Le retour à la maison est difficile, mais nécessaire. Je commençais moi-même à en avoir marre, de cette tour, et pourtant je la supporte tous les jours. Et je crois que je ne reviendrais plus dans cette ascenseur avant un moment (il est cassé, maintenant, de toute façon). D'un mouvement de tête, je remercie Gauvain pour son aide précieuse. Ce dernier prend congé pour aller dans le jardin rejoindre ses pères et son frère afin de, sûrement, leur montrer sa nouvelle forme. Suite à l'indication de Natsume, je le laisse se débrouiller seul pour atteindre le canapé. De mon côté, pendant qu'il s'installe contre les coussins pour se mettre à l'aise, je me débarrasse du plastron de mon costume et des autres parties en métal. Je suis rassuré de voir qu'il va déjà un peu mieux que tout à l'heure (en même temps on ne pouvait pas faire pire) mais je sais qu'il doit être totalement vide. J'hésite à dire quelque chose. Le silence est assez perturbant. Quand c'est aussi calme entre nous, ce n'est pas bon signe. Enfin, là c'est pas au niveau de notre relation, mais je sais qu'il va pas bien, quoi. Au moins, désormais, il est en sécurité. Je me tâte à lui faire une tisane pour qu'il s'aère l'esprit, mais alors que mon regard dévie sur la bouilloire, c'est le moment qu'il choisit pour prendre la parole pour la première fois depuis que nous sommes revenus.

Je m'attendais à ce qu'il s'excuse, alors je ne suis pas surpris, mais j'affiche quand même sur mon visage une expression désolée. Il était dans un tel état... Mais à chaque fois qu'il fait une crise, c'est la même chose. Enfin... Là c'était très particulier puisque y'avait un syndrome de stress post traumatique derrière en plus de l'asthme alors c'était encore pire. Je ne peux pas lui en vouloir d'avoir souhaité essayé de faire quelque chose de son côté. Je ne lui en ai jamais voulu pour ça. Je pense que j'aurais juste... aimé qu'il me prévienne pour que je n'ai pas à m'en faire. Même si... Je me serais fait du souci pour lui dans tous les cas, je me connais. Je pourrais lui dire qu'il n'est pas aussi impuissant qu'il se pense l'être, mais je peux imaginer le sentiment de frustration qui l'a parcouru : il n'aurait jamais fait ça si ce n'était pas pour une bonne raison. Ce que je lui interdis, c'est de ne pas faire comme si je pouvais ignorer ce qu'il traverse, même si c'est très personnel. Je ne peux pas dire que je ne m'attendais pas à ce que Natsu reste sans rien faire alors que l'île subit de nouveau des tensions. C'est vrai qu'il avait vraiment l'air décidé, dans mon bureau. Je crois que quelque chose bouillonnait en lui depuis un bail. Je ne sais pas ce qui s'est passé, mais ce devait être non négligeable pour qu'il en arrive à agir publiquement jusqu'à se faire arrêter. Je ne vais pas dire que ça ne me fait pas un peu plaisir qu'il m'avoue être désolé. J'ai été... un peu blessé par son attitude. Pas à cause de ses mots ou même de sa pensée, mais il n'était pas bien, je le sentais. Il semble déjà plus calme, actuellement. Alors je laisse un ange passer, me massant brièvement la nuque avec ma paume. Mon regard doré s'est dirigé vers lui, terni par l'inquiétude qui me ronge encore le concernant. Je déteste le voir comme ça. Mais il me rappelle un peu ce que je pensais il y a quelques années maintenant.

« C'est ce que j'ai ressenti, quand... Quand je suis entré dans la Résistance. »

Le sentiment d'être inutile et de ne rien pouvoir faire. Je devais laisser mon île brûler entre des mains vils qu'il était impossible pour moi d'atteindre. Il aurait été plus logique et normal que je laisse le soin à des personnages plus âgées et expérimentées s'occuper de libérer Enola et que je profite de mon adolescence en ne me préoccupant que de choses de mon âge. Cela me blessait toutefois de savoir que des gens comme Faust risquaient leurs vies pendant que je devais me contenter d'être heureux dans la mienne. Mais j'avais vu trop de personnes souffrir pour rester impassible. Je devais faire quelque chose. Ou du moins, j'avais désespérément le besoin d'apporter ma contribution.

« Je... Je ne veux pas t'empêcher de faire des choses dans ton coin. Mais ne t'étonne pas que je m'inquiète quand même de temps à autre. »

Pour ne pas dire 'tout le temps', mais je lui évite volontairement ce détail pour ne pas l'abattre davantage. Tout comme il s'est fait du souci pour moi quand j'étais dans la Résistance, je m'en ferais pour lui s'il décide de continuer à aller chez les anarchistes.
Lentement, je m'avance vers le canapé pour m'y asseoir à côté de lui. Mes bras s'ouvrent pour l'accueillir contre moi et lui offrir un câlin bien mérité. Je laisse ma voix douce l'apaiser un peu.

« Je t'aime, Natsu. Je m'en mêlerai toujours. »

Ma main passe dans ses cheveux pour les caresser. Il y a bien sûr des choses que je lui laisserai, mais tant que nous serons ensemble, il ne pourra jamais vraiment m'écarter de ses plans, quels qu'ils soient. Et moi non plus.