Je m'arrête juste devant le pas de la porte d'entrée. Réajustant ma chemise, vérifiant une dernière fois que je n'ai rien oublié à la Pension même si ce n'est clairement plus le moment de se poser cette question, je m'éclaircis la gorge avant de diriger mes yeux vers la sonnette que je n'ose toujours pas toucher malgré ma présence. En vérité, à cause de la nervosité, j'ai fait une fois le tour du pâté de maison pour défouler mes jambes afin qu'elles arrêtent de trembler pour revenir devant cette demeure de Dimaras dans laquelle j'ai été invité aujourd'hui. Les rideaux sont écartés alors je pourrais vérifier qu'il y a bien quelqu'un à l'intérieur qui m'attend, mais ça serait à la fois impoli et irrespectueux de ne pas croire en les dires de ma collègue quand elle m'affirme y être. Mais je ne pense pas que ça soit le genre à faire faux bond. Il n'y a que moi et ma nervosité. Je ne sais même pas pourquoi je suis agité comme ça. Sans doute parce qu'on ne m'invite pas souvent comme ça. Sans doute parce que ça fait des années, aussi. Des années que Vic-... Que Mercy et moi nous ne nous sommes pas vus. Je n'ai pu la connaître pendant un temps que par les écrans de télévisions où elle est apparue de plus en plus souvent au fur et à mesure qu'elle grimpait les échelons de la Compétition. Et quand elle l'a finalement gagné, elle était omniprésente pendant des mois. Deux ans plus tard, j'ai pris sa place. J'ignorais la vie qu'elle menait, mais elle semblait profiter au maximum de la célébrité qu'elle avait acquise. Je ne sais pas trop comment elle a supporté tout ça. Ces regards et ces questions en permanence, cette immersion dans ta vie privée, cette oppression des médias... Ce n'est pas pour rien que j'ai décidé de me cacher physiquement par la suite et de laisser les rumeurs courir à mon sujet quand je suis devenu Maître. En étant conscient que remporter la Compétition allait amener ce lot de désagréments, je n'ai quand même jamais rien regretté et n'ai jamais perdu de vue ce pour quoi je l'ai fait. Mais ce n'est quand même pas toujours évident d'être sous les projecteurs, faut s'accrocher. Des frissons me parcourent d'ailleurs alors que je me rappelle l'interview de Mercy et de Zingaro il y a quelques semaines qui ne s'est pas très bien déroulé, mettant mal à l'aise la Championne Eau et son comparse. C'est à cette occasion que j'ai en outre pu remarquer à quel point la rose avait changé. Rien d'extraordinaire à ça, après toutes ces années (quoique certaines personnes ne grandissent jamais, me direz-vous), mais ça m'a en vérité plus troublé que ce que je pensais. Il y a vraiment une différence avec la jeune femme qui se trouvait sous les feux de la rampe il y a dix ans et l'Elite que j'ai découvert sur ce plateau de télévision. Elle semblait plus... Elle-même ? Je ne saurais dire et peut-être que c'est moi qui me fais des idées mais j'avais l'impression de la trouver étrangement plus naturelle et heureuse ces derniers temps en comparaison avec ses années de gloire. En même temps, elle n'a pas forcément connu que du bonheur dans sa vie privée. Je n'ai pas suivi tous les détails qu'on pouvait trouver dans les magazines à potins sur sa relation plus que houleuse avec le Champion d'Anula, mais ce que je sais de ce dernier me suffit largement pour me rendre compte que ça n'a pas dû être évident de le fréquenter aussi intimement. Je ne garde après tout pas un très bon souvenir de son interrogatoire avec Nagel qui a failli coûter à la réputation de la Milice déjà un peu fragilisée depuis quelques temps. Entre lui et Zingaro, on est pas énormément gâté, mais bon, heureusement qu'il y a les autres pour remonter la pente. Par ailleurs, si je ne sais encore pas grand chose des activités de Mercy à ce niveau, on m'a déjà dit qu'elle faisait de son mieux en tant que protectrice de Dimaras et il n'est pas difficile d'y croire.

