je me rappelais exactement dans quel état j'étais une fois sorti de prison. Une fois le cauchemar fini. J'avais eu de la chance, ce jour-là, de ne pas être seul. Tristan non plus, n'était pas seul, mais il balayait toutes offres que je lui faisais, moi qui ne cherchais qu'à l'épauler dans cette épreuve qui devait le faire souffrir au-delà de tout.
« Tu... Tu sais que j'ai perdu un proche aussi, je... Tu sais que je comprends ce que tu ressens ! - Tu comprends que dalle ! Tu peux pas comprendre ce que j'endure ! J'ai bien plus souffert que toi ! »
Ce fut là une erreur importante de Tristan qui démontrait bien son état aggravant. Des propos rudes, malsains et manipulateurs. Comparer sa souffrance en minimisant celle d'autrui n'était pas un comportement dont il fallait être fier. C'était tout simplement hautain et égocentrique ; comme si on pouvait même faire des comparaisons de la sorte. Si j'avais de nombreuses fois envié ceux qui avaient encore leurs parents au complet, jamais je n'avais mis mon deuil en avant et jamais je n'aurais souhaité que d'autres subissent le même sort. Souffrir plus qu'un autre, ça ne voulait rien dire. Ce n'était pas quelque chose dont il fallait se servir pour se montrer supérieur en quoi que ce soit par rapport aux autres. Pas besoin même d'avoir perdu un proche pour mener une vie dure et éprouvante. Entendre ça de la bouche de Tristan m'horrifiait et m'attristait. Je supportais de moins en moins sa colère injuste, mais je savais qu'il était en pleine folie. Je ne pouvais pas le laisser comme ça, même si... Même si c'était extrêmement difficile de lui faire face dans ces conditions.
« Tu m'as trahi, Samaël, alors maintenant, va-t-en. Pars. Pars, je n'ai pas besoin de toi ! »
Je me sentais de moins en moins bien moi-même, à vrai dire, mais j'étais encore retenu par une partie de ma conscience qui me disait que je ne pouvais pas partir tout de suite. Pourtant, je me sentais incroyablement petit et fragile, devant lui. Ne se trouvant plus qu'à quelques centimètres de moi, me toisant de haut, je ne pouvais lui offrir d'une expression chagrinée et craintif quand il m'opposait la sienne, orageuse et menaçante. Je ne voulais même pas me demander ce qu'il pourrait faire, si je ne faisais pas ce qu'il disait. Si je ne partais pas. Allais-je finir comme cette lampe ? Mais n'étais-je pas aussi brisé qu'elle, face à celui qui était mon ami mais que je n'arrive définitivement plus à reconnaître ? Je persistais malgré tout. Ma raison me hurlait tout aussi bien de m'enfuir, et les alarmes raisonnaient dans ma tête pour me donner la même directive. J'avais déjà pu sauver Tristan une fois, alors j'essayais de me convaincre que je pouvais recommencer. Qu'il y avait encore quelque chose à faire. Je cherchais en vain un espoir, un rien qui pourrait me dire que l'éleveur attentionné qu'il était se trouvait là, quelque part au fond de lui.
« Non !.. Tu.. Tu es malade et tu n'es pas bien ! Tristan, laisse-moi t'aider... - Tu es sourd ou quoi ?! J'ai dit [i]va-t-en ! »
Un signe, absent, que je n'avais pas vu. Que je ne verrai jamais. Pas alors qu'il faisait preuve d'une telle animosité et brutalité à mon égard. Pas alors que je sentis enfin un premier contact être amorcé, une barrière franchie qui fut le début d'un retour en arrière impossible. Qui marqua la fin de notre échange et d'une amitié qui aura duré trois ans. Trois ans de rires et de larmes, envolés dans l'espace, le temps de quelques secondes. Quelques secondes durant lesquelles Tristan n'en put plus. Quelques secondes qui lui suffirent à me saisir par les épaules avant de me projeter avec une force qui me parut surhumaine contre le sol, me faisant heurter le coin d'un meuble qui me laissa une entaille ensanglanté au bras que je garderai plusieurs jours durant, qui m'obligera à sortir une excuse stupide pour ne pas avouer toute une vérité que je serais le premier à vouloir oublier. Dès le moment où je toucha terre, les sanglots finirent par se montrer. Rien à voir avec la blessure qu'il venait indirectement de m'infliger, cependant. Lorsque je leva mes yeux implorants et rougis face à lui, je ne pus avoir en réponse que du mépris qu'il ne retenait pas de dévoiler. Je n'avais pas exactement compris sur le moment ce qui se passe ensuite. Un éclair a traversé la pièce pour se mettre entre nous avant que Tristan ne se fasse tout à coup projeter un peu plus loin comme par magie, sans conséquences graves toutefois. Il avait juste s'agit de l'éloigner, et je ne l'avais capté que lorsque j'aperçus Synkro qui s'était placé juste devant moi pour me protéger. Je voyais dans ses pupilles rouges un sentiment de colère qui me frappa, mais je n'eus pas le temps de faire quoi que ce soit de plus. Mon Gardevoir s'approcha vivement de moi pour m'emporter avec lui dans une grande lumière verte. C'était la dernière chose dont je me rappela juste avant que mon Pokémon nous téléporte dans mon salon. Ça, et quelques mots laissés derrière que je crus entendre avant de partir. Mais impossible de savoir s'ils venaient de mon imagination ou si je les ai réellement entendus. Je te déteste.
Une quinte de toux brusque et inattendue me ramène à la réalité. Perplexe, j'observe la porte de ma chambre d'où provient le bruit suivi par quelque gémissements de douleur étouffés, avant que je ne pousse un hoquet. Natsume. Avec tout ça, j'ai failli oublier Natsume. Un faible geignement plaintif s'échappe de moi alors que mes pensées sont cette fois toutes tournées vers l'éleveur qui souffre dans sur mon lit à cause de l'épidémie assez grave. Tel un Miradar, je cherche tout à coup les antidouleurs que j'ai l'habitude de lui administrer le temps qu'un remède définitif soit trouvé. En attendant, c'est malheureusement la seule chose que nous pouvons faire, mais si ça lui permet d'atténuer un peu sa peine, c'est toujours mieux que rien. D'un bond, je me lève pour me diriger vers la cuisine. La nervosité et mon choc ayant laissé des restes, toutefois, je me butte contre un meuble et trébuche par terre. Je n'ai pas l'air malin, décidément... Ma mère s'empresse alors de venir m'aider à me relever, me dissuadant de faire plus d'efforts que ça. Elle veut me décharger de cette 'corvée' et amener le plateau de médicaments à ma place. Moi, je ne peux que secouer la tête pour désapprouver.
« S'il te plaît, laisse-moi juste au moins faire ça. »
D'un regard suppliant, je me dois d'insister. Je dois tout faire pour éviter de penser à Tristan. J'ai besoin de quelque chose à laquelle me raccrocher, au risque de finir par éclater en milles morceaux. Je dois avoir une occupation, avoir l'impression d'être utile, avoir l'esprit ailleurs. Si je ne peux plus rien faire pour le malade que je pouvais appeler autrefois 'ami'... Je ferais ce qui est en mon pouvoir pour ne pas faillir avec Natsume. Je ne peux pas me le permettre, tout simplement. Au final, après quelques secondes d'hésitation où je sens qu'elle n'est pas très encline à me laisser, Maman finit par céder, m'aide à me relever, et me met sur un plateau ce que je pourrais apporter. J'ai séché mes larmes et laissé mes yeux reprendre une couleur normale pour ne pas éveiller de soupçons même si je suis conscient que, dans son état, ce n'est pas le Shimomura qui remarquerait ma fatigue. Tant mieux, il n'a pas besoin de ça. Doucement, Synkro m'accompagne un peu pour ne pas risquer que je te tombe à nouveau, et me laisse devant la porte de ma chambre où je suis le seul à pénétrer. Enfin, j'ouvre la pièce après avoir pousser un soupir las. Peut-être qu'un jour j'aurais de nouveau une discussion avec Tristan. Peut-être qu'un jour j'arrêterais de croire que je peux porter le monde entier sur mes épaules sans faiblir. Pour l'heure, qu'importe si j'ai l'impression que mon cœur pèse une tonne : tant qu'il y aura de la place à l'intérieur, je continuerai de le remplir. Jusqu'au jour, enfin, où il sera trop lourd.