Pourquoi du coup je me retrouve là, devant chez elle ? On va dire que c'est par sa cousine (je crois ?), Marylou, qui travaille à l'auberge depuis peu. Un jour Mercy est venu la voir là-bas et du coup nous nous sommes croisés par hasard. Je ne pensais pas qu'elle se souviendrait de moi mais elle a saisi l'occasion pour m'inviter dans sa demeure. Voilà donc une bonne dizaine de minutes que je suis devant sa porte à attendre d'avoir le courage de sonner. Je ne savais pas trop quoi apporter alors j'ai pris une des bouteilles de cidre que Natsume fait lui-même, sans même savoir si celle qui m'invite est friande d'alcool ou non. Au pire, le cidre, c'est pas ce qu'il y a de plus alcoolisé, vous me direz. Mais je me trouverais bien idiot si au final il avait fallu amener une bouteille de champagne ou de vin à la place comme le veulent certaines traditions. Enfin, je ne m'y connais pas, de toute façon. Encore un peu nerveux, il faut pourtant bien avancer, alors me voilà qui sonne finalement à la porte. J'espère que je ne vais pas avoir l'air très bête. Je ne connais en réalité pas tant de choses sur ma collègue que ce que j'ai pu apprendre aux infos. Et on sait tous très bien de la méfiance que nous devons réserver aux médias. Ces fourbes savent bien montrer ce qu'ils veulent, tant qu'il y aura encore des inconscients pour ne pas se renseigner par eux-mêmes. Encore heureux que la Compétition s'efforce d'exercer un peu de pression dans les magazines pour affirmer la crédibilité de leurs représentants, même si ce n'est pas forcément toujours une bonne chose non plus, je crois. Vaut mieux toujours être sincère, même si je sais que pour empêcher de ternir la réputation de son groupe, Swan sait comment s'y prendre (probablement qu'elle ne serait pas à son poste actuel non plus s'il en avait été autrement).
Je souffle un coup avant qu'on ne vienne finalement m'ouvrir. Gêné et un peu maladroit, je m'efforce d'avoir l'air naturel mais mon sourire bancal ne doit pas trop aider. Pourtant je ne suis pas embêté d'être ici, au contraire, mais j'avoue ne pas trop savoir comment me comporter.

« Bon-Bonjour !.. J'espère que je n'arrive pas trop en retard. »

En théorie non, au contraire, même ou alors ma montre n'est pas à l'heure (ce qui est possible aussi) ou alors à force d'être agité le temps est passé plus vite que prévu.

« Je... J'ai apporté du cidre maison. Je ne suis pas un expert, mais on pourra euh... le goûter ensemble, au pire. »

Levant la bouteille pour la désigner, j'essaye de me dire que ça nous détendra au moins peut-être. J'ai goûté bien quelques fois à la boisson que Natsu prépare, mais je peux aussi manquer d'objectivité à son égard et j'en suis conscient ; après tout, ça ne serait pas la première fois.

Elle a vraiment l'air enjouée. J'imagine que c'est déjà ça. Elle l'était déjà lors de nos retrouvailles à l'auberge, faut dire. Je suis content, si elle a l'air d'aller bien. J'étais un peu inquiet au début que son nouveau statut au sein de la Compétition l'étouffe, mais on dirait que son sourire dans les magazines n'est pas si faux, après tout. Cela me rassure au moins sur ce point. Son enthousiasme déborde tellement que j'ai l'air paumé, en comparaison, à jouer les timides alors que ce n'est pas mon genre d'habitude et que je suis d'ordinaire aussi énergique que ma comparse. Je me surprends même à sursauter en sentant quelque chose dans mon dos, me tournant bien vite pour découvrir en fait la fameuse rouquine que j'ai déjà pu voir une ou deux fois à l'auberge. Je ne me souvenais plus exactement de son nom, toutefois, et je n'ai rien dit à ce sujet de peur de dire une bêtise ou de vexer la concernée. Mais Marilou, ce n'est pas un nom si compliqué, après tout, alors je devrais m'en souvenir. Alors après que mon hôtesse se soit emparée de la bouteille d'alcool, je retourne la poignée de main de la jeune femme.

« Oh euh... Enchanté, Marilou. »

J'esquisse un mince sourire, pas encore tout à fait à l'aise mais sur le chemin de la détente. Un 'honneur' carrément... Est-ce que Mercy lui aurait un peu parlé de moi ?.. Parce que je ne vois vraiment pas quel honneur on pourrait avoir à me rencontrer, honnêtement. Je ne considère pas avoir déjà fait quelque chose d'exceptionnel. Je veux dire... Comparé à beaucoup de gens que j'ai pu connaître et qui, de mon point de vue, n'ont pas le mérite qu'ils devraient avoir. Mais on dit bien que tous les héros ne portent pas de capes, après tout ; et moi, j'en ai une, dans mon costume. Si je connais surtout Marilou de vue, j'ignore quel genre de personne elle peut bien être. Elle ne donne pas du tout l'air d'être méchante, en tout cas, ou alors je suis très naïf (ce qui est vrai aussi, vous me direz). En tout cas, pour le moment, une chose est sûre, de ce que je constate : la rose est la plus détendue de nous trois aujourd'hui.
Je m'y attendais, mais la question de mon travail arrive assez vite sur le tapis. En même temps, je ne sais pas si elle a suivi mon parcours quand je suis parvenu à la Ligue une seconde fois, mais il est vrai que la dernière fois qu'elle m'a vu remonte à quand j'avais seize ans ; et à ce moment-là, j'ignorais totalement ce que je voulais faire. Enfin... Si, comme toujours, et comme beaucoup de jeunes de mon âge sûrement, je rêvais de devenir 'Maître Pokémon'. Mais bon, sans savoir que ça allait vraiment se réaliser un jour, je ne m'attendais pas, au fond, à ce que je parvienne vraiment à un tel poste. Il m'aura fallu du temps avant de comprendre ce qui pourrait m'attirer en dehors des combat, mais il faut dire aussi que je repoussais volontairement la question à chaque fois dans un coin de ma tête en attendant que je finisse la Compétition (ma mère a été bien patiente à ce propos d'ailleurs quand j'y pense, puisque j'imagine qu'elle avait aussi le droit de s'inquiéter concernant mon métier d'avenir).

« Héhé, je suis démasqué ! Mais en effet, je travaille pour la Milice. D'ailleurs, c'est pas impossible que nous fassions quelques missions ensemble, ce serait marrant ! »

Enfin 'marrant'... Pas tant que ça, quand on y pense, surtout avec tout ce qui se passe en ce moment. Notre métier est pas toujours évident malgré les apparences. Surtout qu'on a cette concurrence avec Elixir qui nous traîne dans les pattes et je n'aime pas beaucoup ça. Enfin, honnêtement, après, je ne me plains jamais vraiment, puisque je ne suis pas celui qui pourrait le plus en danger. J'essaye d'aller sur le terrain aussi souvent que possible mais comme je dois gérer d'autres trucs à côté, on préfère faire appel aux Miliciens moins gradés. L'avantage, au moins, de mon côté, c'est que j'ai des Pokémon entraînés très efficaces en mission. Mais bon, j'imagine que parfois on préfère me voir derrière un bureau. N'empêche, j'aurais bien aimé être Champion juste pour pouvoir personnaliser un peu mon Arène. Le Stadium appartient bien plus à la Compétition en soit alors j'évite de trop y toucher au niveau de l'estéthique, mais si ça ne tenait qu'à moi, y'aurait bien plus de couleurs ! Cela me rappelle en outre que je suis en présence d'une collègue de travail dans le domaine de la Milice mais aussi dans celui de la Compétition, puisque nous en parlons. Je n'ose pas trop pour l'instant lui parler de mon rôle précis au sein de notre groupe. Elle finira par le découvrir en temps voulu, au pire, mais j'aurais peut-être peur qu'elle me traite différemment si elle le savait, ou qu'elle croit que je me la pète. Surtout, en fait, la présence de Marilou m'intimide, quelque part, puisque je ne la connais pas encore très bien. J'ai bien suivi néanmoins ce que Faust et Alice ont dû supporter quand les journalistes un peu trop curieux ont découvert leur lien de parenté, alors faut dire que je suis devenu aussi parano sur ça, je ne vais pas le nier. Je ne vais toutefois pas regretter toutes les morsures que Dahlia a infligé aux 'malheureux' qui tentaient d'extirper le plus de ragots croustillants à vendre aux infos.

« D'ailleurs, je ne pense pas te l'avoir dit en personne, mais euh... Bah félicitations pour ton poste de Championne ! Je ne m'y attendais pas du tout, pour être honnête, mais c'était une bonne surprise. »

Et elle le méritait amplement, à mon sens, il faut dire. Enfin... Du peu que je ne connaisse de ses capacités en tant que dresseuse, et pour avoir été une de mes premières adversaires officielles, je dois dire qu'elle n'a pas faibli malgré les années. J'ai récemment vu quelques uns de ses matchs et son titre lui va bien plus qu'on ne pourrait le croire. J'espère seulement qu'elle n'a pas de problème de ce côté comme j'ai pu en avoir.

« Tu as réussi à te faire à ton nouveau rôle ? Tu t'en sors, pour concilier ta vie professionnelle et ta vie privée ? »

J'ai bien conscience que je ne suis pas le seul qui pourrait faire un burn-out dans notre groupe, surtout avec certaines critiques que nous nous prenons ces derniers temps de la part de civils. Nous jouissons d'une popularité particulière parce que nous portons un costume scintillant ainsi que des teams balèzes et emblématiques, mais tout ceci pourrait se retourner contre nous un jour si nous ne faisons pas attention. Ou si comme Lionel par exemple nous refusons de voir parfois la réalité en face en nous cachant derrière de fausses joies. Parlant de Lionel, j'ai cru savoir qu'ils étaient invités, lui et Mercy, pour répondre à quelques interrogations des médias.

« J'ai vu, ce qui s'est passé, l'autre jour, sur le plateau avec Zingaro... Quel toupet, ces présentateurs ! Ils devraient déjà s'estimer heureux que tu veuilles bien répondre à leurs invitations, plutôt que de t'embêter avec des questions indiscrètes. »

J'étais assez contrarié, quand j'ai découvert le moment gênant que mes aînés ont dû traversé. Je réussis plus ou moins à éviter de répondre le plus possible aux questions, mais je ne vais pas faire l'hypocrite : en réalité, quand j'étais gamin, je n'étais jamais mécontent de voir mes propres idoles à la télé. J'ignorais toutefois tout ce que ça impliquait pour eux, et maintenant je crois que je peux mieux me rendre compte. Au fond, ce serait bien si ça pouvait montrer à tout le monde que nous sommes humains aussi. Bon, avec quelques zéros sur le chéquier, et je sais à quel point ça fait une grosse différence, mais égoïstement j'ai quand même parfois l'impression que les gens ne voient, souvent, que la partie immergée de l'iceberg.

Je ne voudrais pas mettre Mercedes en danger, loin de là, mais je suis le premier à encourager le travail en équipe, alors je ne doute pas qu'une mission en compagnie de la Championne pourrait être électrique. Au moins, si mon enthousiasme est partagée, ça me fait plaisir. Elle a l'air sincère dans son sourire et ses paroles jovials. J'espère au moins ne pas trop l'embarrasser avec mes questions, mais je crois que si je ne me serais pas attendu à ce qu'elle devienne Champion (même si ceci dit ma situation n'était pas du tout prévue non plus), elle a l'air d'avoir l'énergie et l'état d'esprit pour un tel rôle. Je ne ferais pas de leçons vu mon jeune âge, mais je sais qu'elle a traversé de rudes épreuves qui l'ont marqué émotionnellement, alors je lui souhaitais juste de trouver en ce poste à la Compétition et au sein de la Milice un équilibre qui lui permettrait de trouver la paix, comme ça l'a fait avec moi (enfin, si on oublie mon burn-out). Elle m'avoue d'ailleurs éprouver encore quelques difficultés pour appréhender les rôles qu'on nous a confié, ce que je peux aisément comprendre. Je ne regrette pas la Milice car je pense qu'elle peut apporter de bonnes choses pour l'île, mais je me serais bien contenté de faire le pitre devant la caméra pour montrer au public mes costumes flamboyants et ridicules. La Compétition en elle-même, je trouve, amène beaucoup de choses positives à l'île et ses habitants, sur beaucoup de plans. Je suis heureux si des personnes comme la cousine de Mercy sont enthousiastes à l'idée de la faire, car on a bien besoin de challengers. Voilà pourquoi je lui lance un sourire curieux et intéressé quand Marilou informe d'ors et déjà vouloir s'inscrire pour la conquête des arènes.

« Oh, oh ! Vraiment ? La Compétition t'intéresse ? »

Peut-être qu'elle veut faire les rubans... Quoiqu'elle a l'air de vouloir marcher dans nos traces, donc plutôt de mon côté, celui de Faust et bien sûr de la rose ici présente. Je suis intrigué de voir comment elle va arriver jusqu'à moi, dans tous les cas, si elle parvient à ce niveau. Je ne dois pas tellement être la personne qu'elle s'attend à affronter, dans ma présentation actuelle, encore un peu nerveux de mes retrouvailles avec Mercy de peur de dire une bêtise ou de la mettre mal à l'aise. Sans désirer lui rappeler de mauvais souvenirs, je voulais surtout lui dire que je la soutenais contre les nombreux inconvénients que les médias apportent, et qu'elle ne doit pas hésiter à se faire entendre. Je ne suis pas bien placé pour parler au nom de la gente féminine, mais je ne pense pas qu'elle soit toujours écoutée rien que pour ça. Au contraire, j'avais remarqué que ça avait été elle qu'on cherchait surtout à déstabiliser plutôt que son collègue masculin Zingaro, et ça m'a fait froid dans le dos quand je l'ai réalisé. Pour ma part... Je suis effectivement sollicité mais je fais détourner le regard aux curieux par tous les moyens. Heureusement, le ciel est mon meilleur échappatoire et mes Pokémon mes plus grands protecteurs. Je vous assure que vous ne voulez pas vous faire mordre par une Ptéra qui a déjà l'air toujours de mauvais poil.

« Oh euh... Y'a des jours où on me reconnaît, mais... En-Enfin Faust m'a appris à faire déguerpir les journalistes les plus insistants. Je pense que ça ne leur ferait pas de mal, un petit coup de jus de Shadaya. »

J'esquisse un sourire amical en croisant la Luxray qui nous a rejoint. Malgré ses cicatrices, je ne doute pas de sa fougue qui en a fait une star durant les heures de gloire de sa dresseuse. Sa présence me ramène des années en arrière, quand Mercy officiait sous le nom de Victoria pour défier la Ligue et qu'elle se trouvait sur bon nombre d'écrans, quand les matchs de la Compétition étaient pratiquement l'une des dernières choses qui nous apportaient un divertissement suffisamment marqué pour oublier temporairement la dictature sous laquelle nous étions. Cela m'a apporté, personnellement, l'espoir que j'arrive à devenir plus fort et à grandir pour qu'on soit fier de moi. J'ai été rythmé par les combats Pokémon et l'adrénaline qu'ils me procuraient, même si j'ai l'impression que cette période remonte déjà à longtemps. Malgré toutes ces années, nous avons, au moins, partagé cette passion qui nous anime au sujet des matchs et je le devine quand elle m'en reparle et qu'une étincelle s'allume tout à coup dans mon regard.

« Tu plaisantes ? Evidemment ! Je fais des combats pour gagner ma vie, même. Enfin... En plus de mon rôle à la Milice. Mais je me suis spécialisé dans le type Vol. Moi avec Kame, mais... »

Mais mon ami est toujours présent à mes côtés ai-je manqué de dire. Seulement, au même instant, la Poké Ball du concerné se met à bouger pour le faire apparaître subitement entre nous. Surpris, je finis par glousser, m'assurant au passage qu'il n'a rien dérangé dans la demeure de la Championne.

« Eh bin, quand on parle du Lougaroc... Hé ! »

Le gros Tortank me bouscule un peu pour avoir de la place et s'approcher de Mercy. En la reconnaissant, un grand sourire joyeux illumine son visage de reptilien bleu et il se permet même de prendre doucement l'Elite de Dimaras dans ses gros bras. Heureusement qu'il maîtrise sa force, ce balourd, même si je me tiens tout près au cas où et que je m'assure qu'il ne lui fait pas de mal.

« Doucement, mon grand... Héhé, excuse-le, je crois qu'il est content de te revoir. »

Windie serait sûrement ravie de retrouver la rose, mais je n'ose pas les appeler et encombrer davantage la maîtresse des lieux. Maintenant que j'y pense, mon allié de toujours partage en plus un souvenir marquant en rapport avec cette dernière : son évolution en Carabaffe au cours de notre tout premier match. C'était très important pour lui.

« C'est vrai que ton type à toi, c'est l'Eau, non ? Peut-être que tu pourrais me faire une petite démonstration, un coup. »

Je ne veux pas la forcer, si elle préfère garder cette énergie-là pour ses matchs officiels, mais si j'en ai d'ailleurs déjà vu quelques uns à la télé ou en rediffusion, l'expérience n'est jamais la même quand on l'a devant soit. Je peux comprendre aussi néanmoins si elle préfère que nous abordions d'autres sujets que son rôle de Championne, puisque ça ne lui amène pas que des privilèges comme on a pu le constater.
Avec un peu de honte, je réalise au bout d'un moment que la pauvre Marilou doit se sentir en retrait, avec nos vieilles histoires. Enfin 'vieilles'... Tout est relatif j'imagine puisque ce n'est pas 'si' vieux mais on ne doit pas l'aider à s'y retrouver. En vérité, si je dois l'affronter un jour, peut-être pourrais-je faire mieux connaissance avec elle en profitant de cette journée, puisque je ne suis pas souvent aux mêmes heures qu'elle à l'auberge quand elle y travaille. Mon attention se tourne vers la concerné, me demandant de quoi parler avec elle.

« Hm... Et toi, du coup, tu as un type de prédilection ? Y'a quelque chose qui te motive pour faire la Compétition ? »

Il n'est pas difficile de reconnaître un accent québécois chez la jeune femme. J'en viens à me demander comment Mercy est reconnue, chez elle. Est-elle admirée ? Est-ce qu'ils regardent tous dans sa famille la Compétition d'Enola parce que Mercy en fait partie ? Ce n'est pas rien, après tout, d'atteindre le niveau de la Ligue. Je pense à peine en vérité au fait que depuis le départ d'Adélia, elle n'a pas énormément de famille qui est restée. Enfin... Il y a bien Carter que je ne connais pas tant que ça, mais j'ignore la relation exacte qu'il entretient avec mon aînée.